Centrafrique : s’unir ou périr face à l’apocalypse Touadéra

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Du Haut – Mboumou à l’Ouham – Pendé en passant par la Nana – Mambéré, l’Ouham, la Bamingui – Bangoran, la Vakaga, la Haute – Kotto, la Basse – Kotto, l’Ombella – Mpoko et même la Lobaye aux portes de la capitale centrafricaine, la situation sécuritaire et humanitaire n’a cessé de se détériorer dangereusement depuis plusieurs mois.

Des vagues d’actes de graves atteintes aux droits humains, de violences meurtrières, de crimes de guerre et de crimes du fait des groupes armés, pourtant signataires de l’Accord de Paix de Khartoum et dont les leaders assument de fonctions de ministre – conseiller à la présidence, l’assemblée nationale et à la primature, ont forcé des centaines de familles à fuir leurs villages. Si l’on doit ajouter la pandémie du covid – 19 à ces conditions sécuritaires fragiles dans lesquelles sont contraintes de se retrouver fort malheureusement de bien nombreuses populations de notre pays, livrées à elles – mêmes, sans défense et sans assistance,  le pire est à craindre dans les jours à venir d’autant plus que le Gangster de Bangui et son organisation criminelle au pouvoir depuis le 30 mars 2016 ne sont préoccupés que par la conservation de leur pouvoir, par la volonté manifeste de tripatouiller coûte que coûte la constitution, quitte à fouler allègrement aux pieds la dernière décision de la cour constitutionnelle, et de faire organiser les élections futures par l’ANE, simple organe technique devenu entretemps une véritable machine à fraudes, et non une institution indépendante, consensuelle, républicaine, légale et légitime.

Avec la saisine du conseil d’état par les avocats des partis politiques membres de la COD – 2020, le 8 juin 2020, relative à l’annulation des décrets fixant la période d’établissement de la liste électorale en RCA, et définissant la liste des pays retenus pour la participation des Centrafricains de l’étranger à l’élection du président de la République, suite à la décision historique de la cour constitutionnelle invalidant l’initiative « tant parlementaire que gouvernementale » de la révision constitutionnelle, et appelant le Gangster de Bangui à une concertation avec toutes les forces vives de la nation, plus que jamais, les Centrafricains, au – delà de leurs chapelles politiques, doivent se réveiller de leur longue nuit de sommeil dogmatique pour se mettre au service de la patrie afin d’éviter le naufrage collectif et national incarné par l’apocalypse Touadéra.

En se résolvant à agir ainsi, en taisant leurs querelles partisanes et leurs égos, les leaders des partis politiques sans exclusive, les représentants de la société civile, les syndicalistes, les religieux et les organisations des femmes et de la jeunesse auront le mérite devant l’histoire, le peuple et la nation tout entière de lancer un signal fort à l’endroit de tous les partenaires de la République centrafricaine qui, dans un récent communiqué, ont encouragé le Gangster de Bangui à organiser un dialogue politique inclusif avec toutes les forces vives de la nation. Comme David Dacko, Ange Félix Patassé et Abel Goumba qui avaient magistralement acculé le général Kolingba à reculer et à tendre la main à l’opposition, après les élections contestées de 1992, ils auront pris la bonne résolution : celle de mettre un terme à la situation chaotique de l’heure et de créer des conditions favorables à l’organisation des élections démocratiques, libres, inclusives, consensuelles, transparentes et incontestées. Et ce sera à pendre ou à laisser, c’est – à – dire avec lui ou sans lui.

Et c’est maintenant que tous doivent agir de manière consensuelle et démocratique, car demain sera trop tard. En effet, outre l’occupation de plus de 85% du territoire national par des groupes armés et des mercenaires qui ne sont rien d’autre que des collaborateurs privilégiés du Gangster de Bangui et son organisation criminelle, il ne se passe plus un seul jour sans que l’on entende parler de présence massive d’hommes lourdement armés dans tel ou tel village, d’affrontements avec des éléments d’autodéfense ou des Faca, et donc de pertes en vies humaines, de blessés et de déplacements de personnes. Même si les nouvelles des fronts à Birao, Ndélé, et Obo sont moins alarmistes, après l’arrestation des combattants de la coalition MLCJ-RPRC-PRNC, du FPRC et de l’UPC, c’est ce spectacle de désolation, d’interminable peur et d’extrême précarité auquel de paisibles populations sont obligées, malgré elles, d’assister ces derniers temps dans les préfectures de l’Ouham – Pendé, la Nana – Mambéré et de l’Ouham, depuis l’évaporation dans la nature du mercenaire peulh d’origine camerounaise Abbas Siddiki et de ses éléments avec armes et bagages, et ce, bizarrement au lendemain d’une visite de travail effectuée à Bouar par le président de la République.

En somme, un grand complot astucieusement conçu par ce dernier dans le seul but d’empêcher la circulation des biens et des personnes dans cette partie de la République où la densité de la population est la plus élevée, d’une part, et décourager les gens à aller se faire inscrire massivement sur les listes électorales dont les opérations devront commencer le 22 juin 2020, d’autre part. Nul ne doute aussi que, les élections se gagnant non pas dans les villes, mais plutôt dans les communes et les villages par le biais des campagnes et des marches à pied et par la méthode  de porte – à – porte, derrière ces manœuvres d’entretien et d’alimentation permanente de la crise sécuritaire et de règne de la terreur rouge dont la parfaite et indéniable démonstration a été faite par les  dernières attaques simultanées du centre de formation des USMS et de Pougol, se cache l’envie folle et déterminée de Touadéra d’interdire l’accès de toute cette zone à tous ses potentiels adversaires politiques.

Ainsi donc, face à ce qu’il convient d’appeler « péril Touadéra », l’unité nationale semble être la seule parade pour surmonter la gangrène et vider l’abcès de toute sa purulence et de toute sa puanteur. Alors que la République centrafricaine se trouve aujourd’hui dans l’œil du cyclone, de l’insécurité généralisée et de mainmises des mercenaires sur plus de 85% du territoire, persister dans ce climat de tension à la veille des élections s’annonce comme un désastre pour notre démocratie chèrement acquise en 1993 et l’ensemble des composantes de la société centrafricaine. Certes, il appartient aux autorités en place de se mettre en première ligne dans ce combat contre l’hydre sécuritaire, mais devant leur responsabilité avérée dans son développement, à travers la fameuse capitulation de Khartoum et la volonté clairement affichée du président Touadéra à maintenir le statu quo,  il est plus qu’urgent que toutes les forces vives de la nation avec la participation des élites militaires puissent prendre la tête de la locomotive dans cette lutte à un moment crucial de notre histoire.

Dans ce contexte, il va de soi que les dirigeants actuels ont intérêt plutôt à jouer la carte de l’apaisement, s’ils ne veulent pas être abandonnés sur la route pour se retrouver quelque temps plus tard dans la poubelle de l’histoire avec toutes les conséquences qui s’imposeront, notamment les comptes à rendre à la nation. Comme nous l’avons souligné un peu plus haut, à ce stade, un dialogue politique inclusif et sincère s’impose, pour déboucher sur des mesures de décrispation concrètes, susceptibles de motiver l’adhésion de toutes les parties à l’effort de lutte aux fins de tourner définitivement la page. Et ceci, pour la simple raison qu’en Centrafrique, les clivages internes au sein de la classe politique n’ont eu que pour seul effet d’enfoncer la crise, avec des conséquences impitoyables pour les populations et les forces armées, particulièrement vulnérables à la furia du Gangster de Bangui et ses amis mercenaires. Le seul moyen, par conséquent, de mettre fin à cette vague d’oppression, est de fédérer toutes les énergies positives et  toutes les parties dans un élan d’intelligence patriotique pour dicter la conduite à tenir.

L’heure est alors  venue pour que les partis politiques, la COD – 2020, la société civile et les élites militaires se mettent ensemble autour d’une table pour combattre et écraser le péril Touadéra.

Jean – Paul Naïba

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