Centrafrique : pourquoi Dondra n’est pas l’homme de la situation

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A moins de trente jours des Cent – Jours de son deuxième et dernier quinquennat, suite aux vraies catastrophiques élections du 27 décembre 2020, marquées singulièrement par l’exclusion de plus de 300.000 Centrafricaines et Centrafricains du droit de vote, d’une part, et par de flagrantes et odieuses irrégularités qui leur ont dénié, d’autre part, tous critères d’inclusivité, de sincérité, de crédibilité, de transparence et in fine toute légitimité, tels que définis par le Code de l’Intégrité Electorale auquel la République centrafricaine a entièrement souscrit, comme toute société démocratique, l’Imposteur de Bangui a enfin nommé Henri Marie Dondra au poste de premier ministre en remplacement de l’inoxydable Firmin Ngrébada et partenaire privilégié des groupes armés et des mercenaires russes du Groupe Wagner.

Inamovible ministre des finances et du budget, depuis la prise de fonctions du « Candidat des Pauvres » devenu entretemps le « Bourreau de Tout un Peuple », pour avoir contribué financièrement à la campagne de ce dernier, l’ancien directeur général du Fagace, actionnaire privilégié de plusieurs sociétés privées de la place, 1er secrétaire exécutif national du MCU, a été choisi pour deux raisons, selon que l’on se trouve dans le camp de ses ultra – fanatiques laudateurs ou dans le rang de ses détracteurs : pour les premiers à cause de son talent de « fin et convaincant » interlocuteur face aux partenaires techniques et financiers tant dans le cadre bilatéral que multilatéral, tout au long du mandat écoulé ; pour les deuxièmes, du fait d’avoir été à l’origine de la colère de ces derniers pour non – reddition des comptes et des aides reçues de 2016 à ce jour.

Mais au – delà de ces raisons évoquées couramment dans les différentes structures du pouvoir, il est plutôt évoqué de sources diplomatiques, pour justifier cette nomination, des impératifs de très fortes contraintes budgétaires et financières et une certaine volonté de la part de Bangui de renouer le dialogue avec la France, suite à la suspension de son aide budgétaire et de sa coopération militaire. Et quand l’on sait que la France reste et demeure jusqu’à preuve du contraire le premier partenaire historique, politique, culturel et socio – économique du pays, le deuxième contributeur de l’Ue après l’Allemagne, le « porte – parole » et le « rédacteur » de tous les projets de résolutions relatives à la situation en République centrafricaine devant le conseil de sécurité à l’Onu, et notre « gestionnaire financier » près les institutions financières internationales de Bretton Woods, il y a vraiment de quoi à faire éternuer l’Imposteur de Bangui et ses ouailles.

A ce propos, Bangui a effectivement grand intérêt à ne pas voir lui échapper à jamais une manne financière de 10 millions d’euros qui lui permettait de faire face aux paiements des salaires, des pensions et des bourses, et avec elle, le risque certain de la perte d’une importante part des ressources extérieures, des appuis budgétaires, et des appuis projets, dont le montant dans la loi de finances en cours est arrêté à plus de 151 milliards de Fcfa, un peu plus que celui des ressources nationales estimées à 135 milliards de Fcfa. Cependant, y parvenir reviendrait à donner des réponses précises aux inquiétudes de Paris, relatives au refus de Bangui d’organiser un dialogue politique inclusif avec l’opposition démocratique, au lendemain des élections du 27 décembre 2020, décriées par tous, excepté le GTSC, et manifestement contraires au Rapport de la Commission Mondiale sur les Elections, la Démocratie et la Sécurité de l’Onu en 2012, selon qui l’intégrité électorale représente « toute élection reposant sur les principes démocratiques de suffrage universel et d’égalité politique, tels qu’ils figurent dans les normes et accords internationaux, et menée de façon professionnelle, impartiale et transparente dans sa préparation et dans sa gestion, tout au long du cycle électoral », d’une part, et d’autre part, aux multiples campagnes de désinformation, de dénigrements et de manipulations de l’opinion nationale et internationale contre la France et ses intérêts en République centrafricaine, dont les soutiens politiques sont connus et les organisateurs formellement identifiés.

C’est dire, dans un contexte où le pouvoir de Bangui fait face à un tollé diplomatique généralisé, suite à la publication du rapport du Groupe des experts de l’Onu sur des allégations de vols, de viols, d’enlèvements, de tortures, de disparitions forcées, d’exécutions sommaires et extra – judiciaires, d’incendies des habitations et des greniers, de spoliations de biens d’autrui, de déplacements de personnes, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, commis par le Faca et leurs alliés rwandais et russes du Groupe Wagner, une crise avec son puissant voisin du Nord, après l’attaque du poste avancé de Sourou et la mort de six soldats tchadiens dont cinq enlevés et exécutés froidement en territoire centrafricain et à une reprise des hostilités avec les forces de la Coalition des Patriotes pour le Changement, combien immense, lourde et difficile est la tâche qui pèse désormais sur les petites épaules du nouveau premier ministre.

Malheureusement, une mission éminemment salvatrice et rédemptrice dont Henri Marie Dondra semble totalement ignorer l’importance historique.« On a déjà un acquis sécuritaire. Maintenant, il va falloir faire de notre mieux pour mettre en place un mécanisme nous permettant de conserver ces acquis. Je pense qu’il y aura la relance des échanges avec les groupes armés dans le cadre de l’Accord de paix que nous avions signé. Dans le cadre de l’économie, il faudrait penser à diversifier nos sources de revenus en élargissant l’assiette fiscale. C’est quelque chose de très important », a – t – il affirmé, lors de la cérémonie de passation de service. « Dans les accords et échanges avec nos partenaires bilatéraux et multilatéraux, il y a un travail d’échanges qu’il va falloir relancer. Nous allons poursuivre ces échanges avec nos partenaires techniques financiers. Notamment, l’Union européenne, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Même avec notre partenaire stratégique, qui est la France » a – t – il poursuivi. Et ce dernier de conclure en ces termes : »Le président de la République entend faire de ce gouvernement, une équipe inclusive qui permettra à tous nos compatriotes; qu’il s’agisse des groupes armés qui sont dans le cadre de l’APPR ou encore des partis politiques, même de l’opposition de participer à ce gouvernement ».

Par cette sortie médiatique, l’homme a, en effet, révélé à demi – mots et de manière délibérée qu’il n’est pas un homme d’Etat, mais de préférence un homme politique, comme il en a fait la démonstration, tout au long de sa gouvernance en tant que ministre des finances et du budget. D’après Abraham Lincloln, « un homme d’État est celui qui pense aux générations futures, et un homme politique est celui qui pense aux prochaines élections », n’est – ce pas ? Inopportunément, l’ancien directeur général du Fagace ne l’est pas. Ayant dû son retour « triomphal » au pays de ses ancêtres, son ascension sociale et politique et celle de tous les siens, son élection en tant que député du 1er arrondissement de la ville de Bangui, par les bonnes grâces du mathématicien de Boy – Rabé, il ne peut lui devoir, en contrepartie, que respect, fidélité, loyauté, obéissance, soumission et entière dévotion. Jamais, il ne prendra le risque de tenir un discours anti – système et remettre en cause la volonté de son mentor d’organiser un dialogue républicain et exclusif, même quand il a prononcé le mot « inclusif ». C’est du fait de cette qualité d’homme de basses besognes et  tout simplement pour que le MCU contrôle tout l’appareil exécutif, après avoir fait main basse sur le pouvoir législatif, qu’il a été placé là. En outre, manipulable à satiété, le roublard de Touadéra va se servir de lui pour gagner du temps et faire croire à la France et la communauté internationale qu’il a mis de l’eau dans son vin, le temps de trouver une nouvelle parade pour contrer les fortes pesanteurs extérieures et intérieures de l’heure.

Par conséquent, l’on ne doit pas s’attendre à ce que Dondra fasse mieux que les premiers ministres Edouard Franck, Timothée Maléndoma et Enock Dérant – Lakoué qui, illo tempore et dans un contexte socio – politique singulièrement caractérisé par des fortes contestations populaires pour l’avènement du pluralisme démocratique et par la suspension de la coopération budgétaire et militaire française, eurent le courage politique de défier l’autorité de tout un régime, de faire infléchir la position du général d’armée André Kolingba, et d’organiser le Grand Débat Politique National, suivi de la mise en place d’un gouvernement d’union nationale dont la mission était de tenir dans les conditions incontestables de sincérité, de crédibilité, d’inclusivité, de transparence et in fine de légitimité les élections de 1993, après l’annulation de celles de 1992. Loin de ressembler, non plus, à un certain Ousmane Sonko, le leader de PASTEF, « un homme, un parcours, un discours et des actes anti – systèmes », et n’ayant aucune envergure professionnelle, militante et socio-politique que ces derniers, il n’a pas le profil requis et idéal pour réconcilier notre pays avec lui – même, à travers toutes ses filles et ses fils sans exclusive.

A cet important handicap politique, il faut ajouter le bilan catastrophique de son passage à la tête du prestigieux ministère des finances et du budget, pendant plus ou moins cinq (5) années. En effet, contrairement à l’information relayée par Jeune Afrique, dans son article intitulé « Russie – France : le premier ministre centrafricain victime du bras de fer entre Moscou et Paris » publié le 16 juin 2021, selon laquelle « l’homme est apprécié au sein des instances financières  internationales, et notamment du FMI, aurait reçu le discret soutien de l’ancienne présidente de cette institution Christine Lagarde, aujourd’hui à la tête de la BCE et bénéficie du soutien de Paris où réside de sa famille« , Henri Marie Dondra reste et demeure un mauvais gestionnaire. Mieux, il est un corrompu et un corrupteur, selon les gentilles révélations faites par l’ancien 1er vice – président de l’assemblée nationale Jean – Symphorien Mapenzi, dans une bande sonore que nous avons publiée dans notre article intitulé « Centrafrique : Henri Marie Dondra, un corrompu et un corrupteur à la primature ! » publié le 12 juin 2021. Dans une autre bande sonore que nous détenons, l’ancien député de Bimbo 2 n’était pas allé avec le dos de la cuillère pour affirmer et soutenir qu’aucune école, aucun centre de santé et aucun kilomètre de route n’a été construit, réhabilité ou entretenu sur le budget de l’Etat, et ce, de 2016 à ce jour.

A ces graves accusations formulées contre Henri Marie Dondra par un député de la nation, dans l’exercice de ses fonctions, le nouveau premier ministre dont Jeune Afrique a vanté les mérites exceptionnels, dans son dernier article, n’a jamais pris la parole officiellement pour les démentir ou se résoudre à astreindre l’auteur devant la justice pour une manifestation de la vérité. Et cela est d’autant plus vrai que ce Monsieur n’a, une fois de plus, jamais déféré à l’un des principes fondamentaux des finances publiques qui est la reddition des comptes budgétaires et financiers et dont le respect permet aux partenaires d’avoir une idée sur la détermination des Etats ou des gouvernements à mettre un accent particulier sur les valeurs de la bonne gouvernance et de la redevabilité. Jamais, il n’a rendu publics les rapports administratifs et comptables, certifiés par la Cour des comptes qui est en charge de la vérification sur pièces et sur place de la régularité des recettes et des dépenses inscrites dans les comptabilités publiques, au titre des exercices budgétaires 2016, 2017, 2018, 2019, et 2020.

En clair, en sus de l’aide financière internationale engrangée par le sommet de Bruxelles du 17 novembre 2016 dont le montant s’élève à plus de 2.2 milliards de Fcaf, et des crédits ouverts dans les différentes lois de finances de 2016 à 2020 dont le net en fonctionnement et investissements dépasse 1.000 milliards de Fcfa, Dondra n’a jamais été en mesure de dire au grand public et au peuple centrafricain, l’usage qu’il en a fait, conformément aux dispositions des articles 14 et 15 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1789 à laquelle l’Etat centrafricain a régulièrement souscrit, à savoir :  « Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée », et «  La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration ».

Cinq années durant, il s’est excellé dans l’art de développer des stratégies de mal – gouvernance administrative et financière, de captation, d’accumulation de richesse, par divers truchements. En connivence avec des entrepreneurs affairistes et complices, qui sont devenus de véritables chasseurs de marchés d’État, une bonne partie de l’élite gouvernante a profité des marchés publics, des entreprises et offices d’État et des aides extérieures, pour alimenter des mécanismes de détournement, par la corruption ou par la surfacturation. Au cours de sa gouvernance, la position de pouvoir est assimilée à un droit de prébende, et le gré à gré, la surfacturation au niveau des marchés, leur exécution en deçà des normes acceptables, les commissions à divers intermédiaires 10 % ou plus, ont été érigés en pratiques édifiantes d’un système de corruption solidement ancré dans les mentalités.

Fort de tout ce qui précède, l’homme ne peut pas être neutre à la faillite de l’élite dirigeante actuelle qui incarne l’insécurité, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, les atrocités des mercenaires rwandais et russes du Groupe Wagner, l’exclusion, l’illégitimité, la crise ethnique, inter- communautaire et confessionnelle, l’instrumentalisation des institutions nationales et judiciaires à des fins politiques, la corruption, la crise des valeurs, la disparition de l’école et la pauvreté systémique auxquelles la République et les populations sont confrontées. En sa qualité d’ordonnateur principal du budget général de l’Etat, il a joué un rôle combien important dans le management de la gouvernance de l’Etat et de la sédimentation de la « gouvernementalité du ventre » qui s’est traduit par une routinisation voire une banalisation des stratégies d’accaparement, d’enrichissement illicite et de conservation du pouvoir par tous les moyens, en recourant y compris aux services des mercenaires. Si son prédécesseur est connu de tous comme étant l’homme des mercenaires russes du Groupe Wagner, pour les observateurs avertis de la vie politique centrafricaine, Dondra est celui qui a financé toutes les manifestations et toutes les campagnes de dénigrements orchestrées par Touadéra contre  l’Onu, la Minusca, la France et ses intérêts en République centrafricaine.

 

Imamiah – Imhotep Yamalet

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