La justice française ordonne la remise à la CPI d’un patron du football centrafricain et ex-milicien

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Patrice-Edouard Ngaïssona est soupçonné d’avoir commis ou aidé à commettre des crimes de guerre et crimes contre l’humanité en République centrafricaine entre 2013 et 2014.

Patrouille des militaires français de l’opération « Sangaris » à Bangui, en septembre 2015.
Patrouille des militaires français de l’opération « Sangaris » à Bangui, en septembre 2015. EDOUARD DROPSY / AFP

Patrice-Edouard Ngaïssona, le chef d’une faction anti-balaka, milice à majorité chrétienne en Centrafrique, devrait bien faire l’objet de poursuites devant la Cour pénale internationale (CPI). La cour d’appel de Paris a donné, lundi 31 janvier, son feu vert à la remise à la CPI, basée à La Haye, de cette figure des autorités du football africain.

Visé par un mandat d’arrêt de la CPI, M. Ngaïssona, 51 ans, est soupçonné d’avoir commis ou aidé à commettre des crimes de guerre et crimes contre l’humanité dans l’ouest de la République centrafricaine entre septembre 2013 et décembre 2014.

Il avait été interpellé en France le 12 décembre et écroué dans la prison de Fleury-Mérogis (Essonne). Cette arrestation était intervenue quelques semaines seulement après la remise à la Cour d’un autre ex-chef de milice anti-balaka, Alfred Yekatom, parfois surnommé « Rambo ».

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« J’étais un porte-parole qui a amené la paix en Centrafrique et non un chef de guerre », avait déclaré, le 19 décembre, devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel M. Ngaïssona. Il avait affirmé, par ailleurs, qu’il n’était « pas au pays » au moment des faits qui lui sont reprochés.

Malgré un lourd passif dans son pays à la tête des milices anti-balaka, M. Ngaïssona, qui fut un éphémère ministre des sports en 2013, avait été élu en février 2018 au comité exécutif de la Confédération africaine de football (CAF). Il est aussi président de la Fédération centrafricaine de football.

Régulièrement cité

Son nom est régulièrement cité dans les rapports de l’ONU et dans les notes d’enquête de la justice centrafricaine comme l’un des chefs des milices anti-balaka qui ont semé la terreur dans le pays.

Créées en 2013 après la prise du pouvoir à Bangui par les rebelles de la coalition de la Séléka, ces milices peu structurées ont pris les armes en prétendant défendre les intérêts des chrétiens et en représailles aux exactions des groupes armés musulmans. A la chute du président Michel Djotodia, issu de la Séléka en 2014, les anti-balaka se sont lancés dans une chasse aux musulmans dans Bangui et ses environs, faisant des centaines de morts.

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Selon la CPI, il y a des « motifs raisonnables » de croire qu’une « attaque généralisée et systématique a été perpétrée par les anti-balaka contre la population civile musulmane et quiconque semblait soutenir la Séléka ».

Dans le viseur de la justice

Plusieurs fois déjà, M. Ngaïssona avait été dans le viseur de la justice : en 2014, une vaste opération de l’armée française pour l’appréhender dans son fief de Boy-Rabe, quartier du nord de Bangui, avait échoué. Il a bien été incarcéré au début des années 2000 pour enrichissement illicite, mais semblait passer entre les mailles de tous les filets depuis.

A Bangui, ses détracteurs avaient lié son inexorable ascension — jusqu’à se présenter à l’élection présidentielle de 2015 — à ses liens avec l’ancien président François Bozizé (2002-2013) et ses connexions présumées avec l’actuel président Faustin-Archange Touadéra.

Sa candidature à la présidentielle a néanmoins été rejetée, ce qui provoqua barricades et échauffourées dans des quartiers de la capitale centrafricaine.

Le Monde

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