CENTRAFRIQUE : PROJET DE RÉVISION DES DISPOSITIONS NON RÉVISABLES DE LA CONSTITUTION: TOUADÉRA ET LES SIENS JOUENT AVEC LE FEU !

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« Qu’est-ce qui ne va pas chez vous les Centrafricains-là? Pourquoi vous aimez toujours créer des problèmes alors que vous en avez déjà assez que vous n’arrivez pas à résoudre? Vous n’avez que çà à faire? Ne savez-vous pas que la révision des dispositions de la constitution insusceptibles de révision va vous amener loin? Ne savez-vous pas que le non respect de la constitution est un bon prétexte pour faire tomber un régime par tous les moyens? Pourquoi vous voulez toujours ajouter la crise à la crise»? Telles sont les questions qu’un ami Sénégalais m’a appelé pour me poser, sans me demander qu’est-ce qui se passe dans mon pays. Il est certainement au courant de la démarche des députés du parti MCU au pouvoir visant à modifier des dispositions de la constitution que le peuple, par référendum, avait catégoriquement interdit toute idée, tentative ou initiative de révision par la voie parlementaire, si ce n’est que le peuple seul qui peut en décider autrement et seulement par référendum, comme dans les démocraties qui se respectent. Et je suis resté pantois face à ces questionnements.
Lors de son entrée en fonction le 30 mars 2016, debout, découvert, la main gauche posée sur la Constitution et la main droite levée, le nouveau président élu de la République centrafricaine post-transition, le professeur Faustin-Archange Touadéra, avait prêté le serment ci-après, en sängö, puis en français, devant la Cour constitutionnelle siégeant en audience solennelle:
«Moi, Faustin-Archange Touadéra, Je jure devant Dieu et devant la nation, d’observer scrupuleusement la constitution, de garantir l’indépendance et la pérennité de la République, de sauvegarder l’intégrité du territoire, de préserver la paix, de consolider l’unité nationale, d’assurer le bien-être du Peuple Centrafricain, de remplir consciencieusement les devoirs de ma charge sans aucune considération d’ordre ethnique, régional ou confessionnel, de ne jamais exercer les pouvoirs qui me sont dévolus par la constitution à des fins personnelles ni de réviser le nombre et la durée de mon mandat, et de n’être guidé en tout que par l’intérêt national et la dignité du Peuple Centrafricain». Dont acte.
Je crois savoir que le président Touadéra a suffisamment violé la constitution sur laquelle il avait prêté serment le 30 mars 2016 avant son entrée en fonction. Lui et ses hommes ont suffisamment montré qu’ils ne sont guidés que par leurs seuls intérêts bien souvent contraires à ceux du peuple, et qu’ils sont désormais capables de violer encore et dangereusement la constitution, dans le seul but de se maintenir au pouvoir pour perpétuer la descente aux enfers du pays. Mais cette fois-ci, le risque qu’ils prennent ne sera pas sans risque.
L’Article 35 de la constitution fixe le nombre du mandat présidentiel à 2 et la durée à 5 ans ni moins ni plus. Le délai est intangible parce que l’alinéa 3 dudit article dispose: « En aucun cas le Président de la République ne peut exercer plus de deux (02) mandats consécutifs ou le proroger pour quelque motif que ce soit». Le coronavirus n’est donc pas un motif pour rallonger la durée du mandat présidentiel.
La constitution n’a pas dit 5 ans et quelques mois ou semaines de plus. De surcroît, cette durée est insusceptible de modification. En effet, l’Article 153 de la Constitution a bétonné le nombre et la durée du mandat présidentiel en ces termes: « Sont expressément exclus de la révision:
-la forme républicaine et laïque de l’Etat;
-le nombre et la durée des mandats présidentiels;
-les conditions d’éligibilité;
-les incompatibilités aux fonctions de Président de la République;
-les droits fondamentaux du citoyen;
-les dispositions du présent article ».
Même les dispositions de l’article 153 ne sont pas révisables. Dès l’instant où c’est le Souverain Primaire (le Peuple) qui a décidé ainsi, pourquoi chercher à aller à l’encontre de la volonté populaire exprimée par référendum le 13 décembre 2015? D’où vient la fameuse initiative de révision de ce qui est insusceptible de révision? Ceux qui militent pour la révision des dispositions non révisables de la constitution sont-ils sérieux? Que de sophismes et d’arguties pour défendre l’indéfendable !
Ainsi, modifier un seul alinéa de l’article 153 de la Constitution par la voie parlementaire est une véritable déclaration de guerre au Peuple Centrafricain. Certains y trouveront un prétexte pour rendre davantage le pays ingouvernable, à défaut de faire chuter le régime de Touadéra par la violence.
De mémoire de Centrafricain, on sait ce que le non-respect de la constitution, la violation du serment constitutionnel et le non-respect des engagements de la part des présidents démocratiquement élus, ont eu comme conséquences dans ce pays qui a toutes les peines du monde de s’en sortir.
La seule possibilité qui est offerte au président Touadéra est de consulter le peuple par référendum afin qu’il se prononce pour ou contre la révision des dispositions de l’article 153 alinéa 3 de la constitution. Il en sortira grandi.
D’ici là, le président Touadéra doit consulter l’histoire et refuser de jouer au jeu dangereux que lui proposent des députés et hommes politiques qui ont mangé dans tous les râteliers et qui ont un passé négativement surchargé. Car, demain c’est lui seul qui sera comptable devant l’histoire et risque de vivre comme un apatride, un laissé-pour-compte, un nécessiteux, un irrécupérable. Entretemps, ceux qui l’ont trompé vont faire allégeance avec les nouveaux hommes forts du pays, rien que pour préserver leurs intérêts matériels et égocentriques, eux qui ne connaissent et ne pratiquent que la politique du tube digestif.
L’oracle a parlé. Et Touadéra est averti.
Cyrus-Emmanuel Sandy
Source: MEDIAS+ du 20.04.2020

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