Centrafrique : la lettre de Karim Méckassoua au président de l’assemblée nationale française Richard Ferrand

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RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Unité-Dignité-Travail

ASSEMBLÉE NATIONALE

Bangui, le 22 Décembre 2020

Abdou Karim MECKASSOUA Ancien Président de l’Assemblée Nationale, Député du 3ème Arrondissement de Bangui Assemblée Nationale Bangui, République Centrafricaine

À

Monsieur Richard FERRAND Président de l’Assemblée Nationale 126 Rue de l’Université, 75007 Paris, France

Monsieur le Président,

Ce qui se dit au Palais Bourbon s’entend à Bangui. Les mots qu’un député de l’Assemblée nationale française prononce à Paris ont un écho jusqu’ici. Les mots du député Sébastien Nadot ont suscité une bruyante incompréhension. Respectueux de la République Française, ses règles, son éthique, ses procédures, je ne peux envisager l’ignorance de cet élu et m’interroge donc sur l’origine des manœuvres qui l’ont conduit à prononcer de tels propos diffamatoires. Plus incompréhensible, il s’agit de propos attentatoires au calme requis par le processus électoral centrafricain déjà menacé.

Ce député écrivait, je cite «…la France cherche à préserver son influence, notamment en soutenant M. Karim Meckassoua, ancien président de l’Assemblée nationale de Centrafrique, pourtant lui-même fortement impliqué dans des scandales de corruption et de mauvaise gestion des ressources publiques. » Je tiens à m’adresser à vous en toute confiance mais avec franchise, au nom de l’amitié profonde entre les peuples français et centrafricain.

Vous le savez, j’ai présidé le Parlement de mon pays et considère comme un devoir de vous confier mon grand étonnement à la suite de la démarche de Monsieur le député Sébastien Nadot. Tenant compte du principe de la séparation des pouvoirs, je ne doute pas que le Gouvernement français fera connaître sa position en ce qui concerne la politique extérieure de la France.

Comprenez, Monsieur le Président ma surprise et ma tristesse en découvrant les mots d’un parlementaire français, qui prétend par sa déclaration connaître la vie politique centrafricaine. Des mots inappropriés, des polémiques qui tintent comme un verdict à l’approche d’une échéance électorale majeure pour l’avenir de la République centrafricaine.

En me mettant gravement en cause, en jetant mon nom en pâture, M. Sébastien Nadot bafoue mon honneur et la vérité, solennellement énoncée par la Cour des Comptes centrafricaine qui m’a fait droit de toutes les accusations injustement portées contre moi. Pourquoi donc cette entreprise délibérée de diffamation ? D’ailleurs, est-il normal qu’un député d’un pays ami se laisse ainsi aller inconsidérément à condamner des comportements qu’il prête à son propre pays, alors que sa démarche témoigne précisément de la même attitude? Car, au-delà des mots proférés à l’égard de ma personne, objets de ma protestation, permettez que je m’élève avec force contre ce qui est reçu comme une véritable ingérence dans les affaires intérieures de mon pays.

Les termes choisis par M. Nadot réactualisent une françafrique préjudiciable que certains élus ne peuvent extirper de leur esprit et de leur approche de la vie politique dans un pays africain. Par amitié pour la France, j’attache du prix à modérer ma réaction, mais je ne peux dissimuler au Président de l’Assemblée nationale d’un grand pays démocratique, mon amertume, ma sidération, mon sentiment de colère. Surtout ma profonde déception et mon immense tristesse. J’attendais mieux, j’attendais plus d’un élu de la Nation française qui reste un modèle pour mon pays.

Je vous serais reconnaissant, Monsieur le Président de bien vouloir me confier votre sentiment sur les termes employés par M. Nadot et me faire connaître votre décision concernant le rappel au respect d’un parlementaire d’un pays ami, tourmenté par des dissensions intérieures, qui lutte pour le rétablissement de la démocratie. Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’assurance de ma confraternité parlementaire et de ma très haute considération.

Abdou Karim MECKASSOUA

Ampliation : Présidents des groupes d’amitié parlementaire entre la République Centrafricaine et la FRANCE. Monsieur Laurent Ngon Baba Monsieur Franck Urbain Saragba Monsieur Thomas Gassilloud

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