Dialogue Politique Inclusif : et Touadéra tente de rouler tout le monde dans la farine

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Des sources constantes et concordantes rapportent que depuis deux jours se tient à Khartoum une rencontre entre les groupes armés et la Russie pour la paix et la sécurité. A l’initiative de Valery Zakharov, conseiller personnel du président Touadéra en matière de sécurité, sont invités à y prendre part pendant trois (3) jours dans la capitale soudanaise tous les principaux chefs politico – militaires, à savoir  les antibalaka de l’aile Mokom, Nourreidine Adam du FPRC, Mahamat Al-Katim du MPC, Ali Darass de l’UPC et autres. Au même moment, l’Union Africaine qui est chargée d’organiser la tenue du prochain dialogue politique inclusif, engage des discussions avec ces mêmes groupes armés à Bouar depuis le 27 Août 2018. Quelle cacophonie autour de ce dialogue politique à venir, doit – on s’interroger ?

En réalité, ce spectacle apparemment folklorique honteux  de fuite en avant  qui se déroule sous nos yeux n’est que l’expression visible et lisible de la politique de fourberie, de roublardise, de sournoiserie et de non-respect de la parole donnée qui caractérise la gestion des affaires de la cité depuis le 30 mars 2016 par le président Touadéra et le gouvernement de son cher aîné Sarandji. Si pour la majorité des centrafricains, il traduit l’amateurisme avéré de l’homme à qui le peuple centrafricain a décidé dans les urnes de confier l’administration de sa destinée, la minorité dont les vibrations intuitives ne sont pas encore atteintes par la pandémie du triomphalisme ambiant y voit quant à elle plutôt un acte politique bien mûri et très bien réfléchi.

Pour bien percevoir et tenter de comprendre la vision de Touadéra et de son cher aîné Sarandji dans la gestion du dialogue politique inclusif, il faut seulement rappeler, à propos de Hollande, la formule du père Queuille, pour qui : « Il n’est aucun problème assez urgent en politique qu’une absence de décision ne puisse résoudre… ». Elle s’accompagne d’ailleurs d’une autre, moins connue mais beaucoup plus terrible encore : « La politique n’est pas l’art de résoudre les problèmes mais de faire taire ceux qui les posent. » C’est la stratégie du lent pourrissement, fondée sur l’idée que la plupart des difficultés de la vie politique sont artificielles et voulues par des gens qui finiront peu à peu par se lasser si on ne leur prête pas attention.

Ayant choisi d’être indéchiffrable pour éviter de trop prêter le flanc aux critiques, tout comme Hollande, Touadéra, sous l’impulsion de son cher âiné Sarandji, a décidé dès le début de son mandat d’avancer masqué, insistant haut et fort sur des détails tout en faisant discrètement adopter des mesures plus significatives mais qu’il valait mieux ne pas médiatiser car elles seraient impopulaires. Sa méthode, si l’on peut employer ce terme, consiste souvent à faire deux choses contradictoires au même moment, pour désorienter ses adversaires.

Par exemple, dès le début de son mandat et dans sa toute première déclaration « urbi ac orbi » au stade 20.000 places le 30 mars 2016, il annonce que la gestion de son pouvoir sera placé sous le soleil de la rupture et fait dans ses faits et gestes quotidiens encore et toujours comme le monde d’hier, prône à cor et à cri le rassemblement et pousse ses alliés politiques du fait de son esprit inouï de roublardise à quitter la majorité présidentielle, chante à longueur de journée l’apologie de la transparence et de la bonne gouvernance et brille par la mal – gouvernance et l’institutionnalisation des pratiques de prédations éhontées des maigres ressources de l’Etat, etc.

C’est en regardant dans le détail, en comparant, en soupesant, en examinant, en rapprochant les dates des déclarations que la vérité sur l’Enfumeur qui est Touadéra apparaît. Il faut faire des efforts et les médias ne raffolent pas toujours de cet exercice un peu austère mais que nous ferons bien volontiers pour éclairer la lanterne de nos lecteurs.

Tout comme François Hollande, Touadéra est l’incarnation de ce que l’on pourrait appeler la « Centrafrique des petits malins », où la valeur suprême en politique est la roublardise. Mais la gravité des difficultés auxquelles est confronté notre pays nécessite plus que de la duplicité pour qu’on puisse un jour s’en sortir. Son choix de la dissimulation a fait que, durant les six premiers mois qu’il a passés au Palais de la Renaissance, on pouvait presque dire que Touadéra allait à contre-courant de l’évolution de la communication politique à la mode.

Et plus de deux années au pouvoir, dans le cas du dialogue politique inclusif dont il était et demeure le demandeur mais dont il n’en veut plus de peur d’être à l’issue totalement dépouillé de son pouvoir et de s’être obligé de se séparer de son cher âiné Sarandji, et ce, au grand étonnement du peuple centrafricain qui n’a jamais voulu en entendre parler et qui l’a dit ouvertement lors des travaux du Forum de Bangui, il a décidé de choisir la demi-teinte, l’ambiguïté, l’effacement, pour éviter de se retrouver en première ligne de l’impopularité. C’est fort de cette politique d’ambiguïté, d’esquive et de duplicité qu’il a donné son accord pour la tenue de ces discussions avec les groupes armés, en même temps, à Khartoum et à Bouar. Pour tenter de prendre tout le monde de vitesse, de gagner du temps et de tromper ses adversaires. Alors,  dialogue politique inclusif ou foire aux malins qui continue, est – on tenté de le dire.

Comme nous pouvons le constater le plus aisément, dès le commencement de sa gouvernance, Touadéra décide le matin, se déjuge à midi et se contredit le soir. Ainsi donc, face à l’intrépidité nourrie d’égocentrisme des groupes armés, d’un côté, et aux pressions de toutes les forces vives de la nation, d’autre part, le mathématicien de Boy – Rabé, déséquilibré et dérouté, préfère recourir  encore et toujours, à des vieilles méthodes de tricherie et de roublardise qui ont fait recette ailleurs. Le résultat sera-t-il différent cette fois-ci dans le contexte actuel ?  ‘’Il vaut mieux avoir une méthode mauvaise plutôt que de n’en avoir aucune’’, disait le Général De Gaule.

Ici celle de Touadéra et de son gouvernement face aux crises est connue depuis assez longtemps.  D’abord, que ce soit face à des revendications politiques ou d’ordre social, elle commence toujours par la dénégation et la victimisation. Ainsi les contestataires sont présentés comme ceux qui veulent rompre les équilibres, et exigent beaucoup trop quand tout le monde fait des sacrifices. Souvent on n’oublie que les seuls qui ne serrent pas la ceinture sont nichés au gouvernement et dans d’autres postes juteux de l’administration publique. Et ce sont précisément eux qui tentent de convaincre le président qu’il n’y a pas lieu de s’alarmer, que tout est sous contrôle.

Ensuite viennent les négociations. Elles ont lieu souvent tard, quand des victimes innocentes commencent à joncher les rues et des images macabres circuler dans quelques médias internationaux. Alors les pourparlers ont lieu, souvent pour la forme ; puisque les vrais accords sont obtenus contre des promesses de postes juteux quand ce n’est pas tout simplement contre espèces sonnantes et trébuchantes. Les entremetteurs sont presque toujours les mêmes : de richissimes hommes d’affaires proches du Palais, et quelques coursiers-lobbyistes qui ne sont jamais loin. C’est à ce stade que les institutions républicaines et les religieux sont sollicités. Les accords obtenus alors ne semblent satisfaire que les seuls négociateurs, et rarement la grande masse.

Enfin, les hostilités redémarrent de fort belle manière et un autre appel à la manifestation ou à la grève est lancé. Pour cause, la partie gouvernementale n’a pas tenu ses engagements et argue comme toujours des difficultés conjoncturelles. La masse y adhère, faute de mieux. Elle pardonne encore une fois la traitrise de ses représentants, qui auront réussi une fois de plus de nouveaux griefs contre le gouvernement. Et on entre dans un autre cycle de crises et de négociations.

Qu’on se le dise, les grèves et autres crises politiques, telle que la crise sécuritaire qui perdure depuis plus de 5 années, profitent à un beau monde dans ce pays, mais pas à la population. Ce sont des périodes où un business sordide et immoral rapporte gros à une petite catégorie de combinards dispatchés dans les deux camps. Mais la donne a changé en ce qui concerne la tenue de cet énième dialogue politique et Touadéra devrait s’en apercevoir , se réveiller de sa longue nuit de sommeil et s’engager à jouer franc jeu avec tout le monde avant que le vase ne déborde et qu’il ne soit vraiment trop tard.

Car, en rentrant la tête baissée dans cette danse où devront se jouer l’avenir de la République centrafricaine et le destin de tout un peuple, les forces vives de la nation, à savoir les partis politiques, la société civile et la communauté internationale veulent en finir avec le cycle des malheurs, des larmes et des deuils et pour ce faire tiennent résolument, non pas à un dialogue entre gouvernement et groupes armés pour un partage de gâteau et le retour des bourreaux aux affaires, mais pour un dialogue politique inclusif entre tous les fils et les filles de ce pays et en terre centrafricaine.

Ce message doit sonner comme un avertissement dans les oreilles de Touadéra et de son cher aîné Sarandji et de leurs thuriféraires qui appartiennent à la « Centrafrique des petits malins » et qui ne veulent pas entendre parler de la tenue de ce dialogue et qui usent de toutes les manœuvres politico – politiciennes pour le reporter sine die .

Bien malin qui saura le dire.

Jean – Paul Naïba

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