Nation : Les limites de l’Accord Politique de San’t Egidio selon Me Mboli – Goumba !

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Je ne sais pas pourquoi je pense à Munich, à l’entame de ce papier. Peut-être parce que, malgré eux, les « Romains » d’aujourd’hui sont un peu les « Munichois » d’hier. Je ne saurais dire qui est Daladier, qui est Chamberlain. Ce qui est certain, c’est qu’on avait fait un triomphe à ces derniers, dans leurs pays respectifs, pour avoir « sauvé la paix ». Seulement pour se rendre compte plus tard qu’il s’agissait d’une inutile capitulation. Et la seconde guerre mondiale eut quand-même lieu.
A la vérité, peu me chaut de savoir qui est Daladier et qui est Chamberlain. Je ne souhaite pas critiquer cet accord dit politique. Après tout, quelques hommes de bonne foi y ont participé. Les Centrafricains qui l’ont signé peuvent se consoler d’avoir été accompagnés par les Nations-Unies et le Gouvernement Italien.  Mais tout de même. Faire coexister dans un seul article le forum de Bangui (Impunité zéro), la Cour Pénale Spéciale (Justice pour les victimes) et le droit de grâce du Président de la République, c’est certainement un clin à la sagesse chinoise du Ying et du Yang, le bien et le mal dans un même saladier !

Je souhaite ici faire court et exposer les raisons objectives pour lesquelles Saint ’Egidio ne saurait tenir. Afin qu’on arrête de tourner en rond, comme si on ne connaissait pas le chemin de la paix.  En dressant le décor, je ferai un parallèle historique, pour qu’on se comprenne bien : l’Ukraine, la Syrie et la Gambie

En Ukraine, l’Occident avait décidé de pousser son avantage, après la victoire des pro-européens, en méconnaissance de l’histoire et de la géographie de ce pays. Résultat : annexion de la Crimée, les Républiques de l’Est aujourd’hui quasi indépendants. L’erreur ? Avoir pensé qu’on pouvait régler le problème ukrainien non seulement sans les Russes, pis, contre eux.

En Syrie, on voulait voir partir Bashar, l’allié des russes, le coreligionnaire des Iraniens, de Nasrallah, tous liés par leur appartenance au chiisme. Avec la bénédiction des pouvoirs sunnites, habitués à diriger presque partout au moyen orient, même quand ils sont minoritaires, comme à Bahreïn. Et qui ne pardonnent pas au père de Bashar venu de Lattaquié, cette partie montagneuse jadis peuplée de nécessiteux alaouites, chiites de confession, n’hésitant pas à vendre leurs filles aux notables sunnites pour survivre, d’avoir rompu l’ordre naturel des choses avec son coup d’Etat. Imagine-t-on la paix en Syrie sans l’implication des Russes et des Iraniens ?

Un dernier exemple, la Gambie. Aurait-on pu régler aussi rapidement le cas Jammeh sans l’implication du Sénégal ?

Par ce détour historique et politique, mon propos est de démontrer qu’aucun accord de paix ne peut être viable en Centrafrique sans la conjonction de quatre éléments.

Le premier élément, c’est l’implication du Tchad

De par l’histoire et la géographie, nous sommes liés avec ce pays. Le Tchad, c’est une armée de 80 000 éléments aguerris, bien équipés, qui vole même au secours du Nigéria, première économie d’Afrique pour combattre BOKO HARAM. Des éléments venus du Tchad ont déjà fait partir deux présidents Centrafricains. L’implication du Tchad et du Soudan permettrait de sécuriser nos frontières. Les relations internationales étant une question de rapport de force, plutôt que de faire des incantations, reconnaissons que nous ne pouvons faire la paix sans l’implication du Tchad. Ne serait-ce que par sa capacité de nuisance. Et notre incapacité à y faire face pour l’instant. Aux dires des spécialistes, la réforme de l’armée ne portera ses fruits qu’une décennie plus tard.

Le deuxième élément, c’est l’implication de tous les protagonistes

Comment a-t-on pu imaginer aboutir à un accord viable sans la participation directe de Bozizé, de Djotodia, de Nourrédine ADAM, sans préjuger de la justice ? C’est une erreur de vouloir traiter avec les seconds couteaux et une hypocrisie de s’étonner que le succès ne soit pas au rendez-vous

Le troisième élément, c’est l’implication de toutes les entités de la nation centrafricaine

C’est également une erreur de considérer que la crise centrafricaine est sécuritaire. C’est une crise politique qui a des relents notamment sécuritaires. Subséquemment, les acteurs politiques doivent être associés à toute tentative de règlement de la crise, sans oublier la société civile.

Le quatrième et dernier élément, c’est ce que doivent encourir les personnes coupables de violation d’un accord

Aucun accord politique ne peut tenir si ceux qui en sont les signataires ne risquent rien en le violant. Or justement, l’implication du Tchad permettrait de faire respecter tout accord, en appoint à la MINUSCA. Je sais que les acteurs militaires savent que le TCHAD est capable d’aller les chercher partout, en cas de non-respect de leurs engagements, à partir de cette légalité et de cette légitimité issues d’un accord.
Ce n’est que de cette manière que nous pouvons voir le bout du tunnel. Mais pour ça, nous Centrafricains pouvons prendre l’initiative.
Bangui, le 22 Juin 2017

MAITRE CREPIN MBOLI-GOUMBA

 

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