Tchad : l’opposant Saleh Kebzabo retire sa candidature à la présidentielle

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Tchad : l’opposant Saleh Kebzabo retire sa candidature à la présidentielle

Le chef de l'opposition tchadienne, Saleh Kebzabo en 2006.

Le chef de l’opposition tchadienne, Saleh Kebzabo en 2006.
© AP Photo/Sayyid Azim

Saleh Kebzabo, l’un des principaux opposants au Tchad, a retiré ce lundi sa candidature à l’élection présidentielle du 11 avril. Il a accusé le président Idriss Déby Itno, grand favori pour un sixième mandat, d’intimider ses rivaux par l’usage de la force.

Saleh Kebzabo, à quatre reprises candidat malheureux contre M. Déby, a annoncé sa décision au lendemain d’une tentative d’arrestation par l’armée à N’Djamena d’un autre candidat déclaré, Yaya Dillo Djerou. Arrestation qui s’est soldée par la mort d’au moins deux personnes à son domicile. « Il y a eu deux morts et cinq blessés, dont trois parmi les forces de l’ordre », a indiqué dans un communiqué Chérif Mahamat Zene, porte-parole du gouvernement. Des militaires ont voulu l’arrêter en vertu de deux mandats de la justice pour « diffamation et injures » à l’égard de l’épouse du chef de l’Etat.

Dans un communiqué, le mouvement de M. Dillo, le Front nouveau pour le changement (FNC), assure, lui, que cinq membres de la famille de l’opposant, dont sa mère, ont été tués par un corps d’élite des forces armées tchadiennes.

Cette information n’a pu être confirmée de source indépendante et les autorités n’ont pas donné suite quand l’Agence France-Presse a demandé si les personnes décédées étaient des membres de la famille de M. Dillo.

Lundi 1er mars au matin, on ne savait pas si l’opposant avait effectivement été arrêté. Il ne répondait plus aux appels téléphoniques.

« Climat d’insécurité »

Condamnant dans un communiqué « l’attaque militaire du domicile de M. Yaya Dillo Djerou », le député de l’opposition dénonce « le climat d’insécurité qui entachera certainement la campagne électorale pour les candidats qui vont affronter celui du Mouvement patriotique du salut (MPS) », le parti de M. Déby, qui dirige le Tchad d’une main de fer depuis plus de 30 ans.

Dans un tweet, Saleh Kebzabo raconte s’être rendu au domicile de Yaya Dillo et explique les raisons de son retrait : « Nous avons des dirigeants indignes du peuple tchadien dont ils ont confisqué la souveraineté ».

En conséquence, le parti de M. Kebzabo, l’Union nationale pour la démocratie et le renouveau (UNDR) « décide de se retirer purement et simplement du processus électoral pour ne pas avoir à servir de caution à la mascarade qui se prépare sur une grande échelle ».

M. Kebzabo, ancien journaliste, arrivé en troisième position à la présidentielle de 1996, s’était rallié au chef de l’Etat au second tour, avant d’entrer dans son gouvernement. Il y enchaînera les portefeuilles jusqu’à sa rupture avec le président en 1999, qu’il affrontera encore sans succès aux présidentielles de 2001, 2006 et 2016, où il était arrivé deuxième avec 12,8% des voix.

Ancien chef rebelle et membre de la même ethnie zaghawa que M. Déby, Yaya Dillo Djerou avait rallié en 2007 le président Déby, dont il est devenu ministre avant d’occuper plusieurs postes de conseiller à la présidence de la République. Il fut ensuite représentant du Tchad à la Commission des Etats de l’Afrique centrale (Cemac) jusqu’en 2020, avant de rejoindre l’opposition.

Ce 1er mars, quelques blindés, ainsi que des membres de la garde présidentielle et de la gendarmerie nationale étaient encore positionnés sur les axes menant au domicile de M. Dillo, a constaté un journaliste de l’AFP.

Mais la vie suit son cours dans le reste de la capitale tchadienne. Aucun dispositif particulier n’était visible autour de la présidence ou du ministère de la Défense. Le périmètre de sécurité imposé par les forces de l’ordre a été circonscrit au domicile de M. Dillo et les trois chars déployés dimanche s’étaient retirés ce lundi.

Toutefois, les opérateurs de téléphonie continuaient de tourner au ralenti et l’accès à Internet était encore fortement perturbé à N’Djamena.

Depuis plusieurs semaines, le gouvernement interdit systématiquement et réprime durement toute manifestation de l’opposition et de la société civile qui réclament « l’alternance et plus de justice sociale »Amnesty international a dénoncé des « restrictions non nécessaires et disproportionnées du droit à la liberté de réunion pacifique » et des « arrestations arbitraires ».

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, « regrette le recours à la violence » au Tchad à l’approche de l’élection présidentielle et réclame aux autorités « de favoriser un dialogue politique » pour un processus inclusif, a déclaré lundi son porte-parole, Stéphane Dujarric.

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