Inondations dans la ville de Bangui : un spectacle folklorique de Sarandji dans les zones sinistrées

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Il a fallu seulement de plus de quatre (4) heures de temps d’une pluie diluvienne qui s’est abattue sur la capitale Bangui, pour que le premier ministre Sarandji et ses ministres pussent se rendre compte effectivement de leur incapacité à gouverner, de leur incompétence notoire à trouver des solutions aux besoins prioritaires du peuple centrafricain et de leurs électeurs, et de leur totale démission de leurs responsabilités devant l’histoire et la nation tout entière.

Une pluie qui a causé d’énormes dégâts dans les quartiers les plus populeux, avec des écroulements d’habitations, des biens emportés, des disparus, des morts d’hommes et des sans – abris comme toujours, et dont le bilan n’est pas encore connu au moment où les lignes de cet article sont en train d’être tracées. Un véritable déluge et une hécatombe qui ont convaincu le maître de conférences en géographie, son ministre de la communication et chargé des médias en l’occurrence M. Ange Maxime Kazagui et certains cadres du ministère de l’administration du territoire et de la sécurité publique, de l’impérieuse urgente nécessité d’effectuer une descente sur le terrain et sillonner les zones sinistrées. Afin de s’enquérir de la situation et prendre des dispositions qui s’imposent, dira plus tard le chef de mission.

Mais, de quelles dispositions parle – t – il ? Celle de venir en aide aux nombreuses familles éplorées et sinistrées ? Comment ? En essayant de les loger ailleurs ? Mais où, en ce moment de rentrée scolaire ? En tentant de leur fournir de matériels domestiques, à savoir des bâches, des couvertures et quelques ustensiles de cuisine ? Sur quelles lignes de crédits et logées dans quel chapitre de la loi de finances rectificative de l’exercice en cours ? Sarandji et son gouvernement vont – ils une fois de plus tendre la main des mendiants à la France et à la communauté internationale ?

Telles sont de pertinentes questions que se posent tout observateur averti de la vie politique centrafricaine et certains professionnels des médias dont les vibrations intuitives ne sont pas encore corrompues. Y trouver des réponses adéquates et convaincantes, c’est poser sur la table la problématique de la mal – gouvernance avérée qui caractérise la gestion des affaires de la cité par le premier ministre Sarandji et son très cher cadet Touadéra. Or, « Gouverner, c’est prévoir ; ne rien prévoir, c’est ne pas gouverner », dixit Emile de Girardin dans les pensées et maximes (1867). Que signifie alors gouverner ?

Comme nous y invite l’étymologie latine de ce mot qui vient du verbe « gubernare », le gouvernement d’une cité ou d’une nation est comparable à celui d’un navire par son capitaine. A ce niveau du débat, deux remarques s’imposent tout de suite. « Gouverner » ne peut signifier imposer autoritairement telle ou telle directive à un corps soumis (peuple ou navire) : tout au contraire, le capitaine doit prendre appui sur des forces existantes – les membres de son équipage – éventuellement antagonistes, pour leur imprimer unité et stabilité. La deuxième remarque concerne le jugement de valeur implicite d’une telle définition : on ne gouverne vraiment que si l’on gouverne… bien.

Mais que signifie « bien gouverner » ? Cette seconde question enveloppe une nouvelle difficulté : si le capitaine conduit le navire à bon port, qu’en est-il du bon chef d’Etat, du bon gouvernement ? Où doit-il conduire le navire ? Et qui décide de l’orientation correcte à donner à l’équipage ? On observe peut-être ici les limites de l’analogie. Car si les Princes, les grands hommes, doivent anticiper (« prévoir ») c’est-à-dire prendre les bonnes décisions en fonction de ce qu’ils entrevoient de l’avenir, ils ne peuvent, en conséquence, s’en remettre à chaque instant aux suffrages de la nation. « Prévoir » implique le jugement, et celui-ci doit être clairvoyant, voire extralucide. Or, si l’on en croit Hegel, « seul l’individu pense ». C’est donc toute la question de la bonne gestion des démocraties qui est ici à prendre en considération.

Le propre de l’homme est donc l’aptitude à la réflexion. C’est la raison pour laquelle il est doué de langage : « Il est évident que l’homme est un animal politique plus que n’importe quelle abeille et que n’importe quel animal grégaire. Car, comme nous le disons, la nature ne fait rien en vain ; or seul parmi les animaux l’homme a un langage ». Le langage permet à l’homme de « penser », de former un projet moral, et de se projeter dans l’avenir : « Le langage existe en vue de manifester l’avantageux et le nuisible, et par suite aussi le juste et l’injuste. Il n’y a en effet qu’une chose qui soit propre aux hommes par rapport aux autres animaux : le fait que seuls ils aient la perception du bien, du mal, du juste, de l’injuste et des autres notions de ce genre. Or avoir de telles notions en commun c’est ce qui fait une famille et une cité. », dixit Aristote, dans Les Politiques vers 325-323 avant Jésus – Christ.

Le gouvernement des hommes par les hommes repose donc sur un rapport au temps qui inclut la mémoire (éviter dans la mesure du possible, les erreurs, les fautes et les tragédies passées) et l’anticipation. Pour y parvenir et concrétiser ses rêves, l’homme doit organiser la société en vue de vivre en sécurité et en paix

C’est pourquoi il ne peut s’en remettre ni à la nature, à la « fortune » ni à la bienveillance d’un dirigeant, même apparemment bien intentionné. Car si « l’homme a besoin d’un maître » (Kant), il ne peut « trouver ce maître au sein de l’espèce humaine ». Car « tout homme est un homme qui a besoin d’un maître » (Kant, Idée universelle d’un point de vue cosmopolitique, 6e proposition). Il doit donc mettre en place une organisation sociale qui le prémunisse contre la violence de la nature et aussi contre la violence potentielle des autres hommes. En théorie (sinon dans les faits) c’est pour ce motif que les hommes sont passés de l’état de nature à l’état social (thèse de Hobbes et de Rousseau).

Et pour finir, les hommes se donnent des gouvernements pour éviter le pire (le chaos). Et c’est ici que la notion de la gouvernance dans toute société démocratique comme la nôtre a toute son importance. Cette lourde responsabilité a été confiée au premier ministre Sarandji par le président Touadéra. Mais, sait – il au moins ce que renferme ce mot ? A vrai dire et c’est une très triste vérité, ce maître de conférences ignore tout de ce que c’est que gouverner et de ce que c’est que prévoir. Car, s’il l’avait su, c’est – à – dire s’il savait faire de la prospective, anticiper autant qu’il en est capable les évènements, il aurait dû éviter ces inondations avec leurs dramatiques conséquences ci- dessus décrites, comme le fait un capitaine sur son navire en vérifiant que sa route passe au large de tous les écueils connus.

Il reste les écueils inconnus et imprévisibles. Mais le sont-ils vraiment tous, imprévisibles ? On peut bien entendu imaginer des impondérables, car au-delà des écueils il y a les avaries et les tempêtes, des phénomènes ou évènements qui peuvent se transposer dans la société. Mais ne se jette-t-on pas un peu stupidement sur des écueils prévisibles du fait que tous les écueils du monde marin se retrouvent dans des conditions similaires, sur des hauts fonds et à proximité des côtes ? Est-il légitime de se jeter dans des proximités inconnues alors qu’on peut deviner qu’elles recèlent de tels dangers ?

En politique, en gouvernance non pas des peuples seulement, mais des sociétés humaines, on retrouve ces difficultés ou catastrophes prévisibles et malgré tout négligées par des gouvernants incapables, incompétents et imprévoyants comme Sarandji et son équipe. Nous avons nos « cartes marines » de la marche des peuples comme les marins ont celles des mers et océans, et comme eux parce que d’autres avant nous ont pris ces routes. En gouvernance ça s’appelle l’histoire, ou plutôt l’Histoire. Décriée; méprisée, elle devrait pourtant être la bible de tout politique qui se veut efficace et respectable.

Et ce ne sont pas que des individus qui ont vécu ces expériences qui doivent nous guider afin que certains sacrifices n’aient pas été vains et qu’il faille les répéter, des peuples entiers, des civilisations ont disparus parce qu’ils n’avaient pas su, voulu ou pu prévoir les conséquences de leurs actions. Nous n’avons pas, nous, les mêmes excuses, puisque ces peuples ou ces civilisations se sont fait absorber, digérer et déféquer en nous laissant la trace de leurs aventures.

« Gouverner c’est prévoir » pensaient sans doute ceux qui construisaient les villages sur des hauteurs, les entouraient de remparts et creusaient des fossés autour. Vauban ne pensait sans doute pas autrement. Mais c’est un peu court de ne penser qu’à protéger son pré carré sans se projeter plus loin dans l’avenir. Il n’y a pas que les bandes de pillards à tenir au bout de l’épée, même dans la société primitive, il faut penser à alimenter en eau pure les villes, et l’urbe romaine avait justifié la réalisation d’aqueducs qui étaient des merveilles et justifient ce qu’on appelle depuis « un travail de Romain » dont les sociétés héritières de Rome auraient été bien incapables. Il faut aussi débarrasser la ville de ses propres déchets, et les Romains avaient à Rome la cloaca maxima, le grand égout, que plus tard on négligea pour laisser les ordures et les « eaux grasses » (la merde et les déchets) au milieu des routes et chemins creux, d’où l’expression « tenir le haut du pavé, » concernant ceux que leur « rang » autorisait à bousculer les pauvres dans la merde.

Est-ce que le géographe Sarandji  savait toutes ces vérités que l’histoire des hommes a léguées à la postérité ? Il ne le savait pas parce qu’il n’avait aucune vision politique pour ce pays, aucun programme et aucun projet de société. Il s’est autoproclamé politique après avoir vu à l’œuvre Bozizé et son neveu. Il s’est alors dit qu’il pouvait avec son cher cadet faire comme eux. Il y est arrivé en un temps record en mettant la main sur toutes les maigres ressources de la République au détriment du peuple et de ses besoins prioritaires que sont l’éducation, la santé, les routes, l’assainissement, les voiries urbaines, etc.

Fort de tout ce qui précède, il ne peut rien faire pour soulager les souffrances des victimes de ces inondations. Sa sortie du 23 septembre 2018, de ce fait, n’est pour l’opinion qu’un spectacle folklorique.

Jean – Paul Naïba

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