Le rapprochement entre les États-Unis et la Centrafrique est-il contrarié?

Ces dernières semaines, au moins huit ressortissants américains ont subi des tracasseries administratives à Bangui. Derniers en date, un journaliste et une autre personne ont été expulsés ce 30 novembre 2023, mis dans un vol pour Douala, au Cameroun, après huit jours de difficultés ponctués par une après-midi d’interrogatoire au commissariat de Port-Amont. Leurs passeports, téléphones et matériels, leur avaient été confisqués. Ces incidents surviennent alors que Washington tente depuis plusieurs mois d’obtenir que Bangui se sépare du groupe paramilitaire russe Wagner. Jusque-là sans résultat.

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Selon plusieurs observateurs, ces tracasseries sont à lire dans le contexte diplomatique entre les deux pays : en décembre 2022, lors du sommet États-Unis-Afrique, le Secrétaire d’État américain Antony Blinken aurait, selon plusieurs sources, demandé au président de la République centrafricaine (RCA) Faustin-Archange Touadéra de se dissocier du groupe Wagner, et proposé des alternatives dans le domaine de la sécurité.

Toutefois, et malgré la mort de l’ancien patron de Wagner Evgueni Prigojine fin août, les mercenaires russes poursuivent leurs opérations en Centrafrique, dans le champ sécuritaire, mais aussi dans le champ économique, via l’exploitation minière et forestière principalement.

Les États-Unis ont depuis envoyé des signaux contradictoires : très discrète au moment du référendum constitutionnel du 30 juillet, la diplomatie américaine a fini par partager fin août ses « réserves » sur la consultation. Et le 31 octobre, Bangui a été exclue du programme commercial Agoa, en raison de « violations flagrantes des droits humains » dans le pays, une sanction essentiellement symbolique.

Dans le même temps, fin septembre, une délégation de la compagnie américaine de sécurité privée Bancroft a été reçue à la présidence, ce qui a conduit par la suite les canaux de communication du groupe Wagner à évoquer la venue « en novembre » à Bangui « d’agents de la CIA », des affirmations partagées via les réseaux sociaux par des cadres du pouvoir centrafricain.

L’ambassadrice américaine à Bangui a régulièrement rencontré Faustin-Archange Touadéra. La dernière fois, le 6 novembre, pour un « échange sur le renforcement de la coopération bilatérale et l’importance du système démocratique », selon le communiqué officiel.

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C’est dans ce contexte qu’un journaliste indépendant, qui comptait travailler sur la gestion des « ressources naturelles » du pays pour le magazine Harper’s et un autre ressortissant américain, ont été raccompagnés ce jeudi à l’aéroport de Bangui par le consul des États-Unis.

Une troisième personne arrivée par le même vol le 22 novembre a pu, pour sa part, rester à Bangui. Elle aurait pu faire valoir sa double nationalité.

Un officiel du ministère de l’Intérieur a affirmé à RFI que le journaliste ne disposait pas d’une accréditation délivrée par le ministère de la Communication. Mais une autre source assure qu’il était parfaitement en règle.

Avant eux, selon des informations d’Africa Intelligence confirmées par RFI, trois humanitaires avaient été expulsés en octobre, et deux sous-traitants de la mission de l’ONU en RCA ont dû attendre plusieurs jours pour récupérer leurs passeports.

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