Coups d’Etat : ces pays africains où la contestation populaire a inspiré l’armée

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Coups d’Etat : ces pays africains où la contestation populaire a inspiré l’armée

Les contestations populaires ont permis, ces dernières années, d’obtenir le déguerpissement de Présidents parmi lesquels certains étaient apparemment inamovibles et leur départ ne semblait pas si proche. Très souvent, l’armée entre en scène pour parachever ce que les populations ont commencé. Revenons sur les cas les plus marquants de ces dernières années.

Le mode opératoire est, à quelques exceptions près, généralement le même : les populations revendiquent le départ du Président pendant quelques mois par d’importantes manifestations. L’armée tente, dans un premier temps, de réprimer les manifestants. Ces derniers ne se replient pas, au contraire, durcissent le ton. Débordée par la ténacité des manifestants, l’armée reprend les choses en main, se met du côté du peuple et évince le dirigeant vomi.

Au Zimbabwe, le vieux Bob est mis de côté

Le premier exemple de pays sur notre liste est le Zimbabwe où le vieux Président Robert Mugabe a été contraint à la démission, en novembre 2017, après une année entière de manifestations populaires. Au pouvoir depuis l’indépendance du pays, en 1980, d’abord en tant que Premier ministre, puis président de le République en remplacement de Canaan Banana, à partir de 1987, Robert Mugabe va régner sans partage, sur le Zimbabwe. Pourtant, le pays a été relativement prospère au départ, au point d’être désigné comme le « joyau de l’Afrique ».

Robert Mugabe

Au fil des ans, le Zimbabwe a commencé à sombrer dans une grave crise économique depuis le début des années 2000. L’inflation a atteint un niveau inimaginable, la monnaie nationale est totalement dépréciée. D’où la contestation du régime qui a atteint son paroxysme au cours de l’année 2017 où Robert Mugabe a clairement manifesté son désir de passer la main à son épouse, Grace Mugabe, une femme connue pour son goût prononcé du luxe et sa brutalité, et qui a très mauvaise presse dans le pays y compris dans l’entourage immédiat de son président de mari.

Le 15 novembre 2017, le Président, qui était décrié dans tout le pays, est renversé par un coup d’Etat et placé en résidence surveillée. Il tente de résister, mais est finalement contraint de déposer sa démission, le 21 novembre. Son Vice-président, Emmerson Mnangagwa, qu’il avait évincé quelques semaines plus tôt (le 6 novembre), lui succède et remporte l’élection présidentielle de 2018.

En Algérie, le cinquième mandat est refusé à Abdelaziz Bouteflika

En Algérie, Abdelaziz Bouteflika, élu en avril 1999, ambitionne, après vingt années passées à la tête de l’Algérie, de briguer un cinquième mandat consécutif en 2019. C’était le mandat de trop pour un Président fragilisé par un grave accident vasculaire cérébral, dont il a été victime en 2013. A la suite de l’annonce de sa candidature, en février 2019, de géantes manifestations de protestation embrasent le pays et s’étendent même aux Algériens de la diaspora : c’est le Hirak.

L’ex-Président algérien, Abdelaziz Bouteflika

Face à la persistance des manifestations, le Président renonce à se présenter pour la cinquième fois, mais pense à proroger son mandat au-delà de son terme constitutionnel, le 27 avril. Nouveau refus des manifestants qui n’ont pour leitmotiv que le départ du pouvoir du vieil homme de 82 ans. Finalement, sous la pression de l’armée, il rend sa démission le 2 avril 2019, avant même la fin du mandat.

Au Soudan, le général Omar el-Béchir est évincé

Au Soudan, quatre mois de manifestations populaires soutenues ont conduit les militaires à renverser, le 11 avril 2019, leur frère d’armes, le général Omar el-Béchir qui régnait sans partage sur le pays, depuis 30 ans. En effet, le 30 juin 1989, le colonel Omar el-Béchir organise un coup d’Etat contre le régime du Premier ministre Sadeq al-Mahdi et s’installe au pouvoir. Depuis lors, il était continuellement réélu, avec des scores quasi staliniens.

L’application, en 2018, d’un plan d’austérité du Fonds monétaire international (FMI) entraîna le doublement du prix du pain et l’augmentation de 30% de celui de l’essence. L’inflation atteint 40% et la monnaie soudanaise connaît une forte dépréciation face au dollar. C’était plus que les Soudanais ne pouvaient supporter. Conséquence : des manifestations sont organisées dans le pays par les étudiants et le Parti communiste soudanais, pour contester cette politique. Omar el-Béchir pend la voie de la fermeté et fait arrêter trois dirigeants du Parti communiste dont le Secrétaire général, et ordonne la fermeture de six organes de presse.

Omar el-Béchir

Dans la foulée, le 10 août 2018, la candidature du Président à un sixième mandat est annoncée. A partir de décembre 2018, les manifestations reprennent de plus belle; les populations descendent dans les rues pour exiger l’amélioration de leurs conditions de vie. Une fois de plus, la répression s’abat sur les manifestants qui durcissent le ton et réclament alors la démission du Président. Les mouvements durent plus de quatre mois et au terme de six jours de rassemblement devant la résidence présidentielle, l’armée intervient, le 11 avril 2019, destitue Omar el-Béchir, l’oblige à démissionner et le met aux arrêts.

Au Mali, Ibrahim Boubacar Keïta largement contesté est contraint à la démission

Le dernier chef d’Etat contesté par le peuple et finalement déposé par l’armée est le Malien Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) dont l’actualité, toute fraîche, continue de défrayer la chronique. Les résultats des Législatives, organisées en mars et avril derniers, ont débouché sur la contestation du Président IBK lui-même réélu pour un deuxième mandat, en 2018. Les manifestations dont le leader moral était l’imam Mahmoud Dicko, prirent une autre allure début juin avec la naissance du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) qui ne demandait que la démission du chef de l’Etat.

Le désormais ex-Président du Mali, Ibrahim Boubacar Kéïta

Les journées des 10, 11 et 12 juillet 2020 ont connu une flambée de la violence avec au moins 11 morts enregistrés. Les gestes d’apaisement effectués, par la suite, par le Président IBK qui a procédé, le 10 août, à l’installation d’une nouvelle Cour constitutionnelle, n’ont pas satisfait les manifestants qui sont encore descendus dans les rues de Bamako, le lendemain, 11 août. Une semaine plus tard, jour pour jour, l’armée entre en lice. On entend des tirs au au petit matin du mardi 18 août au camp de Kati, à 15 km de Bamako. Le même jour, le Président IBK est mis aux arrêts, conduit à Kati d’où il annonce sa démission à la Télévision, vers minuit. L’armée venait de concrétiser le vœu d’une bonne partie de la population malienne, déclenchant la joie de ladite population qui a vu en ces militaires des héros à porter au pinacle.

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