Centrafrique : « Quand les bandits sont au pouvoir, la place d’un honnête homme est en prison » !

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Cette citation du célèbre syndicaliste et militant québécois Michel Chartrand, ne trouve-t-elle pas toute sa signification à l’aune des événements qui se déroulent sous nos yeux en Centrafrique, au lendemain de l’arrestation manifestement illégale, arbitraire et injuste de l’activiste politique et panafricaniste centrafricain Fari Tahéruka Shabbaz, jugé trop proche du président du Chemin de l’Espérance Abdoul Karim Méckassoua, l’homme à abattre de l’association des malfaiteurs au pouvoir à Bangui, depuis mars 2016 ?

En effet, il y a déjà trois jours aujourd’hui, jour pour jour, que le membre du Mouvement « E Zingo Biani » et auteur de l’Appel Citoyen à la classe politique centrafricaine pour la démission du bureau de l’assemblée nationale et la levée de l’immunité parlementaire de son 1er vice – président Jean Symphorien Mapenzi dont les propos dans les bandes sonores en circulation sont plus qu’accablants pour le régime, est placé sous mandat de dépôt et écroué  à la tristement célèbre maison d’arrêt de Ngaragba. Et ce, après avoir été détenu en dehors de tout cadre légal pendant deux jours et, le gouvernement représenté par le ministère public n’a, pour le moment, rien apporté pour étayer les accusations fantaisistes « d’outrage à la pudeur et autres » dont il l’accable et pour lesquelles il n’a jamais été régulièrement convoqué, suite à une plainte, pour être entendu.

Le maintien en détention provisoire de Fari Tahéruka Shabazz montre, s’il en était besoin, que l’Etat de Droit, le respect des procédures et l’indépendance de la justice, sont toujours de vains mots dans la République de Nulle Part et des Groupes Armés. Pis, les institutions judiciaires ne sont instrumentalisées que pour assouvir des desseins machiavéliques et éminemment politiques, sur fond de règlement des comptes personnels et par personnes interposées. De ce fait, ce ne sont pas les délinquants surtout en col blanc, les mercenaires qui écument et contrôlent plus de 85% du territoire national, les traîtres à la patrie, les égorgeurs du peuple centrafricain et les liquidateurs de la République qui ont le plus à craindre de la justice mais les honnêtes citoyens, tel Fari, du fait de leurs prises de positions politiques, conformément aux dispositions constitutionnelles, pour peu qu’ils ne plaisent pas ou qu’ils ne sont pas dans les bonnes grâces des gouvernants du moment.

Lorsque les magistrats cèdent à la tentation d’user, et parfois d’abuser du placement en détention provisoire sans autre fondement que celui intolérable d’exaucer le vœu du pouvoir politique, ils ne peuvent que cautionner l’association des malfaiteurs au pouvoir dans ses funestes et macabres entreprises d’assassinat de la Démocratie, chèrement acquise en 1993, et de restrictions des libertés individuelles et collectives. Pour le cas d’espèce, le déficit évident de l’instruction a été comblé par un ramassis de colportage issu de la déposition de celui qui a été accusé par lui pour le vol de son téléphone.

Même si la diffusion des images de l’agent de renseignements de Wanzet et homme de main du 1er vice – président de l’assemblée national, en tenue d’Adam et Eve, par le plaignant Fari sur sa page Facebook en 2018, constitue, selon le code pénal, un outrage public à la pudeur, c’est – à – dire un acte intentionnel contraire aux bonnes mœurs accompli publiquement ou dans un lieu privé accessible au regard du public, et susceptible d’offenser la pudeur et le sentiment moral des personnes qui en  sont les témoins involontaires, il n’en demeure pas moins cependant important  de souligner qu’en l’absence totale d’un plainte régulièrement déposée par M. Aroufaï qui comparaissait ce jour – là en qualité d’accusé, le procureur de la République était tenu de libérer purement et simplement Fari qui jouissait de la qualité de plaignant. S’il a décidé de placer ce dernier sous mandat de dépôt, il est incontestable que le mobile de sa décision était plus que politique, du fait des sorties médiatiques de cet activiste, dérangeantes, gênantes et critiques pour le pouvoir en place.

Cette immixtion du pouvoir politique paralyse l’évolution normale d’un dossier et la détention préventive qui est une exception devient un instrument pour faire plier les récalcitrants. Le procureur de la République ou le ministre de la justice qui viennent ainsi de manquer aux devoirs de leur état : devoirs d’impartialité, d’indépendance, d’intégrité, de respect de la présomption d’innocence, et de réserve, ne saurait échapper à cette forme de responsabilité pour laquelle il pourrait être amené à rendre compte un jour.

En Centrafrique, le Ministre de la Justice, le Procureur de la République, le juge d’instruction et les commissaires de Police, depuis l’accession de l’association des malfaiteurs au pouvoir, ne cessent de déployer tous les jours tous les moyens mis à leur dispositions par la collectivité nationale pour exercer de l’injustice contre un citoyen, et ce, dans l’indifférence quasi-générale de la classe politique.

Les droits individuels et collectifs sont bafoués et les magistrats et leurs auxiliaires sont tenus de se conformer et de céder aux humeurs et caprices du président Touadéra et des siens. On accuse, on inculpe, on emprisonne, on place sous contrôle judiciaire, on libère ou on gracie au gré de l’humeur du « Président Fondateur et Guide Eclairé » comme le nomment désormais certains thuriféraires. Ces autorités judiciaires se sont transformées en véritables Tontons Macoutes au service de leur « maitre » dont elles doivent exécuter les desiderata tous les jours que le Bon Dieu fait sur cette terre des hommes.

 Ainsi donc, pour son engagement politique et citoyen, Fari Tahéruka Shabazz est privé de sa liberté, sur instructions d’un certain Touadéra, pourtant naguère candidat de la rupture et l’homme des pauvres. Mais devant cette intolérable situation et ce cas de flagrant délit d’injustice ou de déni de justice, Thomas Jefferson n’avait – il pas dit que « quand l’injustice devient loi, la résistance est un devoir » ?

 La rédaction

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