Centrafrique : Mrs le président et les juges du Conseil d’Etat, ça passera ou ça cassera le 8 septembre 2020 !

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Depuis quelques jours, selon de folles et persistantes rumeurs publiques circulant dans la ville de Bangui, parmi les représentants de la société civile, au sein des différents états – majors des partis politiques et même dans les milieux diplomatiques, le président et les juges du conseil d’état sont à la une des causeries et des échanges et font l’objet de critiques particulièrement trop sévères.

Il leur est régulièrement reproché leur refus tacite de rendre public le délibéré de l’audience du 18 août 2020 relative à la saisine en annulation pour illégalité manifeste des décrets n°20.182 du 20 mai 2020 fixant la période d’établissement de la liste électorale en République centrafricaine, d’une part, et n°20.183 du 20 mai 2020 fixant la liste des pays retenus pour la participation des centrafricains de l’étranger à l’élection du président de la République, d’autre part. La goutte d’eau qui a fait déborder le vase, qui provoque la colère de tous et qui justifie de manière irréfutable, selon eux, la volonté des fonctionnaires qui siègent au conseil d’état, à la solde du pouvoir de Bangui, de jouer au pourrissement de la situation et de consacrer in fine les dysfonctionnements de l’ANE, en tant qu’organe technique et non comme une institution fondamentalement constitutionnalisée, est sans aucun doute le report du délibéré au mardi 8 septembre prochain.

En effet, initialement prévu pour le mardi 25 août 2020 suite à l’audience publique du 18 août 2020, le vidé du délibéré dans une affaire hautement sensible qui cristallise de fortes tensions politiques dans le pays entre les pouvoirs publics et toutes les forces vives de la nation du fait de l’illégalité et de l’illégitimité de l’ANE actuelle et dont Mrs le président et les juges du conseil d’état ont été régulièrement saisis en date du 8 juin 2020 par les avocats de certains partis politiques membres de la COD – 2020, conformément aux dispositions de l’article de l’ANE, selon lesquelles « une loi organique détermine la composition, l’organisation et le fonctionnement de l’Autorité Nationale des Elections », n’a pas pu mystérieusement être connu.

Aux dires des avocats de la partie demanderesse, en l’occurrence Me Panda et Me Sombo – Dibélet, leur collègue d’en face, le conseil de la partie défenderesse en la personne du député Dénis Modémadé aurait demandé et obtenu une rallonge de temps nécessaire à la production et au dépôt de ses observations contradictoires. Un laxisme exacerbant et révoltant, selon une large majorité des centrafricains qui ne comprennent pas  ce report, alors que cet avocat a été constitué très tardivement et qu’il avait déjà sollicité et bénéficié de l’indulgence des jurés, suite au décès de sa mère. Un nouveau report qui sent telle une odeur de pet une combine entre les juges et le ministère de la justice dont le patron n’est rien d’autre que l’un des neveux du Gangster de Bangui, et qui ne saurait, de ce fait, être accepté le mardi 8 septembre 2020 par les masses populaires qui s’organisent, se mobilisent et sont déterminées à exprimer à travers des manifestations, tout comme elles l’avaient fait devant l’assemblée nationale quand il s’était agi de contester l’initiative parlementaire de modification de la constitution, contre cette manière de refuser de rendre justice au peuple.

Et les partisans de cette menace à peine voilée à l’endroit de Mrs le président et des juges du conseil d’état, n’ont pas du tout tort, car le président François Mitterrand  avait dit lors d’un conseil des ministres sous la primature de Edouard Balladur : « Méfiez-vous des juges, ils ont tué la monarchie. Ils tueront la République. » Ils ont alors raison de voir dans ces manœuvres de temps qui s’égraine, au rythme des procédures et de report en report,  et s’étiole au gré des humeurs des uns et des autres, sous nos yeux, depuis le 8 juin 2020 à ce jour, une véritable menace pour notre démocratie et l’administration d’une bonne justice, à travers une certaine volonté de la part du président Gbénénoui et ses juges de rendre dans cette affaire un arrêt « au nom du peuple », mais bien honteusement selon les desiderata du pouvoir de Bangui et contre les intérêts du peuple, la vérité et le droit.

Dans ce combat qu’ils semblent nous livrer contre le temps, alors qu’ils ignorent tout bêtement qu’en tant que fonctionnaires de l’état, ils sont au service de l’horloge, et que le peuple, lui, dispose fort heureusement du temps, ne cessent de se révéler tous les jours les invariants qui ont constitué la psychologie et le comportement des hommes et femmes de robes depuis l’avènement du 30 mars 2016. Une permanence que l’on retrouve dans leur attitude corporatiste, jamais frondeuse pour plus de moyens et d’efficacité dans l’exercice de leurs activités, mais toujours servile et serviable à leur hiérarchie, au détriment de la noblesse de leurs fonctions et de leur rôle de justicier dans la société, en la matière, celui du juge administratif, protecteur des libertés.

Depuis quatre années, le conseil supérieur de la magistrature a développé une vision de la justice idéologique et politique. Cette politisation de la justice, plus exactement l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire à des fins de règlements de comptes, par la nomination de son neveu Mbata Flavien au poste de garde des sceaux, a été théorisée dans la fameuse « harangue de Touadéra » qui exhorte les magistrats à juger partialement, à sévir contre le fils du pays opposé au mercenaire venu d’ailleurs, à favoriser le patron contre l’ouvrier, le violeur armé contre la femme violée, l’escroc contre le propriétaire, le médiocre contre le méritocrate, le hors – statut contre le fonctionnaire, l’immigré contre le Centrafricain de souche, le leader d’opinion contre le braqueur, etc.

Par conséquent, au nom de l’Etat de droit, les juges, que les médias appellent les sages qui sont désormais aux ordres, n’ont fait qu’imposer leur idéologie au pouvoir politique et à tout un peuple. Si l’on admet que seul le pouvoir politique est élu par le peuple, en dominant de cette manière le politique, ces juges dictent leurs lois et ce qu’ils pensent  au peuple, et donc foulent aux pieds la démocratie. Quand le conseil d’état se tait, depuis plusieurs mois, plusieurs semaines et plusieurs jours,  sur l’épineuse question de l’ANE, pour défendre contre l’État ceux qui exercent comme commissaires au service d’un vrai dispositif de fraudes électorales pour le compte du régime, on voit bien comment les juges font de la politique au détriment de la démocratie et de la volonté du peuple. L’ironie est qu’ils répètent ainsi le comportement de leurs ancêtres de l’Ancien Régime, les fameux « Parlements » qui avaient empêché le roi Louis XV de réformer le pays, éloignant ainsi la monarchie des aspirations populaires. Ces juges-là se référaient aussi à de vieux textes, datant des rois mérovingiens ou de Charlemagne, leur faisant dire là aussi ce qu’ils voulaient. Ils se mêlaient de tout, de fiscalité, de la famille, ou de l’organisation de l’État. De ces hommes, la République et le peuple n’en ont plus besoin.

Ainsi donc, tout comme il est de notoriété publique que « le conseil d’état est juge en premier et dernier ressort des recours en annulation contre les actes réglementaires pris par le président de la République », en application de l’article 20 de la loi organique n°95.0012 du 23 décembre 1995, et que « le Conseil d’Etat est la plus haute Juridiction de l’Etat de l’ordre administratif », conformément aux dispositions de l’article 115 de la constitution, il est tout aussi urgent pour Mrs le président et les juges du conseil d’état d’entendre l’appel de plus en plus pressant et de plus en plus pesant du peuple centrafricain et de faire leur cette pensée de F. Delpere, « Contrôle juridictionnel et nouvelles protections », AEAP 1983/VI,p.255 : « Dans le domaine des relations complexes qui se nouent entre l’administration et les administrés, il y a place pour des situations conflictuelles. L’Etat de droit est, à cet égard, celui qui n’abandonne pas leur règlement aux interventions du plus fort ou du plus débrouillard. Il est celui qui instaure les procédures qui visent à apporter à ces conflits un dénouement qui réponde non seulement aux impératifs de la légalité mais présente, de surcroît, les vertus de la simplicité, de la célérité et de l’efficacité ».

Ceci étant dit, en réponse à ces mots qui ne sont rien d’autre qu’un simple avertissement, une alerte et un pan de voile levé sur les tensions socio – politiques qui s’amoncellent partout dans les huit arrondissements de la ville de Bangui, les deux communes de Bimbo et Bégoua y comprises, il est plus urgent, afin d’éviter le pire qui se prépare contre eux, que l’ancien ministre Saïd – Panguindji Alain Marius et son collège des juges  puissent enfin se réveiller de leur longue de sommeil et siffler la fin de la récréation. En nous offrant tout simplement la garantie de l’Etat de droit et l’affermissement de la fonction sociale de droit !

 

La rédaction

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