Centrafrique : une « surtaxe » russe sur les biens importés ?

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Plusieurs commerçants centrafricains se plaignent de devoir payer des taxes douanières plus élevées qu’avant, au risque de devoir fermer boutique. En cause, l’assistance technique venue de Russie ? Des « experts » russes envoyés aux côtés des douaniers centrafricains dans le cadre d’un accord, sont impliqués depuis quelques mois, dans les opérations douanières en Centrafrique. Cette implication est aujourd’hui très mal perçue par les commerçants qui se plaignent de surtaxes douanières.

Les commerçants rendent par ailleurs les Russes responsables des hausses de prix des produits importés. « Quand les douaniers valident notre dossier et nous libèrent, les Russes qui font le dernier contrôle, ne nous libèrent pas et estiment que nous n’avons pas assez payé pour les marchandises déclarées », déclare à Jeune Afrique un commerçant centrafricain. Accord Russie-Centrafrique Le 7 mai, un accord a été signé entre une mission économique russe et le ministère centrafricain des Finances. « L’accord prévoit une assistance technique des experts russes aux douaniers centrafricains de la frontière camerounaise à Bangui mais les Russes sont sortis du cadre de l’accord. Ils s’impliquent aujourd’hui dans les opérations de dédouanement », critique à Jeune Afrique un cadre de la douane centrafricaine qui requiert l’anonymat. Il est à noter qu’au plus fort de la crise sécuritaire qui secoue le pays – il y a deux ans- , la douane centrafricaine avait été durement affecté par la percée des forces rebelles, qui l’empêchaient de percevoir plus de la moitié des recettes dues.

Si le cadre contacté par Jeune Afrique reconnaît l’apport positif de cette collaboration avec les Russes, il dénonce « les comportements » de ces derniers. « Ils ne sont pas assermentés comme nos douaniers mais ils s’accaparent de leur tâche et c’est eux qui gèrent les opérations douanières maintenant, contrairement aux termes de l’accord », s’emporte notre source douanière. Ses inquiétudes s’ajoutent aux frustrations des commerçants centrafricains. Surtaxes douanières Ces derniers se plaignent depuis quelques jours, de surtaxes douanières imputées aux Russes. « Avant, pour des marchandises de 21 millions de francs CFA, je payais les taxes à 4 ou 6 millions. Maintenant, je paie jusqu’à 12 millions », s’emporte un autre commerçant.

Pour lui, ils sont une dizaine de commerçants dans le quartier commercial du Pk5, à fermer boutique aujourd’hui. « Avec ces Russes, il y a de plus en plus de complications. Nos conteneurs de marchandises en provenance du Cameroun qui nous étaient libérés instantanément dès l’arrivée à Bangui, prennent aujourd’hui jusqu’à deux mois au port Amont (port sec) où les conteneurs sont conduits pour inspection. Ce retard nous coûte en argent mais aussi, les marchandises sont abîmées ou expirées. On perd gros », tient-il à préciser.

LES RUSSES CRÉENT LA CRISE D’APPROVISIONNEMENT DES MARCHANDISES

Ces faits sont confirmés par un douanier centrafricain qui critique cette méthode. « Les commerçants louent parfois un camion pour trois jours, se retrouvent à payer 27 jours de plus. Ils ne s’en sortent pas. Parfois quand on libère les conteneurs, les Russes ne veulent pas et jugent que les taxes payées ne correspondent pas et refont payer les commerçants », explique-t-il. Débat houleux La Centrafrique importe ses produits de premières nécessités (Huile végétale, sucre, café, savon, etc) principalement du Cameroun voisin. Ces derniers mois, les prix sont en constante augmentation sur les marchés banguissois. Le morceau de savon de 125 FCFA coûte désormais 175 ou 200 FCFA. « Les Russes n’ont pas le droit de bloquer des conteneurs car cela n’est pas inclus dans l’accord conclu avec eux. Ils créent la crise d’approvisionnement des marchandises », regrette le cadre de la douane centrafricaine

En début de semaine, la question a été au cœur d’un débat houleux entre le nouveau ministre centrafricain des Finances et l’équipe dirigeante de la douane centrafricaine. Les douaniers centrafricains ont exprimé au ministre des Finances leur “incompréhension” face à ce “changement brusque” des clauses de l’accord. « Selon le partenariat initial, les Russes sont là strictement pour assister les douaniers. Là, ils sont impliqués dans la chaîne de dédouanement. Comment cela se fait ? », s’interroge le cadre de la douane centrafricaine. « Les commerçants se plaignent aujourd’hui de surtaxes douanières. Ce n’est pas juste car les pénuries ce sont nos familles directes qui les subissent ».

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Jeune Afrique

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