CENTRAFRIQUE: Des élections sur fond de guerre civile

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Le premier tour des élections présidentielle et législatives est prévu pour le 27 décembre et le président sortant, Faustin Archange Touadéra, fait figure d’archifavori.

Soldat à Bambari, ville du centre de la République centrafricaine, en novembre 2020.

Soldat à Bambari, ville du centre de la République centrafricaine, en novembre 2020.

AFP

La campagne pour le premier tour des élections présidentielle et législatives s’est ouverte officiellement samedi en Centrafrique, pays en guerre civile depuis plus de 7 ans où le sortant Faustin Archange Touadéra apparaît comme le favori.

Ce pronostic, quasi unanime chez les politologues et observateurs étrangers, a été renforcé il y a une semaine par l’invalidation de la candidature de son plus grand rival, l’ex-président François Bozizé. La chute de ce dernier en 2013 a précipité ce pays parmi les plus pauvres de la planète dans un conflit qui a fait des milliers de morts et poussé plus du quart des habitants à fuir leur domicile.

Le 27 décembre, c’est dans un pays où les combats ont beaucoup baissé d’intensité depuis 2018 mais encore aux deux tiers contrôlé par des groupes armés rebelles, qu’environ 1,8 million d’électeurs seront appelés à désigner un président et 140 députés. Un second tour est prévu pour le 14 février.

Premier meeting

Le Code électoral fixait l’ouverture de la campagne officielle à samedi pour les deux scrutins. Pour la présidentielle, 17 candidats sont en lice, dont M. Touadéra, outsider élu par surprise au second tour en 2016. Parmi les 16 autres candidats figurent notamment deux anciens Premier ministres, Anicet-Georges Dologuélé et Martin Ziguélé.

M. Touadéra doit tenir son premier meeting de campagne dans la journée à Bangui, capitale d’un pays qui pointait fin 2018 au 188e rang mondial sur 189 de l’Indice de développement humain de l’ONU. Et où 71% de la population vit en dessous du seuil international de pauvreté (moins d’1,60 euro par jour).

La Cour constitutionnelle a invalidé le 3 décembre la candidature de M. Bozizé, au motif qu’il est poursuivi dans son pays notamment pour «assassinats» et «tortures» et sous le coup de sanctions de l’ONU qui lui reproche d’avoir soutenu depuis son exil la contre-insurrection de milices dites anti-balaka.

Casques bleus

La Centrafrique a été ravagée par les combats après qu’une coalition de groupes armés à dominante musulmane, la Séléka, a renversé M. Bozizé en 2013. Les affrontements entre Séléka et milices anti-balaka, majoritairement chrétiennes et animistes, ont fait ensuite des milliers de morts. L’ONU a accusé en 2015 les deux camps de crimes de guerre et contre l’Humanité.

Les violences ont considérablement baissé notamment après un accord de paix en février 2019 entre 14 groupes armés et le gouvernement de M. Touadéra mais les milices, ex-Séléka, ex-anti-balaka ou autres, continuent sporadiquement de s’en prendre aux civils, même si les motifs de ces exactions sont aujourd’hui bien davantage crapuleux que communautaristes. Les groupes armés se disputent notamment le contrôle des ressources du pays, bétail et minerais principalement.

La Mission des Nations unies en Centrafrique (Minusca), forte de 11.500 Casques bleus, va déployer un important dispositif pour assurer la sécurité du vote.

Y-a-t-il un risque d’embrasement?

Les observateurs nationaux et internationaux situent ce risque plutôt après les élections qu’avant ou pendant. La population reste peu politisée et, même si des contestations violentes des résultats ne sont pas à exclure, surtout dans la capitale aux réactions de rue potentiellement éruptives, l’hypothèse de manifestations d’ampleur est jugée peu probable par les diplomates et les politologues. A fortiori depuis que la Russie a livré une vingtaine de blindés anti-émeute.

Aujourd’hui, c’est plutôt François Bozizé qui cristallise les inquiétudes. Le camp Touadéra accuse ce putschiste récidiviste, de 1983 jusqu’à sa prise du pouvoir en 2003, de vouloir tenter un nouveau coup de force. Depuis l’invalidation de sa candidature, ce général à la retraite est parti en brousse, dans un de ses fiefs du Nord-Ouest, où il demeure très populaire. C’est aussi un important foyer de milices qui lui sont restées fidèles et il pourrait être tenté de recruter des hommes, redoutent des diplomates et des ONG.

«Mais il serait assez mal calculé pour Bozizé de tenter quelque chose avant les élections, et de se mettre toute la communauté internationale sur le dos», tempère Thierry Vircoulon, spécialiste de l’Afrique centrale et australe pour l’International Crisis Group (ICG). Pour lui comme d’autres spécialistes du pays, c’est dans les mois qui suivent les élections que les risques d’embrasement seront les plus grands.

(AFP/NXP)

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