Il s’appelle Bernard Logomon. Pasteur et fournisseur de l’Etat, il assumait les fonctions de 3ème vice – président et de porte – parole du Collectif des Petites et Moyennes Entreprises de Centrafrique « CPMEC ». Après une courte maladie ayant nécessité son hospitalisation à l’hôpital communautaire de Bangui, il s’est éteint le lundi de Pâques vers 14 heures. Selon les informations fournies à la rédaction par ses anciens collaborateurs et les témoignages recueillis auprès de sa propre famille, l’homme a piqué une crise de nerfs qui lui aura finalement été fatal, suite aux maintes promesses non – tenues par un certain Koyangbanda Stéphane Yannis, ci – devant agent central comptable technique à la direction générale de la comptabilité publique et du trésor, de payer ses créances dont le montant s’élèverait à 12 millions de Fcfa, et celles de tous les opérateurs économiques, membres du CPMEC.
En effet, depuis le départ de Marie – Henri Dondra de ses fonctions de ministre des finances et du budget, il a fallu plusieurs gymnastiques pour que lui et ses collègues du bureau du CPMEC pussent obtenir une audience auprès de son successeur, un certain Hervé Nboba, communément appelé « Le Brouteur d’Abidjan » du fait de son parachutage à la tête de ce département plus technique et fermé à des arrivistes. Ce jour – là, le jeudi 9 février 2023, celui qui ignore tout de l’univers des petites et moyennes entreprises, de leur place dans l’économie nationale, de leurs multiples difficultés et de leurs prometteuses perspectives d’avenir dans toute société qui se dit et se veut démocratique, et qui, de ce fait, est complexé vis – à – vis de leurs représentants, a finalement opté pour la mise à leur disposition, mensuellement et à compter du mois de février 2023, d’une enveloppe globale de 380 millions de Fcfa, en vue de permettre un apurement progressif de leurs créances nettes et exigibles, restées impayées sous la gouvernance de Dondra.
Seulement, cette promesse n’a jamais été honorée. Mais, à défaut d’être reçus et régulièrement notifiés des raisons de fait qui justifieraient la non – exécution des engagements pris par l’ordonnateur principal du budget de l’Etat qui se trouve être le ministre des finances et du budget, les représentants du CPMEC ont plutôt été faits balader, pendant plusieurs jours, par le nouveau directeur de cabinet Wamata Yambouka, le chef du réseau des quittanciers parallèles, et l’ancien agent central comptable technique Koyangbanda Stéphane Yannis, surnommé M. 30%. C’est donc après une dernière rencontre infructieuse avec ce dernier qui leur avait déclaré qu’il n’avait pas encore reçu leurs dossiers avec des instructions précises de règlement, le jeudi 6 avril 2023, que le 3ème vice – président du CPMEC Logomon Bernard aurait psychologiquement craqué pour être conduit dare – dare à l’hôpital communautaire, d’où il ne ressortira plus.
Tout naturellement, dès l’annonce de son décès, c’est l’émoi au ministère des finances et du budget, en général, et au cabinet du ministre des finances et du budget, en particulier. Informé plus tard de cette disparition, l’ordonnateur principal des dépenses de l’Etat instruit son directeur de cabinet Wamata Yambouka, non pas d’ordonner la mise en exécution de sa promesse, celle d’affecter une enveloppe de 380 millions de Fcfa au paiement des créances dues aux fournisseurs de l’Etat, mais plutôt de lui demander de procéder à la sélection de douze (12) entreprises pour une éventuelle programmation, avant la cérémonie des obsèques de la dépouille mortelle de Logomon Bernard. Voilà une décision qui s’apparente fort étrangement à un acte présumé de discrimination et de flagrantes violations du noble principe d’égale admissibilité de tous devant les charges publiques. Pourquoi donc ne pas demander, au nom des nobles valeurs de la bonne gouvernance et de transparence, au bureau du CPMEC de faire parvenir à son cabinet une liste de douze (12) fournisseurs de l’Etat à payer ? Sans le vouloir, le parachuté d’Abidjan, celui qui n’est passé nulle part dans une école de régies financières, ni à l’Ena de Paris, ni à l’Iiap, ni à Neuilly – sur – seine et ni à Clermont-Ferrand, trahit sa prédisposition d’esprit à ne payer que les fournisseurs de l’Etat qui sont affiliés au MCU et les privilégiés du régime, depuis l’accession de l’Imposteur de Bangui au pouvoir en 2016 à ce jour, et donne raison, par conséquent, au directeur de Human Rights Watch Lewis Mudge, dans son dernier Rapport, selon lequel la République centrafricaine fait face actuellement à un rétrécissement de l’espace politique, civique, et médiatique.
Et, il a parfaitement raison. En effet, des gouvernements qui se sont succédé à celui du plus Grand Voleur de la République Félix Moloua, du fait de son refus systématique et systémique de rendre compte de sa gestion des promesses de dons d’un montant de plus de 2 milliards de dollars, alloués par les bailleurs de fonds, le 17 novembre 2016 à Bruxelles, il n’y a que quatre à huit fournisseurs de l’Etat qui sont régulièrement programmés et payés. Non seulement, ils font main basse sur l’essentiel des crédits ouverts dans les différentes lois de finances, par le mode de contrat de gré à gré, mais surtout ils sont payés sans que les objets de leurs créances n’aient été préalablement réalisés, certifiés et validés par les organes de contrôle a posteriori. Leur dénominateur commun, c’est l’appartenance à la famille présidentielle et une certaine proximité directe ou indirecte avec le parti – Etat dénommé le MCU dont ils sont les gros contributeurs financiers. Le plus célèbre d’entre eux se prénomme Crépin ; gros de forme, administrateur – gérant de l’entreprise GECPT, c’est lui qui avait salué, des serviettes de toilette sur les épaules, l’Imposteur de Bangui lors d’un de ses retours à l’aéroport International Bangui M’Poko, dont les images ont fait du buzz sur les réseaux sociaux.
Alors que les communicants du régime rapportent qu’en marge des travaux des assemblées annuelles du FMI et de la BM, le ministre des finances et du budget Hervé Ndoba a rencontré, le 16 avril 2023 à Washington, le vice – président de la BM M. Pimenta, et échangé sur le rôle du secteur privé dans le développement de la RCA, le non – paiement régulier et transparent des dettes intérieures risque de constituer un blocage aux probables soutiens de cette institution financière internationale à notre pays dans les domaines de l’agribusiness, l’inclusion financière & le numérique. Cela est d’autant plus vrai que depuis l’achèvement de la quatrième revue de l’accord au titre de la Facilité Elargie de Crédit (FEC) en faveur de la RCA qui avait permis le décaissement de 22,84 millions de DTS (environ 32,1 millions de dollars), ce qui avait porté le total des décaissements au titre de l’accord à 88 millions de DTS (environ 123,7 millions de dollars), les règlements des créances nettes et exigibles n’ont été faits qu’au compte – gouttes et selon des critères opaques et non – transparents du choix des bénéficiaires.
L’opération de paiement n’a pas été à la hauteur des attentes, selon un ancien président du CPMEC qui a préféré requérir l’anonymat. Il est loin d’être satisfait. « Nous sommes insatisfaits parce qu’on attendait que la dette intérieure, en ce qui concerne les membres du CPMEC, dont le montant s’élève à plus de 5 milliards, reconnue par le gouvernement, soit payée totalement. Malheureusement, elle n’ a même pas été payée partiellement, conformément à une liste dressée par le Collectif. Seulement quatre à huit opérateurs économiques qui sont affiliés au parti MCU sont payés toutes les semaines. Alors, à ce rythme, nous ignorons comment ils vont faire avec le reste pour relancer l’économie », se lamente-t-il.
D’après ce responsable syndical, dans les conditions actuelles, il serait difficile de relancer l’économie centrafricaine plombée depuis 2013 par la crise militaro – politique de la Séléka, la pandémie du Covid – 19 et aujourd’hui avec la chute des cours du pétrole, suite à la guerre en Ukraine. « On ne peut pas relancer l’économie nationale maintenant. Car, nous payons chaque année nos impôts, versons les cotisations à l’OCSS et sollicitons la délivrance du certificat de régularité fiscale, mais nous n’obtenons jamais de marché, ni par voie de cotation, ni par la procédure d’appel d’offres qui n’existe plus que de nom. Tout est fait pour que l’essentiel des crédits de fonctionnement et d’investissement ouverts dans chaque budget de l’Etat soient totalement alloués par des modes opaques et non – transparents à l’entreprise GECPT dont l’administrateur – gérant s’appelle Crépin, cousin du président Touadéra et ses amis de l’entreprise Likoda et Autres. C’est seulement eux qui obtiennent les marchés et qui sont payés, même si aucune réalisation n’est faite. Comment alors peut – on relancer l’économie centrafricaine avec seulement quatre à huit entreprises qui ne disposent même pas de local et de bureau », se désole – t – il.
Pour finir, les fournisseurs de l’état craignant que les créances non payées n’augmentent davantage le stock de la dette et qu’ils ne soient jamais rentrés en possession de leurs droits, appelleraient désormais dans les jours à venir à l’implication de l’Imposteur de Bangui dans la résolution définitive de leur situation. « Nous allons solliciter l’arbitrage du chef de l’État, en tant que père de la nation, afin qu’il puisse instruire une programmation générale, question de soulager le secteur privé. On dit que le secteur privé est le moteur de la croissance car il génère les recettes fiscalo-douanières, puis permet de payer les pensions de retraite, les salaires des fonctionnaires et les bourses des étudiants. Si les grands pays se sont développés grâce au secteur privé, il est grand temps qu’il nous reçoive dans les meilleurs délais, car on meurt toujours au présent », a conclu un opérateur économique que notre reporter a croisé au Bar du député Mathurin Massikini, dans le 2ème arrondissement de la ville de Bangui.
Comme nous pouvons tout aisément le constater, fort de tout ce qui précède, des hommes et des femmes qui payent annuellement leurs impôts, versent des cotisations à l’OCSS et font face à des charges mensuelles de fonctionnement et qui, de ce fait, portent à bout de bras la République et la font vivre, ne peuvent plus vaquer à leurs occupations quotidiennes et vivre de leur travail. Du fait du rétrécissement de l’espace politique et civique, ils sont humiliés, abandonnés à leur triste et meurent même dans un dénuement total, laissant derrière eux leurs créances, le fruit de leur dur labeur. C’est ainsi que le Pasteur Logomon Bernard a craqué et s’en est allé définitivement, laissant derrière lui une créance d’un montant de 12 millions de Fcfa, ne pouvant plus accepter d’être humilié tous les jours par des promesses non – tenues par Hervé Ndoba, le « Brouteur d’Abidjan », Wamata Yambouka, le chef du réseau des quittanciers parallèles et Stéphane Yannis Koyangbanda, M. 30%. Avant Logomon, un autre fournisseur de l’état, le nommé Hyacinthe Payombo, était parti dans les mêmes conditions, exténué d’aller et revenir, laissant aussi derrière lui toutes ses créances impayées.
Ainsi va la vie des fournisseurs de l’état dans le Royaume de Mandjo où les 5 millions d’habitants sont plus qu’asservis sur leur propre terre, celle de leurs aïeux et celle de leurs ancêtres par un homme et ses ouailles.
La rédaction