CENTRAFRIQUE : CRISE PARLEMENTAIRE: LES TRACTATIONS POUR LE VOTE DU NOUVEAU BUREAU DE L’ASSEMBLÉE RÉVÈLENT DES CHOSES TERRIBLES ET INACCEPTABLES

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CENTRAFRIQUE : CRISE PARLEMENTAIRE: LES TRACTATIONS POUR LE VOTE DU NOUVEAU BUREAU DE L’ASSEMBLÉE RÉVÈLENT DES CHOSES TERRIBLES ET INACCEPTABLES

Par Damoclès DIRIWO

 

       Ce qui se passe actuellement au sein de l’Assemblée nationale centrafricaine, la 7ème législature, est l’expression de l’inconsistance, l’incohérence, la légèreté et l’immaturité qui caractérisent certains élus de la nation que l’on appelle députés mais qui sont tout sauf les deux qualificatifs suivants: honorables et patriotes. Nous en voulons pour preuve les tractations en cours pour le renouvellement partiel du bureau de l’Assemblée nationale, tractations dont les auteurs qui se prennent pour des super députés ont péché en pensée, en parole, par stratégie et par omission. Et pour cause.

Le bureau de la 7ème législature est rempli des grands gourmands de la République, des gens qui ne pensent qu’à eux-mêmes, à leurs intérêts égoïstes, au point de concentrer sur eux seuls les principaux postes de responsabilités parlementaires à l’interne et à l’extérieur du pays. Constitués en une oligarchie cupide, ces députés d’un genre nouveau ont aussi le monopole des missions à l’extérieur.

Certains sont soupçonnés d’actes de détournement ou de dilapidation de certaines lignes budgétaires de l’Assemblée nationale à hauteur de centaines de millions de F CFA qu’ils se partagent comme des morceaux de pain une fois que les appels de fonds lancés au trésor public leur apportent sans tarder des espèces sonnantes et trébuchantes avec lesquelles ils construisent des hôtels, des villas et maisons de haut standing, se dotent des véhicules dernier cri, et s’offrent des luxes insolents dans un pays où l’écrasante majorité de la population ploie sous le poids de la misère noire.

Grands menteurs et démagogues, ils font toujours croire que c’est le président Faustin Archange Touadéra qui inspire toujours les décisions qu’ils prennent au niveau de l’Assemblée nationale, y compris même pour détourner les lignes budgétaires de l’institution ou pour vivre dans la corruption active ! Le président de l’Assemblée nationale Simplice Mathieu Sarandji a beau s’offusquer qu’on l’accuse d’avoir encaissé 30 millions de F CFA d’une société minière chinoise désireuse d’avoir rapidement l’autorisation du parlement pour obtenir un permis de recherche et d’exploitation des pierres précieuses, il a beau annoncer son intention de saisir la justice à propos pour que son honneur soit lavé par rapport à cette grave accusation portée contre lui par une partie de l’opposition démocratique centrafricaine, mais une chose est sûre: son entourage immédiat et la plupart des membres de son bureau qui se targuent d’être les défenseurs du régime, ne jouissent pas d’une bonne moralité. Leur gestion de la chose parlementaire laisse à désirer.

Et si on remonte un peu loin dans le passé de certains par rapport à ce qu’ils ont été ou ont fait comme profession avant de devenir députés, il y’a de quoi dire que l’équipe parlementaire qui doit être renouvelée le lundi prochain ne lui a pas rendu service ni au pays, ni à l’institution parlementaire qu’ils représentent tous. Qui sont ces gens là ?

 

DES GENS CUPIDES ET INSATIABLES

 

On les reconnait par les faits suivants: cumul des fonctions parlementaires, excès de missions à l’étranger, et volonté de rester dans le bureau de l’Assemblée nationale sous le fallacieux prétexte que c’est le chef de l’Etat Pr Faustin Archange Touadéra, président fondateur du parti MCU qui aurait décidé ainsi. Ils vont même jusqu’à insinuer que le président Touadéra va dissoudre l’Assemblée nationale et renvoyer tout le monde à de nouvelles élections législatives si ce ne sont pas eux qui sont élus ou réélus aux différents postes du bureau de l’Assemblée nationale. Quel mensonge ! Quelle hérésie !

Qui veulent-ils tromper alors que même des Centrafricains qui n’ont jamais été à l’école connaissent le principe de la séparation des pouvoirs par lequel l’exécutif ne doit pas s’ingérer dans les affaires de l’Assemblée nationale notamment en ce qui concerne le choix des hommes et des femmes devant occuper des postes de responsabilités, et vis versa. Les auteurs d’un tel grossier mensonge sont tombés  très bas et sont indignes d’être des représentants du peuple.

Il n’y a que des gens de mauvaise moralité entretenue qui sont capables d’un tel mensonge et d’une telle hérésie, et on comprend pourquoi parmi eux il y a des défroqués: l’Eglise avait raison de les chasser du clergé comme des malpropres ! De malpropres religieux, ils sont devenus des malpropres politiques, toute honte bue.

Des cumulards sans blague font croire au niveau de l’Assemblée nationale que c’est le président Touadéra qui voudrait qu’ils soient ou redeviennent ceci:

1er vice-président: Evariste Ngamana, député MCU de Carnot 1 (Mambéré-Kadéï), premier vice-président sortant de l’Assemblée nationale, cumulativement avec ses fonctions de président du groupe parlementaire MCU, président du groupe d’amitié RCA-Chine, député communautaire (de la CEMAC), vice-président du parlement CEMAC, président du Comité de suivi des entreprises et offices publics dissouts, un des représentants de l’Assemblée nationale au dialogue républicain. Tout ça pour lui seul ! Comme s’il n’y avait pas d’autres députés capables d’assumer chacune des multiples fonctions qu’il concentre. Et il veut être réélu 1er vice-président en mentant au nom du chef de l’Etat qui est son beau !

2ème vice-président: Jean Sosthène Dengbè, député MCU de Berberati 1 (Mambéré-Kadéï), président de la Commission défense et sécurité de l’Assemblée nationale. Que cherche-t-il encore? Ce professeur de collège n’est-il pas déjà bien servi jusqu’à ce niveau?

3ème vice-président: André Nalké Dorogo, député de Berberati 4 (Mambéré-Kadéï), membre du parlement communautaire CEMAC, président du groupe parlementaire URCA, serait en train de converger vers le parti MCU puisque des députés disent qu’il participerait à des réunions qui regroupent les députés de la majorité parlementaire et présidentielle. Toutes les fonctions parlementaires qu’il cumule ne lui suffisent pas?

4ème vice-président: Dieudonné Marien Djémé, député MOUNI de Nola 3 (Sangha-Mbaéré), actuel 4ème vice-président de l’Assemblée nationale chargé des finances, membre du parlement CEMAC et membre du parlement panafricain. Tout ça ne lui suffit pas. Et il veut être réélu à ce poste en mentant au nom du chef de l’Etat qui est le chef de la majorité présidentielle dont le parti MOUNI fait partie !

1er Questeur: Henri Gbogouda, député MCU de Bimbo 2 (Ombella-M’Poko), actuel premier questeur. Et il veut être réélu audit poste en mentant au nom du chef de l’Etat. Terrible !

2ème Questeur: Titus Ngbongbo, député RDC de 6ème 1. Il veut être réélu à ce poste en mentant au nom du chef de l’Etat qui est le chef de la majorité présidentielle dont le parti RDC fait partie !

3ème Questeur: Jocelyn Magloire Makango, député MCU de M’Baiki 5 (Lobaye), actuel 3ème questeur. Candidat à sa propre succession ;

1er Secrétaire parlementaire: Clément Ndombet, député MCU de Berberati 3-Nandobo (Mambéré-Kadéï), sortant. Et il veut être réélu à ce poste en mentant au nom du chef de l’Etat.

2ème Secrétaire parlementaire: Mme Bernadette Gambo née Souaninzi, députée MCU de Bossangoa 3 – Korom-M’Poko (Ouham), candidate à sa propre succession;

3ème Secrétaire parlementaire: Mme Dorothée Tiyangou, député MCU de Bakala (Ouaka).

 

OBSERVATIONS

 

Au vu de la liste de ces députés qui se positionnent à grands coups d’argent et de mensonge au nom du chef de l’Etat pour se faire élire ou réélire au bureau de l’Assemblée nationale, les remarques suivantes s’imposent.

Premièrement: Sur les dix (10) postes précités, cinq (5) risquent d’être occupés par les députés d’une même région qu’ils se plaisent à appeler le « Grand Ouest » mais qui n’est, en fait, que l’ancienne Haute Sangha. En effet, les députés Evariste Ngamana de Carnot, Jean Sosthène Dengbè de Berberati 1, André Nalké-Dorgo de Berbérati 4 et Clément Ndombet appartiennent tous à la préfecture de la Mambéré-Kadéi, et Dieudonné Marien Djémé de Nola est de la préfecture de la Sangha-Mbaéré. D’où les questions:

-Est-ce normal que le bureau de l’Assemblée nationale soit dominé par les députés issus d’une même région et de deux préfectures seulement alors que la RCA compte 18 préfectures de l’intérieur réparties sur six régions?

-En quoi ces députés dits du Grand Ouest sont-ils plus calés et plus chevronnés que ceux des autres préfectures de la RCA?

-Les Centrafricains qui avaient combattu le régionalisme par le passé et ce, depuis l’époque Kolingba, sont-ils prêts à accepter une nouvelle forme de domination d’une région sur les autres et surtout au niveau de l’Assemblée nationale censée être le creuset et le lieu de rencontre, de débats et de partages de toutes les régions, de toutes les préfectures et de toutes les communautés de la RCA?

-Ces députés du Grand Ouest se croient-ils plus intelligents et malins et pensent que les députés de l’actuelle législature sont-ils tous des imbéciles et des demeurés pour leur tailler la part belle dans le nouveau bureau de l’Assemblée nationale?

En vérité, ces députés du Grand Ouest n’ont fait que trahir leur instinct régionaliste, ethniste et tribaliste naturel, ce qui est indigne des gens censés être des démocrates et patriotes. Raison pour laquelle aucun d’entre eux ne sera élu dans le nouveau bureau de l’Assemblée nationale même s’il distribuait des millions

Deuxièmement: La plupart des députés précités sont dans des cumuls de fonctions qui font la honte de la République, comme s’ils étaient les seuls, ce qui n’est pas normal. A cause de leur non respect de la géopolitique qui est pourtant un impératif catégorique pour le retour de la paix et de la réconciliation nationale dans ce pays meurtri, ils n’auront aucune chance d’être élus dans le nouveau bureau.

Quelle alternative acceptable peut-on alors opposer à cette bande de députés menteurs et opportunistes, afin de crédibiliser l’institution parlementaire et le pays tout entier?

(…)

            Suite à notre publication d’hier (cf. MEDIAS PLUS N°2745 du mercredi 02 mars 2022, pp.2-3), plusieurs députés ont réagi pour nous remercier d’avoir révélé la vérité sur les tractations en cours par rapport au projet de renouvellement partiel du bureau de l’Assemblée nationale qui aura lieu le lundi 07 mars prochain. Parmi ces députés qui ont réagi, il y’en a de toutes les tendances politiques et parlementaires et notamment: 4 du groupe parlementaire MCU, 5 du groupe parlementaire des Indépendants mais qui appartiennent à la majorité parlementaire et donc alliés au MCU, 4 de l’opposition démocratique membre de la COD-2020, 3 de l’opposition démocratique non membre de la COD-2020 et 3 non inscrits.

 

LES PROBLÈMES

 

Tous ces députés qui se sont rapprochés de notre rédaction sont unanimes pour reconnaitre et affirmer ceci :

1– le président de l’Assemblée nationale Simplice Mathieu Sarandji n’aurait pas la bonne maîtrise des membres de son bureau et son entourage qui en font à leurs têtes au point de discréditer la présente législature comme la précédente ;

2– si le PAN Sarandji et le PR Faustin Archange Touadéra ne décident pas rapidement de changer de fusil d’épaule, le MCU va éclater et la majorité parlementaire n’existera que de nom. De façon terre à terre, ils ont souhaité que tous les membres du bureau sortant de l’Assemblée nationale ne soient pas candidats à leur propre succession, à l’exception d’un seul. Donc ces députés membres du bureau qui cumulent plusieurs fonctions parlementaires ici et ailleurs à la fois, ne doivent pas être candidats à leur propre succession puisqu’ils ne seront pas réélus. « Ils ont pris l’Institution en otage et négligent même leurs collègues députés à qui ils interdisent même tout voyage à l’extérieur. Ils ont le monopole des missions à l’extérieur avec des frais de mission exorbitants et ils ne rendent même pas compte à l’Assemblée nationale. Ils ont suffisamment détourné les lignes budgétaires du parlement qui ne profitent qu’à eux seuls et qu’ils utilisent pour construire des hôtels et des villas au coût individuel supérieur à cent millions (100 000 000) de francs CFA, ce qui n’a jamais existé dans aucune législature. Si Sarandji et Touadéra consentent leurs candidatures en vue de leur réélection, nous allons désobéir à leur mot d’ordre et nous allons les surprendre par les résultats de vote et la mise prochaine à la disposition des médias nationaux et internationaux des preuves de malversations financières dont ils sont auteurs en si peu de temps », déclare un député FATiste de première heure et MCU convaincu à notre rédaction ;

3- la meilleure façon de rompre avec l’amateurisme, la légèreté, les malversations financières et la prédation, c’est de privilégier les critères d’intégrité morale, de géopolitique, de compétences et d’esprit d’innovation dans le choix des hommes et des femmes qui doivent faire partie de l’équipe dirigeante de l’Assemblée nationale.

 

LE TOUT PROCHAIN BUREAU IDÉAL : COMPOSITION, CONTEXTE ET JUSTIFICATION

 

Sur ces principes précités qui semblent tenir à cœur l’écrasante majorité des députés, il a été porté à notre connaissance la liste des députés devant composer le « bureau idéal de l’Assemblée nationale ». Il s’agit de :

1er vice-président : Fréderic Yologaza, député de Dékoa (Kémo), indépendant et membre de la majorité parlementaire ;

2e vice-président : Bernard Dyllah, député de Ngaoundaye 1 (Ouham-Péndé), MLPC, opposition démocratique ;

3e vice-président : Vidal de Bon Cœur Siopathis, député de Satema (Basse-Kotto), RDC, membre de la majorité parlementaire et présidentielle ;

4e vice-président : Mme Rachel Ngakola, député de Bambari 1 (Ouaka), BTK, membre de l’opposition démocratique COD-2020 ;

1er questeur : Thierry Ndoyo, député de 8e 1 (Bangui), indépendant et membre de la majorité parlementaire ;

2e questeur : Mme Salamatou, député de Bouar 3 (Nana-Mambéré), MCU, parti leader de la majorité parlementaire et présidentielle ;

3e questeur : Vivien Gaba, député de Carnot 2 (Mambéré-Kadéï), membre de la majorité parlementaire ;

1er secrétaire parlementaire : Ernest Gongueré, député de 5e 2 (Bangui), MCU, parti leader de la majorité parlementaire et présidentielle ;

2e secrétaire parlementaire : Sialo Ngrounda, député de Ouango 2 (Mbomou), RDC, membre de la majorité parlementaire/présidentielle ;

3e secrétaire parlementaire : Maurice Bazambo, député de Bangassou 1 (Mbomou), indépendant et membre de la majorité parlementaire ;

1er membre : Max Balenda, député de Bria 1 (Haute-Kotto), indépendant et membre de la majorité parlementaire ;

2e membre : Ibrahim Ould Al-Hissène Algoni, député de 3e 2 (Bangui), MCU, parti leader de la majorité parlementaire/présidentielle ;

3e membre : Dominique Kakara, député de 6e 2 (Bangui), indépendant non inscrit ;

4e membre : Mme Ducasse Ndotiga, député de Batangafo 2 (Ouham), MCU, parti leader de la majorité parlementaire et présidentielle.

Ce projet du nouveau bureau de l’Assemblée nationale est le bienvenu parce qu’on y trouve les bons critères que sont l’intégrité morale, la compétence, la géopolitique et l’équilibre confessionnel et politique. Toutes les régions sont représentées contrairement au projet du bureau de la bande à Evariste Ngamana où seule sa région du « Grand ouest » domine, avec la part belle faite aux préfectures de la Mambéré-Kadéï et de la Sangha-Mbaéré.

Au moment où la RCA attend de vivre une véritable ère de cohésion sociale, de réconciliation nationale et de paix à travers notamment le dialogue républicain qui se tiendra bientôt, mettre en place un bureau de l’Assemblée nationale avec une région hyper-dominante et un seul parti ultra-dominant, comme l’envisage la bande des sulfureux Ngamana et consorts, c’est marcher à l’encontre de l’histoire, c’est manquer de réalisme politique, c’est entretenir inutilement un climat de querelles ou de conflits politiques inutiles, c’est dénaturer la véritable physionomie d’une Assemblée nationale.

L’Assemblée nationale étant le creuset de l’unité nationale, son bureau devrait donc refléter cette unité nationale en y intégrant toutes les régions, toutes les sensibilités politiques et toutes les couches sociales. En cela, les députés qui œuvrent pour une véritable rupture avec le type de bureau anhistorique de Ngamana, doivent être considérés comme des vrais patriotes et être félicités. Et apparemment, la prise de position nette, ferme et courageuse du PAN Simplice Mathieu Sarandji contre le projet de bureau Ngamana (cf. p.2) est un signe qui montre que les deux premiers dirigeants de la RCA ont compris que le temps est venu de mettre fin à l’exclusion, à la mauvaise gouvernance, à l’orgueil inutile, à l’amateurisme, à l’enfantillage et à la coterie politique.

(Suite au prochain N°)

Damoclès Diriwo

Source: MEDIAS PLUS N°2745 et 2746 des mercredi 02 et jeudi 03 mars 2022

 

 

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