FAUSTIN TOUADERA : le troisième mandat, envers et contre tout

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FAUSTIN TOUADERA : le troisième mandat, envers et contre tout

Il fallait être naïf pour croire que le président Faustin-Archange Touadera et ses partisans s’en tiendraient à la décision de la Cour constitutionnelle du 23 septembre dernier. Au contraire, désireux d’obtenir par tous les moyens son troisième mandat, le président centrafricain s’emploie désormais à faire payer à Danièle Darlan, la présidente de l’instance constitutionnelle, le courage dont elle a fait montre en invalidant les décrets de création d’un comité de rédaction d’une nouvelle constitution. Sur le fond, la cour a également signifié qu’il était inadmissible que le président revienne sur le serment en vertu duquel il s’est engagé à ne réviser ni la durée, ni le nombre de ses mandats. Au lieu de célébrer Danièle Darlan pour cette posture de principe que l’on attend de toutes nos institutions, Faustin Archange Touadera ne trouve pas mieux que de monter ses lieutenants contre la présidente de la Cour constitutionnelle.

‘’Le pouvoir rend aveugle’’, entend-on souvent. Il faut croire que cette expression n’est pas qu’une caricature inventée. Autrement, comment en effet expliquer qu’avec tout le débat que la question du troisième mandat soulève aujourd’hui sur le continent africain, on ait encore des dirigeants qui se laissent tenter par ce danger. Serait-ce que le président centrafricain ne sait pas que la chute d’Alpha Condé tire son origine de ce fameux troisième mandat ? Ignorerait-il les risques de déstabilisation auxquels Alassane Ouattara a exposé son pays en s’accrochant au pouvoir par le biais du même troisième mandat ? En tout cas, le président Touadera ne veut rien entendre. Il veut de son troisième mandat et fera en sorte de l’avoir. En cela, le verdict de la Cour constitutionnelle du 23 septembre n’a fait que retarder l’inéluctable. D’ailleurs, le président et ceux qui le soutiennent pourraient faire de Danièle Darlan, l’exemple dont il ne faut surtout pas s’inspirer. Ne réussissant pas à la faire plier, ils veulent la démettre en sortant tout opportunément de leur chapeau cette histoire de retraite. Mais personne n’est dupe. La faute de Danièle Darlan, ce n’est nullement son âge. C’est son attachement aux principes et le désir d’édifier des institutions qui surpassent les hommes, le président y compris. Malheureusement, dans beaucoup de nos pays, nourrir une telle ambition, cela relève d’un crime.

Et justement, nos problèmes en Afrique, ils se trouvent incarnés dans ce qui se joue ainsi en Centrafrique. Ils ne sont ni la France, ni la Russie. Le premier obstacle à l’essor du continent réside dans cette tendance que nous avons de nous soustraire aux règles que nous avons librement décidé de nous fixer. Et dans le cas de la République centrafricaine, l’autisme du président Touadera est d’autant plus dommageable que le pays traine une histoire politique tourmentée, avec des épisodes marqués par des dictatures féroces et des guerres civiles atroces. Préoccupé par la conservation de son pouvoir qu’il réduit à sa dimension jouissive, le chef de l’Etat ne réalise pas tous les défis de développement auxquels la Centrafrique fait face. Tant pis si de nombreux enfants centrafricains sont privés de scolarisation, de nombreuses femmes exposées à des risques réels de décès lors des accouchements ou des localités entières du pays, coupées les unes des autres, du fait de l’inexistence d’un réseau routier digne de nom. Ce ne sont pas ces thématiques essentielles qui accaparent l’attention du numéro un du pays. Réélu en 2020 en principe au compte de son second et dernier mandat, il est parti pour sacrifier ce dernier sur l’autel de ses ambitions personnelles au détriment des chantiers de développement du pays.

Curieusement, là on entend aucun panafricaniste pour lui dire stop pendant qu’il est encore temps. Or, c’est avant tout avec nos dirigeants que nous devrions être exigeants, avant d’exiger des autres quoi que ce soit.

Boubacar Sanso BARRY

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