En Centrafrique, l’arrestation du député Dominique Yandocka crée un tollé

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POLITIQUE
CENTRAFRIQUE

En Centrafrique, l’arrestation du député Dominique Yandocka crée un tollé

Le député d’opposition est détenu depuis le 15 décembre, il est accusé d’avoir voulu planifier un coup d’État. Les adversaires du président Faustin-Archange Touadéra crient au scandale et dénoncent une monarchisation du pays.

Jeune Afrique

Publié le 21 décembre 2023

Il était à peine rentré de France, où il se trouvait depuis le mois d’avril, lorsque, ce 15 décembre, Dominique Yandocka a été interpellé à son domicile de Bangui. D’après un membre de sa famille, c’est très tôt, vers 4 heures du matin, que des gendarmes « lourdement armés » ont débarqué chez le député. Il a ensuite été emmené à la Section des recherches et d’investigations (SRI), où il se trouve toujours.

Coup d’État

Son parti, le mouvement Initiative pour la transformation par l’action (ITA), a été le premier à réagir par communiqué, dénonçant la violation de l’immunité parlementaire de Dominique Yandocka. S’en suivront plusieurs autres réactions, tant de l’opposition que de la société civile.

La polémique était lancée. « Un député qui est arrêté à 4 heures du matin par une unité militaire qui ne relève pas de la police judiciaire et qui est emmené pour être entendu, ça s’appelle de l’enlèvement. Ce qu’il vit, c’est une séquestration », s’est ainsi insurgé Martin Ziguélé, qui réclame une remise en liberté.

« Nous ne pouvons pas dire que nous sommes en train de construire un État de droit et à la fois violer allègrement la loi. S’il y a quelque chose qui lui est reproché, que la justice le lui fasse savoir », a ajouté le président du Mouvement de libération du peuple centrafricain.

Sous pression et face aux nombreuses critiques, le parquet de Bangui a répondu via un communiqué, dont Jeune Afrique a obtenu copie. « Monsieur Dominique Yandocka s’était entretenu avec un groupe de personnes bien identifiées dans l’optique de mobiliser de l’argent pour acheter des équipements militaires en vue de renverser l’ordre constitutionnel par un coup d’État », explique-t-il.

Flagrant délit

Le parquet, qui s’est appuyé sur la nouvelle Constitution approuvée par référendum le 30 août 2023, justifie même le non-respect de l’immunité parlementaire du député par le fait que, en cas de « flagrant délit, après la commission des faits délictueux ou criminels, un parlementaire peut être poursuivi ou arrêté sans l’autorisation du bureau de l’Assemblée nationale ».

Dans une déclaration aux médias, le procureur près le tribunal de grande instance de Bangui, Narcisse Foukpio, a indiqué que la procédure n’en était qu’au niveau des investigations préliminaires. « Laissons le temps à la police judiciaire de continuer ses enquêtes et à la fin, nous en saurons davantage, prévient-il. Aucun de ses droits n’a été violé. »

Le magistrat poursuit : « Nous sommes en train de faire un travail technique qui obéit à la loi. Nous sommes des serviteurs de la loi. Les autres considérations ne rentrent pas dans le cadre du travail que nous faisons. Nous menons nos investigations sur des faits que nous avons constatés. Les éléments sont là. Le moment venu, tous ces éléments vont sortir dans le rapport qui sera présenté à l’issue des investigations en cours. »

Manipulation politique

Les explications du parquet n’ont cependant pas convaincu une bonne partie de la classe politique. Plusieurs voix ont dénoncé une « manipulation politique du dossier ». Un opposant centrafricain qui a requis l’anonymat estime même que « le pouvoir veut frapper fort sur Yandocka pour terroriser les autres voix discordantes à la politique de Touadéra ».

Pour sa part, Crépin Mboli-Goumba, coordonnateur de la plateforme de l’opposition, le Bloc républicain pour la défense de la constitution (BRDC), qualifie cette arrestation d’« arbitraire, politiquement motivée, inadmissible et révélatrice de la volonté de Touadéra de “monarchiser” la Centrafrique ». Les opposants membres du BRDC ont entrepris d’accentuer la pression à travers ses nombreuses déclarations.

Selon nos informations, ils ont également pris contact avec des diplomates étrangers à Bangui et des responsables d’institutions internationales afin que ceux-ci les aident à obtenir la libération du député Yandocka.

 

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