Centrafrique : ce qui est reproché à Dondra

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Ces derniers temps, l’actualité centrafricaine tant dans la presse nationale et locale que sur les réseaux sociaux, a été particulièrement marquée par les irrégularités ayant manifestement caractérisé le décret n°20.031 du 29 janvier 2020 portant nomination ou confirmation des fonctionnaires à des postes de responsabilité au ministère des finances et du budget.

Si pour les uns, Henri Marie Dondra, en sa qualité de l’autorité politique et administrative en charge de la gestion de ce prestigieux et noble département, a agi en la matière en toute légalité, c’est – à – dire dans le strict respect des lois et règlements de la République en vigueur, il n’en est pas ainsi, par contre,  pour les autres qui pensent et soutiennent « unguibus et rostro »  que l’homme s’est tout simplement comporté, en l’espèce, non pas comme un agent public, neutre, intègre, probe et totalement désintéressé dans l’exercice de ses fonctions et mû par la recherche de l’intérêt général, mais plutôt en un véritable chef d’entreprise privée, ethnique, clanique,  voire même familiale, foncièrement cupide, partial, de manière singulièrement intéressée et déloyale. De quoi s’agit – il en réalité ?

Tout comme le cosmos, dont nous constitutions l’un des éléments, est régi par des lois de la métaphysique dont la stricte observation ou la flagrante violation détermine et conditionne notre existence sur cette terre, l’Etat ou l’administration dont il est question ici ne peut valablement exister, fonctionner  et atteindre ses principaux objectifs qui consistent à fournir des services publics de qualité  à une population donnée vivant sur son territoire, que si les lois et les règlements qui fondent son organisation et son fonctionnement sont scrupuleusement respectés par ceux – là qui en ont la charge, c’est – à – dire des hommes et des femmes ayant le statut de fonctionnaires et agents de l’Etat.

Assujettis à leur tour aux dispositions de la loi portant statut général de la fonction publique, notamment la loi n°09.14 du 10 août 2009 en ce qui concerne la République centrafricaine, qui fixe les conditions de leur recrutement, leur plan de carrière, et leurs droits et obligations, et nommés selon leur spécialité, leurs qualifications, leur compétence et leurs expériences à divers postes de responsabilité, sans distinction d’appartenance politique, religieuse, ethnique et sociale, ceux – ci sont tenus impérativement par l’obligation de résultats dans l’exercice de leurs fonctions.

Guidés par les valeurs de neutralité, d’intégrité, de probité, de diligence, de courtoisie et du sens élevé du devoir pour la patrie jusqu’au sacrifice suprême, dénué de toute idée de folles courses à la cupidité, à la gloire et aux honneurs personnels, en faisant usage de leurs pouvoirs et prérogatives de puissance publique, ils doivent par exemple construire des routes, des écoles et des hôpitaux, assurer la défense de l’intégrité du territoire et la protection des biens et des personnes, collecter les impôts et engager des dépenses relatives aux paiements des salaires et à la consommation des biens et services. C’est dans ce contexte que nous devons placer les débats intervenus ces derniers temps et encore pendants dans la presse et sur les réseaux sociaux, éclatés au grand jour au lendemain de la publication du décret sus- mentionné. Et le faire, c’est se poser tout naturellement et de manière objective, scientifique, incontestée et incontestable si les procédures devant sous – tendre à ces nominations, préalablement définies et consacrées par les lois et règlements en vigueur, ont été observées avec exactitude par Henri Marie Dondra. Que disent de ce fait et par ce fait ces textes ?

Au regard du cadre légal et réglementaire en application, l’ancien directeur général du Fagace, en sa qualité d’autorité politique et administrative du ministère des finances et du budget, a le droit de faire proposer et nommer  des fonctionnaires et agents de l’Etat relevant des différents corps des régies financières à des postes de responsabilité. Seulement, il ne peut le faire qu’en se fondant sur la base des critères de qualifications, de compétence, de probité, de neutralité, d’impartialité, et d’expériences acquises, et ce, sans exclusive d’appartenance politique, régionaliste, confessionnelle, ethnique, clanique, familiale, favoritiste et même clientéliste, en y associant en aval  les expertises de ses directeurs généraux et  en leur demandant de soumettre à son appréciation des propositions, dans ce sens.

Une fois cette procédure suivie, il lui est recommandé par la loi de saisir son collègue en charge du secrétariat général du gouvernement  d’une note en conseil des ministres, tout en y joignant sa proposition de nomination par un projet de décret. A son tour, après études et analyses techniques de ses différents services compétents, relatives à la vérification des postes à pourvoir, des profils et qualifications de leurs prochains titulaires, d’une part, et la mise en forme dudit projet, d’autre part, il est alors fait obligation au ministre Balalou de faire inscrire ce projet du décret de nominations  à l’ordre du jour d’un conseil de ministres.

De ce qui précède, il relève donc de l’entière responsabilité du conseil des ministres, du moins, ou d’une réunion de cabinet, sinon, de statuer sur ce projet de décret de nominations, de juger de son opportunité et de son urgence, en termes de réalisation des performances financières à accomplir, d’en évaluer les coûts sur la masse salariale,  de l’invalider, de le valider avec amendements ou de l’adopter en l’état et d’autoriser par conséquent sa mise en route pour l’obtention des visas et de sa  signature, indispensables à sa promulgation et large diffusion. Est – ce que cette procédure telle que  décrite et développée ci – dessus a été scrupuleusement observée par l’actuel ministre des finances et du budget Henri Marie Dondra ? Evidemment, non !

En effet, selon des informations dignes de foi en notre possession et de sources proches des différentes directions générales des régies financières, de la direction générale des douanes et des droits indirects à la direction générale de la comptabilité publique et du trésor public, à la direction générale des impôts et des domaines en passant par la direction générale des marchés publics et la direction générale du budget, il nous a été rapporté qu’aucune disposition n’a été prise dans ce sens par M. Dondra aux fins de  solliciter et obtenir de ses collaborateurs, à savoir  Inamo, Ourassio, Ramadan, Konzi pour ne citer que ceux – là, la proposition de leurs cadres et agents à divers postes de responsabilité. Ces sources ont affirmé et soutenu qu’il  s’est enfermé dans son bureau, pour produire, tel un prestidigitateur sortant des billets tout neufs  dans un mouchoir de poche, le fameux projet du décret aujourd’hui gravement querellé.

In fine, après avoir réussi à contourner Arthur Piri qui est censé être l’œil du régime, des proches parents de Touadéra et du MCU, et requis la signature du premier ministre Ngrébada, il est passé en usant des mêmes méthodes pour arracher les sceaux du président de la République. Et c’est une fois cette étape franchie que sa supercherie sera éclatée au grand jour, car c’est après avoir fait retirer le nom de Koyangbo dudit projet et remis en place le nom de son parent Inamo, que le président Touadéra, à qui Dondra a entretemps grossièrement menti en lui faisant croire qu’il a déjà préalablement recueilli les visas d’un certain Arthur Piri,  fera porter la triste nouvelle à la connaissance de tous les siens.

Voilà ce qui est reproché techniquement et objectivement à Dondra, en tant que personne morale, dépositaire d’une autorité publique, devant rendre des comptes de sa gestion et en payer le prix si la loi a été délibérément enfreinte ou si la procédure instituée en la matière  n’a pas été respectée comme elle devrait l’être. D’où cette tempête de contestations qui s’est élevée depuis lors sur l’ancien directeur général du Fagace. Une tempête de dénonciations d’un acte de flagrante violation des procédures sus – développées à des fins personnelles, claniques, familiales et partisanes. Ce qui n’est rien d’autre qu’une faute grave commise dans l’exercice de ses fonctions par un haut fonctionnaire qui mérite d’être rigoureusement  sanctionnée et qui ne doit pas être utilisée par l’intéressé à des fins d’un mouvement de haine contre une ethnie au point de  soulever des invectives de toutes parts et créer des tensions inutiles sur les réseaux sociaux.

Pour finir, quid enfin de sa compétence ? Aborder cette question, c’est refuser de nous étendre sur l’authenticité de ses diplômes, de son parcours scolaire et universitaire, et de ses expériences professionnelles pour nous appesantir seulement sur les capacités réelles et techniques de l’homme et dire s’il est effectivement issu d’une école spécialisée dans la formation des cadres des différentes régies financières. Sans nous tordre le cou inutilement, il n’en est absolument rien, car l’homme n’a jamais mis les pieds à l’Ena, l’Iiap, l’Enst et à l’Enfip où ont été formés et où doivent être formés les inspecteurs des impôts, des douanes, du trésor, les experts en passation des marchés publics et les contrôleurs principaux des finances. Bombardé à ce poste hautement stratégique pour des raisons de ses accointances personnelles avec le candidat indépendant Touadéra et venant tout bonnement d’une structure financière, sous le régime du droit privé, il est plus enclin à agir comme un chef d’entreprise, en quête perpétuelle de profits et d’intérêts partisans, qu’un agent de l’Etat motivé et déterminé par la défense de l’intérêt général, le sacrifice de soi et le sens élevé du devoir national.Comment voudrions – nous que ce brave arriviste pût se familiariser en un temps record avec les fondamentaux et l’esprit de la loi portant statut général de la fonction publique ? N’est – il pas effectivement chef d’entreprises, partenaire financier de plusieurs sociétés de la place, et apparemment 1er secrétaire exécutif national du MCU, en parfaite violation des dispositions de la constitution interdisant aux membres du gouvernement d’exercer des activités à but lucratif ? A ce titre, le ministère des finances et du budget n’est – il devenu sa propriété privée ?

S’agissant de son nouveau directeur de cabinet qui n’est qu’un simple inspecteur des impôts, appelé à remplacer un inspecteur principal des impôts, dont la gestion à la DGMP est émaillée de nombreuses affaires de malversations financières, qui ignore tout de l’organigramme du ministère des finances et du budget et des attributions dévolues à toutes les institutions financières, donc manifestement incompétent pour occuper le poste hautement sensible de directeur de cabinet, que peut – il par conséquent avoir de plus compétent ? Rien, si ce n’est cette compétence  d’obéir comme un mouton de Panurge, de distribuer des annotations fantaisistes  et d’octroyer dans les tout prochains jours des visas – passoires sur des dossiers sensibles à des fins catégorielles et intéressées, et ce, sur instructions de son ministre.

Et si nous devons ajouter à cette analyse bien détaillée et soutenue la nomination de Romain – Florent Kobondit – Douathe, certes inspecteur principal des impôts et l’un des meilleurs de sa promotion, mais de l’ethnie Yakoma, et sa proposition de remplacer l’actuel directeur général des douanes et des droits indirects Frédéric Inamo, il nous sera tout aisé de reconnaître que nous sommes tout simplement en face de la liquidation du critère de l’équilibre géopolitique national dont le respect doit et devra conduire à la bonne gouvernance de la République, en ce moment de crise où la réconciliation nationale est appelée à servir de solides leviers sociaux  de nature à concourir au retour de la paix, du vivre ensemble, de la cohésion sociale et de la renaissance nationale.

Jean – Paul Naïba

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