Centrafrique : les prisonniers de la Maison d’Arrêt de Ngaragba obligés de manger les restes des aliments des soldats de la Minusca

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Centrafrique : les prisonniers de la Maison d’Arrêt de Ngaragba obligés de manger les restes des aliments des soldats onusiens

« Les détenus de la tristement célèbre Maison d’Arrêt de Ngaragba n’ont pas mangé depuis plus de quatre jours, à telle enseigne que, face aux sérieuses menaces de soulèvements, les soldats onusiens qui assurent leur garde ont été obligés de leur remettre comme ration alimentaire les restes de leurs plats et ceux de leurs collègues de la Minusca », a révélé le liveur Rodrigue Joseph Prudence Mayté dans l’un de ses lives. Une situation insupportable. « Un traitement cruel, inhumain et dégradant, de la part d’un régime qui tire plaisir à voir pleurer, souffrir, endeuiller et agoniser tout un peuple depuis mars 2016 à ce jour », selon un farouche opposant au régime de Bangui. Alors, à quoi sert – il de priver quelqu’un de sa liberté et ses droits fondamentaux, au nom de la justice ?

Selon des sources proches du ministère des finances et du budget, la raison de ces journées de jeûne forcé s’explique tout naturellement par la rareté de ressources financières, ce qui crée l’impossibilité pour le Trésor public de décaisser et mettre à la disposition du gestionnaire de l’administration pénitentiaire, au ministère de la justice, les fonds indispensables à l’exécution des dépenses de fonctionnement des maisons carcérales. Ainsi donc, les tensions de trésorerie auxquelles le ministre des finances et du budget Hervé Ndoba faisait allusion, il y a aujourd’hui quelques mois déjà, ne sont pas du tout « un piège » comme l’avait affirmé le ministre de la communication et des médias Ghislain Serge Djorie, mais plutôt sont si réelles qu’à l’exemple des maisons d’arrêt, les hôpitaux et l’armée sont aussi privés de leurs dépenses hebdomadaires de fonctionnement. A ce rythme, nous devons nous attendre dans les jours à venir à des mouvements de mécontentements généralisés de la part des détenus, des malades et des militaires qui devront emboîter le pas aux fonctionnaires de la santé, de l’enseignement du Fondamental 1 et 2, des eaux et forêts qui sont en grève depuis le mardi 21 février 2023, et ceux des finances et du budget, des collecteurs d’impôts, dont les arriérés des quotes – parts ne cessent de s’accumuler.

De ce qui précède, il ressort tout naturellement que du fait de la mal – gouvernance, de la corruption, et de nombreux actes de détournements avérés qui caractérisent leur gestion, l’Imposteur de Bangui et les pontes de son régime ne peuvent que tomber sous le coup des dispositions du code de procédure pénale, selon lesquelles « les détenus doivent recevoir une alimentation variée, bien préparée et présentée, répondant tant en ce qui concerne la qualité et la quantité aux règles de la diététique et de l’hygiène, compte tenu de leur âge, de leur état de santé, de la nature de leur travail, et, dans toute la mesure du possible, de leurs convictions philosophiques ou religieuses. » Tout comme ils ont lâché leurs mercenaires russes et rwandais sur les populations civiles qu’ils confondent systématiquement aux combattants de la CPC, tuent, égorger comme des moutons, torturent, sodomisent, violent, pillent, dépouillent de tout, et contraignent même à des déplacements forcés, ils ne se soucieront pas pour autant des pauvres prisonniers de Ngaragba et des détenus de toutes les maisons de privation de liberté en Centrafrique.

Dans ce registre macabre de graves violations de leurs droits, s’inscrit le surpeuplement de la Maison d’Arrêt de Ngaragba, ce qui constitue un sérieux problème pour le respect de la dignité humaine. Car, il y a plus de 3.000 à 4.000 détenus pour une prison construite pour ne contenir que 1.000 détenus. D’où l’obligation de trouver des palliatifs pour solutionner le problème. Un autre défi. Car un Etat démocratique est un Etat qui pense à tous ses enfants, là où ils sont. Les détenus sont des enfants de la République et par conséquent il faut leur donner tous leurs droits. Ils sont punis pour des gestes qu’ils ont commis et qu’ils paient, par conséquent, à la société dans les lieux de privation de liberté. Mais tous les droits afférents à la dignité humaine, le logement, le bien mangé, la santé, une bibliothèque, etc, doivent être pris en compte pour le respect de la personne humaine.

Malheureusement, en sus du droit à l’alimentation qui est aujourd’hui superbement violé, sont aussi bafoués les droits à la visite, à l’approvisionnement en nourriture de l’extérieur, à la santé, à la défense et à des conditions de vie décentes. S’agissant des droits à la visite aux détenus de la Maison d’Arrêt de Ngaragba, ils sont monnayés à hauteur de 250 Fcfa par le personnel de l’administration pénitentiaire. Une véritable cagnotte pour arrondir des fins de mois très difficiles. Une faute lourde dans l’exercice de leurs fonctions en ce sens que ceux – ci vendent les services de l’état à des fins personnelles. Dans une administration normale, la révélation de ces faits aurait dû déjà servir de fond de dossier à l’ouverture d’une enquête administrative, suivie par la soumission des uns et des autres à une réponse au questionnaire avec l’enclenchement de la procédure de suspension de fonctions et de solde pour une durée de trois (3) mois avec traduction devant le conseil de discipline.

Du fait du non – respect de tous ces droits, selon certains détenus, de nombreux d’entre – eux auraient perdu la vie pendant la période de la pandémie du COVID – 19 et au cours des derniers mois dans la prison ; plusieurs détenus auraient aussi contracté des maladies « faute de conditions d’hygiène, de prise en charge médicale et de malnutrition ». Ces allégations qui n’ont pas pu être vérifiées par le Journal Letsunami.net méritent bien l’ouverture d’une enquête de la part de certaines organisations internationales de défense des droits, comme Amnesty International. En attendant que les prisonniers ne puissent se soulever pour réclamer leurs droits, il est urgentissime que ces Ongs réagissent pour sauver des vies humaines et contraindre le régime de Bangui à comprendre que « Tous les détenus à la prison centrale de Ngaragba et dans tous les lieux de privation de liberté en Centrafrique ont le droit à des conditions humaines, y compris avoir accès à de l’eau potable, de la nourriture et des soins médicaux appropriés et communiquer avec leurs familles ; et les individus en détention préventive ont le droit d’être informés des accusations portées contre eux, d’avoir l’assistance d’un avocat, de contester la légalité de leur détention devant un juge et plus largement de jouir du droit de bénéficier d’un procès équitable dans un délai raisonnable ».

La rédaction 

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