Centrafrique : SRI et ORCB, des centres de détention provisoire devenus de mouroirs à Bangui

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La section de recherches et d’investigations « SRI » et l’office centrafricain de répression contre le banditisme « OCRB », des centres de détention provisoire, sont devenus de véritables mouroirs, ces derniers temps à Bangui, la capitale de la petite république caucasienne de Bangui – Kistan.

« Le peuple centrafricain est meurtri sur sa propres terre, les quatre cellules de l’OCRB et celles de la SRI sont si pleines que les détenus doivent se tenir debout, et ce,  après avoir subi des tortures ; certains ont des bras cassés et d’autres des jambes brisées à jamais, sans compter les cas graves de tous ceux qui ne peuvent pas se tenir debout, faibles, mal nourris, malades et piétinés par les autres sans nourriture ni soins. Il ne se passe pas un seul jour sans que l’un d’entre eux ne meure », ont révélé nos reporters, suite à leur visite sur le terrain et dans ces institutions. De graves accusations de violations des droits de l’homme soutenues par des témoignages émanant de sources très proches des familles des détenus.

Selon les informations rapportées, de centaines de personnes se retrouvent aujourd’hui derrière les barreaux en Centrafrique, en raison de leur opinion, de leurs prises de positions, de leur appartenance politique, ethnique et communautaire, et de leurs luttes. Tous ont été arrêtés arbitrairement, pour la plupart enlevés la nuit, soumis à des tortures, tués ou jetés dans ces lieux de détention provisoire. Privés d’accès à leurs proches et sans aucune possibilité de contact avec leur avocat, ils sont à la merci des mercenaires du Groupe Wagner qui usent de tous les moyens de traitements humiliants, dégradants et inhumains pour leur extraire des aveux, sous la contrainte. C’est l’exemple de ce jeune commerçant qui, blessé lors des derniers affrontements de Bangassou, puis évacué à Bangui pour des soins intensifs dans les locaux de MSF Hollande sis à Sica 1, y a été extrait par les FDSI et leurs différentes milices pour subir la torture de l’eau bouillante, à l’intérieur de la SRI, devant des officiers de police judiciaire régulièrement assermentés.

Depuis le retour inopiné de l’ancien président François Bozizé à Bangui, la mise en place de la Coalition des Patriotes pour le Changement par les groupes armés, en réaction au refus du pouvoir de convoquer une concertation nationale avant la tenue des élections du 20 décembre 2021, et la dernière attaque de la capitale, une répression aveugle et croissante cible les opposants, certains éléments des FDSI du fait de leur appartenance ethnique, régionale et politique, et des membres de la société civile. Si certains d’entre eux ont eu la chance d’être encore en vie dans les locaux de la SRI et de l’OCRB, entassés les uns sur les autres, au risque de mourir à tout moment d’étouffement, d’autres sont sommairement exécutés, après avoir été torturés, et leurs corps jetés dans les buissons. C’est l’histoire de ces dépouilles mortelles charriées de manière rythmique depuis plusieurs mois déjà par les eaux troubles de l’Oubangui, racontée par des pêcheurs et des piroguiers. C’est aussi l’odyssée et les témoignages accablants et choquants de ces corps sans vie en état de putréfaction avancé, découverts aux abords du cimetière de Ndrès par des nettoyeurs, des passants et les habitants. Ce sont enfin les litanies des graves exactions commises par les FDSI et leurs alliés dans les villes sous leur contrôle sur les populations civiles depuis janvier 2021.

Tous ces nombreux cas de crimes odieux et extrajudiciaires, dénoncés par certains médias de la place et dont la responsabilité directe incomberait aux FDSI, à leurs milices et aux mercenaires russes et rwandais, n’ont jamais fait l’objet d’enquêtes diligentées par le pouvoir suite aux plaintes des parents des victimes ou tout simplement sur instruction du procureur de la république. Pis, dans l’une de ses sorties médiatiques, le porte – parole du gouvernement Ange Maxime Kazagui, en réponse au rapport de l’Amnesty International dénonçant le massacre de Bambari et les horreurs liées aux élections, a préféré exiger plus d’éléments matériels de preuve. Cette posture a été confirmée depuis lors par un communiqué incongru de son collègue du ministère des affaires étrangères. Un véritable déni de Justice ! Un flagrant délit de violation des traités, accords et instruments juridiques internationaux en la matière auxquels l’Etat centrafricain a entièrement souscrit. A telle enseigne que les défenseurs des droits de l’homme, comme la Ligue Centrafricaine des Droits de l’Homme, ont peur de travailler sans crainte d’intimidation, de menace et d’harcèlement !

Une vraie injure à l’endroit de tous les partenaires internationaux de la République centrafricaine. En effet, dans leur dernier communiqué, « les hauts responsables de l’Union africaine, de la CEEAC, des Nations Unies et de l’Union européenne condamnent fermement les attaques contre la population civile, les travailleurs humanitaires et les Casques bleus des Nations Unies, ainsi que toute forme de violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire par toutes les parties, y compris les forces de défense et de sécurité. Ils appellent les autorités centrafricaines à mener les enquêtes nécessaires afin de traduire devant la justice les auteurs et commanditaires de tels crimes graves qui ne doivent nullement rester impunis. Ils dénoncent par ailleurs les discours de haine, d’incitation à la violence et de désinformation, et encouragent les autorités nationales à prendre des mesures fortes contre ces agissements ».

De ce fait, l’heure est donc venue pour qu’ils puissent épingler le pouvoir de Bangui et dénoncer sans fioritures les graves violations des droits humains en cours en République centrafricaine. Ils doivent s’inquiéter du détournement du régime de l’état d’urgence et du couvre – feu pour menacer, arrêter arbitrairement, enlever, torturer, séquestrer et tuer des civils. Le faire, c’est siffler la fin de la récréation, mettre fin à des années d’inaction, en dépit de la forte détérioration de la situation des droits humains et lui « signaler qu’il n’aura plus carte blanche pour emprisonner, torturer et violer le droit à la vie ou tuer illégalement ». Enfin, l’Onu, le G5, et l’UE sont tenus de prendre toutes les mesures qui s’imposent, d’éviter toute collaboration avec les « affreux blancs » du Groupe Wagner, et de prioriser le respect des droits humains dans leurs relations diplomatiques, économiques et commerciales avec ce petit état caucasien de Bangui – Kistan.

Jean – Paul Naïba

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