Centrafrique : « Fonds saoudien » : Moloua a résilié les contrats relatifs aux travaux de réhabilitation de la piste d’atterrissage et du bitumage de l’axe PK 0 à l’aéroport international Bangui M’Poko

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Le ministre de l’économie, du plan et de la coopération internationale Félix Moloua, ordonnateur du fonds saoudien, a été finalement contraint de mettre un terme aux contrats relatifs aux marchés des travaux de réhabilitation de la piste d’atterrissage et du bitumage de la route PK 0 menant à l’aéroport international Bangui M’Poko. Etaient adjudicataires de ces juteux marchés les sociétés DEC et TREISHMEN, de nationalité sud – africaine, pour un coût total de 7.500.000.000 de Francs CFA dont le délai d’exécution était fixé à six (6) mois, c’est à – à – dire au plus tard fin de l’exercice budgétaire 2018.

Mais plus d’une année plus tard, après plusieurs lettres infructueuses d’avertissement, de moratoire et de sommation, les entrepreneurs, fatigués d’être triturés, palpés et pressés jusqu’à la dernière goutte, d’une part par le ministre et son clan, et d’autre part par les membres des bureaux d’études en charge du contrôle et suivi des chantiers, et ce, pour des questions de rétro – commissions, ont fini par jeter l’éponge. Face à cette si triste et honteuse situation, M. Moloua a été obligé, suite à des échanges avec la délégation saoudienne venue tout récemment en mission de revue à Bangui, de prendre cette décision et de procéder dans les meilleurs délais au lancement de nouveaux avis d’appel d’offres.

Si le ministre de l’économie, du plan et de la coopération internationale semble se réjouir du choix de cette décision avec la bénédiction et une certaine générosité de la part des partenaires saoudiens, mis en réalité devant le fait accompli, l’opinion nationale et tout citoyen centrafricain doivent s’interroger sur les raisons ayant sous – tendu à son adoption. A dire vrai, la résiliation de ces contrats n’est que la conséquence directe de la non – application des dispositions de la loi n°08.017 du 06 juin 2008 portant code de marchés publics et délégations de service public en République centrafricaine, suivie de l’institutionnalisation des pratiques irrégulières de corruption et de monnayage de l’octroi de ces alléchants marchés ; ce qui est grave pour un haut fonctionnaire de l’Etat, notamment un membre du gouvernement.

Au – delà donc de cette formule trouvée, n’en déplaise à tous les thuriféraires du régime, il faut souligner et noter avec force que, de ce fait et par ce fait même,  ce dernier a fait preuve dans l’exercice de ses fonctions de trop de légèreté, de trop de négligence, et  d’une certaine incompétence notoire, en ignorant superbement les règles de procédures d’exécution des marchés publics, formellement définies et consacrées par la loi précitée, et pis, en usant de ses prérogatives d’ordonnateur de ce fonds pour assouvir ses propensions inouïes à la cupidité et à la corruption, au détriment de l’intérêt général.

A cet effet, l’assemblée nationale non seulement doit se saisir dans les meilleurs délais de ce dossier et de tous les autres marchés dont il est l’ordonnateur, à savoir le projet de construction d’un centre médical d’imagerie et de l’hémodialyse et celui de l’interminable chantier de l’axe Baoro – Bouar dont l’exécution des travaux peine depuis plusieurs années, mais surtout l’interpeller publiquement, exiger son limogeage du gouvernement et l’ouverture des poursuites judiciaires à son encontre.

Sur ce, afin que nul ne l’ignore et au nom du droit du peuple et de la postérité à la vérité, nous avons jugé utile de revenir sur l’article que nous avons publié à ce sujet en mai 2019 :

« Centrafrique : « Affaire de l’aide saoudienne de 7.500.000.000 de Fcfa » : M. Dondra et M. Konzi, que s’est – il passé ?

Le 30 avril 2019, dans la salle de son cabinet, le ministre de l’économie, du plan et de la coopération internationale, M. Félix Moloua, assisté de son collègue des transports et de l’aviation civile, M. Arnaud Djoubaye Abazène, en la présence d’une délégation du Fonds Saoudien pour le Développement en mission à Bangui, et des représentants des deux entreprises en charge d’exécution des deux  marchés publics,  à savoir DE CET TREISHMEN, a décidé de suspendre, de manière spectaculaire et à la grande surprise de tous, les travaux de réhabilitation du tronçon PK0 jusqu’à l’aéroport international Bangui Mpoko et ceux du bitumage du tarmac. Motif : non – respect du délai d’exécution par les sociétés adjudicataires.

Pour rappel, et ce, afin que nul n’ignore, les réalisations de ces deux marchés sont inscrites dans un accord de prêt d’un montant de 39 milliards de Fcfa signé le 23 décembre 2015 à Bangui, entre la ministre de l’économie, du plan, de la coopération internationale et des pôles de développement, Mme Florence Limbio et le directeur général du Fonds Saoudien pour le Développement.

L’objectif de cet important accord de financement visait à lancer la mise en œuvre de 11 projets de développement pour la période de 2015-2018 afin d’assurer aux citoyens des services de santé et d’éducation, la relance du processus économique et social ainsi que le maintien de la stabilité, à la suite des conséquences néfastes des crises que le pays a connues dans tous les secteurs. Dans les détails, ce prêt, qui bénéficie de conditions concessionnelles, devrait permettre de réhabiliter 66 centres de santé à Bangui et dans les villes de provinces, construire une clôture autour du Lycée Marie-Jeanne Caron et le doter d’équipements,  des amphithéâtres à l’Université de Bangui et une clôture autour du domaine universitaire. Il était également question de renforcer la production de l’électricité à Bangui et éclairer les rues, réhabiliter la piste d’atterrissage de l’aéroport Bangui M’Poko, pour lui permettre de répondre aux standards internationaux, et exécuter les travaux du bitumage de l’axe reliant le centre-ville, du point zéro à l’aéroport Bangui M’Poko, et remplacer 51 kilomètres de tuyau métallique du réseau de la Société de Distribution d’Eau en Centrafrique (SODECA) en tuyaux plastiques.

Selon le plan de consommation de ces fonds établi de part et d’autre, l’exécution de ces deux marchés devait conditionner la mise à disposition de l’Etat centrafricain de nouveaux décaissements  destinés à la réalisation d’autres projets. C’est ainsi que, conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi n°08.017 du 06 juin 2008 portant code de marchés publics et délégations de service public en République centrafricaine, consacrant formellement le principe de la commande publique ou d’appel d’offres, les sociétés DEC et TREISHMEN ont été respectivement déclarées adjudicataires ou titulaires des travaux du bitumage du tarmac et de réhabilitation de la route PK0 jusqu’à l’aéroport international Bangui – Mpoko, pour un coût total de 7.500.000.000 de Francs CFA. N’ayant pas pu avoir accès aux copies des dossiers d’appel d’offres et des contrats dûment signés entre les différents contractants, nous ne pouvons pas à ce niveau du débat énoncer avec exactitude les délais d’exécution prescrits desdits travaux. Toutefois, ceux – ci ne sauraient dépasser, selon des informations dignes de foi en notre possession, un délai de 6 mois afin de permettre le déclenchement d’autres projets dont l’expiration était prévue pour fin 2018.

Alors pourquoi ces travaux n’ont – ils pas été exécutés comme initialement prévus ? Quels étaient les obligations et les droits des titulaires de ces marchés et du maitre d’ouvrage ou maître d’ouvrage délégué ? Des dispositions administratives communément appelées cahiers des clauses administratives particulières ou des dispositions techniques nécessaires à l’exécution des prestations ou cahiers des clauses techniques particulières, ont – elles été régulièrement  prises ?  Quid des mécanisme du règlement de ces marchés et des garanties de bonne exécution ?

Voilà autant de pertinentes questions qui méritent bien de sérieuses et plausibles réponses, non pas de la part du ministre de l’économie, du plan et de la coopération internationale, M. Félix Moloua, et de son collègue des transports et de l’aviation civile, M. Arnaud Djoubaye Abazene, mais plutôt auxquelles doivent impérativement répondre sans ambages et sans fioritures le ministre des finances et du budget, M. Henri  Marie Dondra, et surtout le directeur général des marchés publics, un certain Alain Modeste Konzi.

Car, devant la gravité de cette affaire, celle d’un prêt de plus de 7.500.000.000 de Fcfa, c’est – à – dire remboursable par les générations futures, qui devait servir à la réalisation de deux marchés publics, mais qui s’est évaporé par enchantement dans la nature sans que l’objet de la dépense n’ait été préalablement effectué et que la créance n’ait été jugée nette et exigible, il s’agit ici de la responsabilité première du grand argentier de la République et celle de son parent, inspecteur des impôts, dépourvu de toute connaissance en techniques et procédures de passation de marchés publics qu’il a fait tout de même nommer à la tête de la DGMP. Cette responsabilité qui tire indubitablement toute sa substance de la politique d’assainissement des finances publiques et de la lutte contre la corruption et la mal – gouvernance administrative et financière qui caractérisaient la gestion des crédits et des fonds publics, affectés et disponibles chaque année dans la loi des finances, est définie par les dispositions des articles 2, 3, 4 et 5 de la loi n°08.017 du 06 juin 2008 portant portant code de marchés publics et délégations de service public en République centrafricaine. Depuis la promulgation de cette loi, et faisant suite à la demande pressante des différents partenaires financiers internationaux de la République centrafricaine, au premier rang desquels la BAD, qui militaient en faveur de la bonne gouvernance et de la transparence et  conditionnaient de ce fait l’octroi de leurs appuis techniques et financiers à la mise en œuvre d’une politique de sécurisation des recettes de l’Etat, des mesures courageuses ont été engagées par la République centrafricaine, dans les années 2007 – 2008, pour l’amélioration sensible du niveau des ressources fiscalo – douanières et la maîtrise des dépenses publiques.

C’est ainsi qu’en application des engagements solennellement pris vis – à – vis de ces bailleurs de fonds, désormais  la gestion « des marchés publics et des délégations de service public conclus par l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics, les agences, personnes morales assimilées à la qualité d’organisme de droit public, bénéficiant notamment du concours financier ou de la garantie de l’Etat, les sociétés d’Etat, les sociétés à participation financière publique majoritaire et les associations formées par une ou plusieurs de ces personnes morales de droit public » est régie par cette loi et relève de la compétence de la direction générale des marchés publics, placée sous l’autorité directe du ministère des finances et du budget.

Pour être efficace et atteindre ses principaux objectifs budgétaires que sont la gestion rigoureuse des crédits et des fonds publics, par le respect scrupuleux des procédures de passation de marchés publics, la discipline budgétaire et l’allocation stratégique des ressources, des dispositions légales, réglementaires, administratives et techniques ont été prises et des contrôleurs financiers, tous grades confondus, ont été désignés et formés grâce aux appuis matériels et financiers de la BAD et autres partenaires à la maîtrise des techniques et des procédures de passation des marchés publics. En leur qualité de juges par excellence du contrôle de la régularité budgétaire,  de conseillers et d’informateurs du ministre des finances et du budget, ils devaient non seulement servir de pionniers à la mise en place et à l’opérationnalisation de cette nouvelle direction générale, et jouer le rôle de vulgarisateurs de cette loi et de son contenu par les ordonnateurs, les administrateurs et les gestionnaires des crédits, mais surtout veiller, en tant que gardiens du contrôle a priori des engagements des dépenses de l’Etat, de la légalité, de la matérialité, de l’opportunité, de l’exactitude et de l’imputabilité, à son stricte application, sous peine de préjudice de sanctions disciplinaires et pénales prévues par les lois et règlements en vigueur.

Fort de ce qui précède et s’agissant de cette affaire de 7.500.000.000 de Fcfa dont l’objet porte sur l’exécution des travaux de réhabilitation du tronçon PK0 et du bitumage du tarmac de l’aéroport international Bangui – Mpoko, la direction générale des marchés publics se devait de prendre toutes les dispositions pour une observation rigoureuse des termes de l’article 2 de cette loi, nous citons : « Les procédures de passation des marchés publics et des délégations de service public, quel qu’en soit le montant, sont soumises aux principes suivants : –  le libre accès à la commande publique ; – l’égalité de traitement des candidats ; – l’économie et l’efficacité du processus d’acquisition ; – la transparence des procédures, et ce à travers la rationalité, la modernité et la traçabilité des    procédures. Sous réserves des dispositions visées aux articles 26 alinea 5 et 64 de la présente loi, il est interdit toute mesure ou disposition fondée sur la nationalité des candidats de nature à constituer une discrimination à leur encontre. L’Etat et les autorités contractantes, s’engagent à ce que la participation d’un soumissionnaire qui est un organisme de droit public à une procédure de passation de marché public ou de délégation de service public ne cause pas de distorsion de concurrence vis-à-vis des soumissionnaires privés.  La participation d’un organisme de droit public aux procédures de passation pour l’obtention d’un marché public ou d’une délégation de service public est subordonnée à une carence effective de l’initiative privée. Cette faculté doit être prévue dans le dossier d’appel d’offres ».

Or, selon des informations en notre possession, la direction générale des marchés publics aura brillé par une négligence manifestement notoire dans la gestion de ces marchés combien importants, avant, pendant et après. C’est cette absence de la DGMP dans les différentes étapes de la procédure de passation de ces marchés qui a permis la mise en place par le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre des mécanismes opaques et douteux de mode de règlement ou plutôt d’extractions frauduleuses de fonds publics, sans que l’objet de la dépense n’ait été réalisé et que la dépense n’ait été revêtu du caractère d’exigibilité, incitant ainsi le gouvernement à commettre un acte de doublon, en sollicitant une nouvelle aide à la BDEAC pour la réalisation de la même dépense et mettant le ministère de l’économie, du plan et de la coopération internationale dans l’urgente inconfortabilité d’opter purement et simplement pour la suspension de  l’exécution desdits travaux.

Il va de soi que nous sommes donc en l’espèce, c’est – à – dire dans le cadre de cette affaire, face à un acte de faux et usage de faux et de détournement de fonds publics en bande organisée. Encore un grand scandale financier dans laquelle se trouvent engagées d’abord la responsabilité du ministère des finances et du budget et de la DGMP, ensuite celle du ministère de l’économie, du plan et de la coopération internationale et du ministère des transports et de l’aviation civile et enfin celle de tous les élus de la nation qui observent un silence assourdissant depuis le déclenchement de cette affaire.

Alors M. Dondra et M. Konzi, avant que M. Moloua et M. Djoubaye ne puissent  donner leurs versions des faits, dites au peuple centrafricain toute la vérité sur ce qui s’est réellement passé dans la gestion de cet important prêt, remboursable par le peuple centrafricain et les générations futures, mais dont ils n’auront jamais été bénéficiaires ! Jean – Paul Naïba. »

La rédaction

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