Coup d’Etat : dans l’ombre du général Oligui, la guerre fratricide du clan Bongo

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GABON
Coup d’Etat : dans l’ombre du général Oligui, la guerre fratricide du clan Bongo

Alerte publiée le 30/08/23, à 15 h 20 –

Jusqu’ici protecteur d’Ali Bongo, le commandant de la Garde républicaine Brice Clotaire Oligui Nguema a fini par déposer son président. En sous-main, les caciques du Haut-Ogooué sont à la manœuvre pour purger le système, à commencer par l’ex-première dame, Sylvia, et son fils, Noureddin Bongo.

Publié le 30/08/2023 Lecture 3 minutes

Soldats gabonais transportant le général Brice Oligui Nguema, chef de la garde présidentielle du président déchu Ali Bongo Ondimba, le 30 août 2023. © AFP/Gabon 24

C’est vers 11 heures, heure de Libreville, que le maître d’œuvre du putsch visant depuis plusieurs heures Ali Bongo est sorti de l’ombre : le général Brice Clotaire Oligui Nguema est désormais le nouvel homme fort au palais du Bord de mer. Paradoxalement, le commandant de la puissante Garde républicaine était jusqu’ici l’un des plus dévoués collaborateurs d’Ali Bongo, son cousin.

Sa fidélité remonte à une promesse formulée à l’ancien chef de l’Etat, Omar Bongo, avant sa mort en 2009. Alors aide de camp du président et chef de clan, il avait prêté serment de protéger son fils et successeur au pouvoir. Il a rompu le pacte quatorze ans plus tard, pour renverser Ali Bongo, qui briguait un troisième mandat malgré sa santé considérablement diminuée par un AVC subi en 2018 (AI du 12/06/19).

Une mise à l’écart en 2009

Brice Clotaire Oligui Nguema est un pilier du clan présidentiel du Haut-Ogooué. Non reconnu par son père, un Fang du Woleu-Ntem, il a été élevé dans la famille de sa mère, une Tékée de Ngouoni.

C’est dans ce village du Haut-Ogooué, dont est issue la famille maternelle des Bongo, qu’il noue un lien de proximité avec Henri-Claude Oyima, l’actuel président du conseil d’administration de la banque gabonaise opérant dans la région, la BGFIBank, et également petit-neveu d’Omar Bongo.

Très tôt, dès le milieu des années 2000, Oligui, formé en partie au Maroc, a occupé une place de premier ordre dans l’appareil sécuritaire à Libreville. Au lendemain de l’arrivée au pouvoir d’Ali Bongo, en 2009, il avait néanmoins été nommé attaché militaire à l’ambassade du Gabon à Dakar. Une mise à l’écart qu’avait alors particulièrement mal vécue le gradé.

En 2019, un an après l’AVC du président gabonais, Oligui Nguema était revenu en grâce à Libreville, d’abord à la tête Direction générale des services spéciaux (DGSS) de la Garde républicaine, en remplacement de son ennemi juré, Frédéric Bongo, demi-frère du président peu à peu marginalisé. Six mois plus tard, il avait les commandes de la très stratégique Garde républicaine.

« Grand frère » d’ODJB

Proche de Pascaline Bongo, qui entretient des relations en dents de scie avec son demi-frère, qui l’avait mise à l’écart sous l’influence de la première dame Sylvia Bongo, Oligui a longtemps composé avec les tensions internes au clan Bongo.

Il n’a jamais rompu ni avec la fille aînée et « chérie » d’Omar Bongo, également détentrice des secrets notamment financiers de la famille, ni avec le demi-frère de cette dernière, le jeune homme d’affaires Omar Denis Junior Bongo (dit « ODJB »). Egalement petit-fils du président congolais Denis Sassou-Nguesso, qui le protège, ODJB est en froid avec Ali Bongo et Noureddin Bongo, qui redoutaient son éventuelle ambition présidentielle. Etabli à Brazzaville, il se rend de temps à autre à Libreville, où il considère le chef de la Garde républicaine gabonaise comme l’un de ses « grands frères ».

La « Young team » sur la touche

Le coup d’Etat constitue le point d’orgue des rivalités qui traversent le clan Bongo depuis 2018. Un sentiment renforcé par le fait que la Garde républicaine est principalement constituée de figures tékées du Haut-Ougouée, à l’image de son chef et de son adjoint et lui aussi cousin d’Ali Bongo, Aimé-Vivian Oyini, très actif dans le coup.

Une partie du clan « historique » vivait mal la mainmise toujours plus grande de la première dame Sylvia Bongo et de son fils Noureddin Bongo sur les affaires du pays. Ce dernier s’était par ailleurs rapproché ces derniers mois de son oncle paternel Frédéric Bongo (AI du 28/11/22).

Noureddin Bongo a été immédiatement arrêté dans les premières heures du putsch, tout comme ses proches collaborateurs, parfois désignés sous le nom de « Young team » à Libreville : son directeur de cabinet Ian Ghislain Ngoulou, l’influent porte-parole de la présidence Jessye Ella Ekogha, le conseiller spécial du président Cyriaque Andjoua, le secrétaire général du Parti démocratique gabonais, Steeve Nzegho Dieko, le directeur adjoint du cabinet présidentiel, Mohamed Ali Saliou et un proche de Noureddin Bongo, Abdoul Oceni Ossa. Ces derniers sont tous deux fils de l’imam de Libreville Ismaël Oceni Ossa.

Depuis la prise de pouvoir par le général Oligui, Ali Bongo, en résidence surveillée, se trouve séparé de son épouse et de leur fils, Jalil Bongo.

Africa Intelligence

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