Par un décret dûment signé et publié, il y a une semaine, l’Imposteur de Bangui a nommé un directeur de communication / presse au cabinet de la 1ère Dame à la présidence de la République. Seulement, il n’a pas été précisé le nom de l’épouse de laquelle doit relever ce dernier, du fait de ce que l’homme est officiellement l’époux de deux femmes, et qu’en sus il possèderait officieusement des centaines de maîtresses et de milliers de compagnes, tant en Centrafrique qu’à l’extérieur.
Tout naturellement, et comme il est de coutume dans toute société qui se dit et se veut démocratique à l’exemple de la nôtre, cette décision a immédiatement soulevé un tollé dans l’ensemble du corps social. Si pour les communicants du pouvoir, les militants du MCU, les courtisans et les laudateurs, conformément aux dispositions constitutionnelles, Touadéra est le garant de la République, et qu’à ce titre, il dispose de l’administration et peut nommer à des fonctions civile et militaire qui il veut, pour les gardiens du temple, les combattants de la liberté et les promoteurs des valeurs de la bonne gouvernance et de transparence, par contre, cette nomination est non seulement manifestement illégale, mais surtout apparaît comme l’une des preuves les plus irréfragables de la mal – gouvernance qui caractérise la gestion de ce pays par ce professeur de mathématiques, depuis le 30 mars 2016 à ce jour.
En effet, les nombreux textes administratifs pris par les différents régimes qui se sont succédé depuis l’accession de la République centrafricaine à l’indépendance à la tête de ce pays, portant création, organisation et fonctionnement des services de l’Etat à la présidence, n’ont jamais fait mention dans leurs chapitres du concept « 1ère Dame » comme une institution. « Il n’y a pas de statut pour la première dame. C’est la coutume qui l’a consacrée. Dans tous les pays du monde, les épouses des chefs d’Etat créent des fondations dont la vocation est d’intervenir dans le social », souligne d’emblée Paul Kpakpa, commis principal d’administration admis à la retraite depuis une dizaine d’années. Abordant dans le même sens, Docteur El Hadj Oumar Diop, enseignant à la faculté de Droit à l’UCAD, que nous avons joint, ajoute : « Rien n’est prévu pour le statut de la première dame. Il y a une coutume qui fait qu’elle a un statut dans nos sociétés. Pour éviter qu’elle ne s’ennuie, on lui donne une fondation à travers laquelle elle fera du social. Objectivement, il n’y a rien dans les textes. » L’argument du vide juridique statutaire de la première dame est partagé par Samuel Bissafi, maître – assistant au Département de l’Anthropologie à l’Université de Bangui et porte-parole de l’UNDP de Michel Amine. « À ma connaissance, il n’existe aucun texte constitutionnel, législatif ou réglementaire qui accorde un statut particulier aux fondations et autres associations créées par les épouses des chefs d’Etat dans notre pays. » Et celui – ci d’ajouter : « Si ce ne sont des dispositions législatives et réglementaires communes aux organisations non gouvernementales qui régissent leur statut juridique, leur organisation et fonctionnement, leurs droits et obligations ainsi que leur mode de fonctionnement.»
Ainsi donc, la première dame n’a pas de statut et ne doit pas avoir un statut juridique, car un statut juridique ne peut être accordé qu’à un fonctionnaire, un député, un élu entre autres. Mieux, selon les partisans de la bonne gouvernance et de transparence, accorder un statut à la première dame équivaudrait à la reconnaître comme un Institution, alors qu’elle ne l’est pas. Cela est d’autant vrai que la première dame est l’épouse du président, rien de plus parce qu’elle n’est pas élue. C’est une personne privée. Relevant que la première dame ne doit en aucun moment se mêler des affaires publiques, un constitutionnaliste de renom se dit être choqué lorsque certaines épouses du chef de l’Etat se faisaient représenter par tel ministre qui se prononçait à leur nom.
Et justement, depuis la proclamation de la République, nous avons assisté à une stricte observation de cette ordonnance non – écrite, mais acceptée par tous. Même feue Lucienne Lémotomo, épouse de feu président Ange Félix Patassé, député de la nation, qui avait pourtant eu droit à un chauffeur et des agents de sécurité, n’a jamais bénéficié d’un statut particulier au point de se voir affecter un cabinet à la présidence de la République, animé par un directeur de communication placé sous la responsabilité d’un directeur de cabinet. Il en était de même, lorsque l’épouse de l’ancien président François Bozizé Yangouvonda jouissait du statut de député de la nation, détenteur d’un mandat électif.
Ceci dit, le décret pris tout dernièrement par l’Imposteur de Bangui sera une première en la matière. Cependant, dans une société qui se dit et se veut démocratique comme la nôtre, cet acte administratif est outrancièrement irrégulier, du fait de ce qu’il ne repose sur aucun fondement juridique. Mieux, il s’impose comme l’expression la plus palpable de la volonté d’un homme qui a été déclaré élu par l’ANE par seulement 17% du corps électoral à l’issue des catastrophiques élections du 27 décembre 2020, desquelles plus de 300.000 Centrafricains ont été délibérément exclus, et qui a limogé la présidente de la cour constitutionnelle Danièle Darlan afin de réécrire une nouvelle constitution qui lui garantirait une présidence à vie à la tête de notre pays, de faire ce qu’il veut comme il entend et de décider selon ses humeurs, ses intérêts personnels et ceux des siens. Se prenant pour un Caligula jouissant du droit de vie ou de mort sur ses sujets, et s’attribuant les pleins pouvoirs d’un certain Jupiter mais ayant les traits de caractère de Bacchus, cette décision intervient seulement dans un contexte de fortes tensions de trésorerie à telle enseigne que l’on doit s’interroger sur son opportunité et les crédits devant couvrir les dépenses de fonctionnement des services y afférents.
Est – il normal que l’on peut prendre un tel décret, alors que le pays est confronté à une crise financière si aigüe, sans oublier les prises en charge journalières des Faca et leurs supplétifs du Groupe Wagner et rwandais, que les versements de salaires, des pensions et des bourses se font au compte – gouttes, et que les dettes intérieures et extérieures ne cessent de s’amonceler, sans aucune lueur d’espoirs à l’horizon ? Ce Monsieur est tout simplement extraordinaire.
La rédaction