Batangafo, Bambari, Alindao, Berbérati et Autres : « M. Touadéra, le pouvoir c’est comme le feu, à vouloir trop s’amuser avec il vous brûle », dixit Mme Dorothée Aimée Malenzapa

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Madame Dorothée Aimée MALENZAPA
Coordonnatrice du Réseau de Soutien au Leadership
Politique des Femmes Centrafricaines (RESOLEP – FC)
Présidente Nationale du collectif des femmes de la société
Civile centrafricaine (COFEM)

Bangui le 25 Avril 2018

Lettre ouverte à Monsieur
Faustin Archange TOUADERA
Président de la République
Centrafricaine

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« Le pouvoir c’est comme le feu, à vouloir trop s’amuser avec il vous brûle »
Sagesse africaine

Monsieur le Président,
Au moment où notre Réseau, organe de réflexion, célèbre l’anniversaire de sa création, le 20 Avril, je prends la liberté de vous interpeller à travers cette lettre ouverte, en ma qualité de femme leader engagée pour la cause des femmes, des jeunes et des opprimés(es) en général et cela, vous le savez depuis toujours.
Dans le contexte de tragédie que vit la RCA, une voix de femme doit se faire entendre car ce sont toujours les femmes qui sont les principales victimes des crises à répétition que traverse la République centrafricaine.

Monsieur le Président,
De la même manière que je m’étais engagée en galvanisant mes consœurs et nos enfants, les jeunes (filles et garçons en âge de voter) à vous soutenir, de la même manière j’élève ma voix pour désapprouver votre gestion chaotique, dont les conséquences sont désastreuses pour les différentes couches de la population.

Mon but n’est point d’attiser le feu, bien au contraire vous êtes dans l’impasse, vous devez trouver des solutions idoines et durables de sortie de crise, à commencer par satisfaire les exigences des partenaires qui nous soutiennent et qui réclament la qualité à la place de la médiocrité, que vous avez érigée en système de gestion et que vous maintenez coûte que coûte de manière honteuse.

Monsieur le Président,
Arrêtez de nous exposer au ridicule en tout lieu, surtout à l’extérieur, où des railleries nous mettent mal à l’aise, particulièrement pour ceux d’entre nous qui fréquentent l’international.

En effet, vous venez de célébrer vos deux années à la tête du pays, sans résultats positifs, pendant qu’on continue de violenter les femmes et d’ôter la vie à des populations innocentes, alors que vous aviez promis la sécurité pour le peuple qui vous a élu.

Monsieur le Président,
Il vous souviendra que sur 34 ministres qui composaient votre gouvernement pour la période 2011-2013, j’étais la seule à qui vous n’aviez pas signé de lettre de mission. Cela était connu et le ministre chargé de remettre ces documents à ses collègues, à l’époque, aura un sourire en coin, à la lecture de cette lettre ouverte.

Votre attitude se justifiait par le fait que ma rigueur légendaire, déplaisante pour les prédateurs et surtout les fonctions de ministre de la Coopération que j’occupais dans votre équipe gouvernementale à l’époque, me conféraient beaucoup de prérogatives, susceptibles de contrecarrer les plans de prédation de certains collègues que vous protégiez.

N’étant pas de nature à baisser les bras face aux difficultés, d’autant plus que je vou avais clairement défini ma vision de l’exercice de la charge ministérielle avant mon entrée au gouvernement, je m’étais ainsi confectionnée ma propre lettre de mission. Elle reflétait ma conception de la gestion de la chose publique, conforme à l’éthique, à la bonne gouvernance, qui consiste à servir le peuple et non se servir, comme vous et vos acolytes le faites sans état d’âme, au vu et su des Centrafricains (es), impuissants (es) à stopper leur propre descente aux enfers.

J’étais de ce fait à l’aise parce que je ne recevais aucune injonction de vous et j’ai fonctionné dans les normes, en dépit des inimitiés des collègues prédateurs.

Monsieur le Président,
Ce bref rappel me permet de situer le contexte dans lequel j’ai conduit mon réseau à vous apporter notre soutien, sans bien sûr que vous l’ayez demandé.

Au regard donc de nos rapports tendus de l’époque, rien, absolument rien ne m’autorisait à être de votre côté, d’autant plus que vous trainez en vous un fond de misogynie pour le partage du pouvoir avec des femmes de qualité.

Mes nombreux plaidoyers pour que les femmes soient invitées en grand nombre autour des tables de négociations, particulièrement pour le DDRR (Désarmement-Démobilisation- Réinsertion-Rapatriement), considéré depuis toujours comme une vache à lait, n’ont rien donné. Ses échecs successifs en sont une preuve de la gabegie permanente au sein de ce programme.

Pour se convaincre de votre misogynie, il suffit de se référer à votre peu d’empressement à signer le décret d’application de la loi sur la parité. Au point que certains hommes politiques ont dû entrer en scène pour s’indigner du peu de considération que vous et votre super Premier Ministre accordez à l’épineuse question du genre, devenue incontournable, parce que considérée comme levier essentiel dans tout processus de développement et dans notre cas d’espèce pour la reconstruction de la RCA.
Comme le disait Géraldine FERRARO, candidate démocrate aux élections présidentielles aux USA en 1988, pour la vice-présidence : « Ce qu’il nous faut, ce n’est pas quelques femmes pour tracer le cours de l’histoire mais beaucoup de femmes pour tracer le cours de la politique » (de notre pays).

Cependant, la tragédie que nous avons vécue, face à l’invasion étrangère, nous commandait de faire table rase de nos inimitiés et clivages et de nous mobiliser de manière inclusive pour reconstruire notre pays meurtri.

Il faut surtout noter que la dimension spirituelle de votre irruption inattendue sur la scène électorale, d’une part, ainsi que le sondage réalisé par notre Réseau, qui vous donnait gagnant, d’autre part, ont suscité ma décision à vous soutenir.

Hélas ! C’était sans compter avec la nature profondément rancunière de certains compatriotes, incapables de transcender, d’étouffer leurs ressentiments personnels, face aux enjeux de l’intérêt national.

Monsieur le Président,
Je sais qu’à la parution de cette lettre ouverte, vos sbires peu recommandables, et autres prédateurs, décriés (es) de tous et de toutes, qui font feu de tout bois et qui sapent votre base, dont le ricochet atteint le peuple, au lieu de jouer un rôle positif auprès de vous, pendant ces moments d’une gravité à faire changer de fusil d’épaule, vont rivaliser de talent pour se livrer à leur exercice favori de destruction des honnêtes citoyens et citoyennes. Leur seul but, se donner bonne conscience de leurs incompétence, forfaiture et imposture.

Ainsi, s’offre à nous le décor d’un diptyque manichéen du bien recherché par bon nombre de Centrafricains (es) et surtout du mal qui vous entoure.

Mais sachez que ce que je vous ai toujours dit dans votre propre intérêt à visage découvert, les rares fois où vous m’avez reçue à votre demande, vos griots inqualifiables désormais, pendant ces moments critiques ne se privent pas d’en faire autant en cachette et ça s’appelle des hommes !

Je dois vous rappeler que mon soutien était personnellement désintéressé, en dépit de vos promesses fallacieuses, qui n’honorent pas votre statut de Chef d’État, tenu de respecter sa parole.

Benoît HAMON, homme politique français, disait un jour : « La parole donnée, la parole signée devant le peuple doit être scrupuleusement respectée ». Et moi d’ajouter sinon on perd toute crédibilité. D’ailleurs, la sagesse africaine n’en dit pas moins, puisque le manquement à ce principe exposait leurs auteurs à la vindicte populaire, dans nos sociétés traditionnelles !!!

La seule chose que je vous ai demandée, avec insistance en retour, était d’envoyer des signaux forts à la population, particulièrement en direction des jeunes et des femmes, en guise de redevabilité, afin d’améliorer leurs conditions de vie.

Non seulement vous ne faites rien de bon pour eux mais vous les entraînez dans des considérations désuètes de clientélisme, de démagogie, qui ne leur apportent rien d’autre que l’aggravation de leurs souffrances.
Souvenez-vous du projet de scolarisation de 2ème chance pour les jeunes en errance suite à la crise, que j’avais conçu, vous avais soumis et qui est resté sans suite jusqu’à ce jour !!!

Vous aviez un agenda caché et vous avez berné le peuple qui a placé tant d’espoir en vous.

Malheureusement votre duperie est en train de vous rattraper, d’où la succession d’évènements fâcheux autour de vous. Aujourd’hui en vous exposant à des humiliations dans des situations, telle la rocambolesque affaire du coup d’état manqué de la Guinée Équatoriale, c’est le peuple que vous êtes censé incarné qui est non seulement humilié mais sacrifié, particulièrement pour ceux qui vivent dans ce pays ami et pour les répercutions, telle la délocalisation du siège de la CEMAC.

S’agissant de votre profession de foi que vous avez bafouée, c’est pourtant elle qui vous avait valu la sympathie, voire l’adhésion de beaucoup de Centrafricains (es). Certes vous croyez les avoir dupés (es) mais vous avez surtout menti à vous-même et cela est en train de vous rattraper. D’ailleurs, c’est ce qui explique la turbulence à la laquelle vous êtes soumis de toutes parts, conséquences du pilotage à vue, de la mauvaise gouvernance de votre régime, etc.

Un sage disait à ses enfants qui mentaient au sujet de leurs performances scolaires « Vous croyez me tromper ! Vous vous trompez vous mêmes ». Comme pour leur faire comprendre que c’est dans leur propre intérêt de réussir.

Tout comme vous, si vous ne vous ressaisissez pas, vous risquez de sortir par la petite porte et parti politique en gestation ou pas ce sera fini pour vous car depuis la crise de 2012, à ce jour le Centrafricain a beaucoup muri.

Monsieur le Président,
On a coutume d’entendre des propos du genre « avoir la cécité politique pour qualifier certains dirigeants ou bien encore, tel Chef d’État est autiste parce qu’il refuse les bons conseils ». En plus de cela, je vous dirais simplement d’avoir une bonne lecture politique de la réticence des partenaires à décaisser la totalité les fonds promis lors de la table ronde de Bruxelles. Cessez de diaboliser la société civile et l’opposition, dont le rôle, dans toute société démocratique digne de ce nom, est de réguler l’exercice du pouvoir.
Remplissez votre mandat honnêtement en vous conformant aux règles de bonne gestion et personne n’aura rien à redire.

Vous avez été élu (n’en déplaise à ceux qui clament qu’il a fallu traficoter les résultats pour vous, au lieu de se taire par décence). Vous avez été élu, disais-je, non pas pour passer votre temps à échafauder des plans machiavéliques pour la préservation de votre pouvoir, au détriment des problèmes vitaux de sécurité et de subsistance des Centrafricains (es). Seule une bonne gestion peut vous maintenir sur le fauteuil tant convoité. Dans le cas contraire, tel que parti, avec le non-respect des engagements, les illusions perdues de Balzac seront au rendez-vous car être Chef d’Etat n’est point une sinécure.

Je vous conseille plutôt de faire votre examen de conscience à commencer par votre fameuse théorie de rupture annoncée avec légèreté, sans en mesurer les tenants et les aboutissants.
Lorsque vous aviez énoncé cette idée force, ceux et celles qui vous soutenaient ont tout de suite vu en vous, un homme détaché du pouvoir pour servir son peuple.
Hélas ! C’était sans compter avec votre agenda caché.

Une rupture suppose un brusque changement de grande envergure, face à un passé jugé inacceptable.

Dès lors, que faites-vous ? Non seulement vous maintenez le statu quo, mais plus grave vous l’institutionnalisez sans gêne.

Président de tous les Centrafricains (es), vous avez érigé toutes les institutions de la République en groupement d’intérêt familial et amical (GIFA). Au point que la déclaration de patrimoine, qui était exigée de l’équipe gouvernementale, pour les principes de bonne gouvernance, se font toujours attendre, pendant que l’on note avec indignation, l’accumulation accélérée et illicite des biens meubles et immeubles. Pauvre Centrafrique ! Somme toute le peuple vous observe et n’oubliez pas « que la politique c’est l’affaire de tout le monde et l’affaire de tout le monde c’est la politique… ».

En guise de sécurité promise aux Centrafricains (es), tous les jours leurs vies sont sacrifiées et votre impuissance à trouver des solutions à la crise devient inquiétante (oh! euphémisme) dramatique!!!

A telle enseigne qu’aujourd’hui, il est vraiment malheureux et triste de le constater pour le déplorer avec véhémence et indignation que vous êtes dépassé par la situation.

Nous avons fini par comprendre que la communauté internationale est lasse, face à un gouvernement fantôme, qui ne prend pas ses responsabilités. Jugez-en vous-même par la dernière décision du Conseil de sécurité des Nations-Unies du 28 février 2018, qui a conclu à «l’incompétence de votre équipe gouvernementale », imbue d’inutilité.

Je ne fais que relater ce que pensent bon nombre de compatriotes. Des faits précis, des situations réelles et des paroles avérées.

Toutes choses qui, à mon humble avis, semblent confirmer que vous seriez un homme faible et surtout de caractère peu enclin à respecter votre parole. Hélas ! La combinaison de ces deux qualificatifs négatifs chez une même personne la disqualifie pour assumer un quelconque leadership.

Ce que je puis affirmer en plus, c’est que le propre et la caractéristique d’un homme faible, c’est de se complaire avec les médiocres et vous le démontrez à suffisance.

Et ce qui est regrettable, c’est que l’enseignant par essence est celui qui recherche l’excellence, alors que vous vous positionnez à l’antipode de cette valeur qui ennoblie l’être humain !!!

Mais diantre! Comment pouvez-vous conspirer à deux : tandem TOUADERA-SARANDJI pour jeter l’opprobre sur un corps aussi noble que celui des Enseignants, dont je fais partie !!!

En ce qui concerne notre réseau, deux importants indicateurs suffisent pour nous faire adhérer à la thèse du Conseil de sécurité des Nations-Unies:

1/ Sur le plan sécuritaire, plus de trois quarts du territoire sont contrôlés par les groupes armés et aujourd’hui les Centrafricains (es) ne dorment plus, face à l’épée de Damoclès suspendue sur nos têtes.

Vous devriez en tirer les conclusions vous-même, d’autant plus que vous avez fait un aveu d’impuissance au président OBIANG de la Guinée Équatoriale, à qui vous avez déclaré « ne pas contrôler tout le territoire centrafricain ». Gouverneur de Bangui comme certains vous l’attribuent, sachez que la RCA ne se limite pas à la capitale Monsieur le Président ! Ainsi, votre champ d’actions réduit, votre pouvoir avec et du coup, cela égratigne votre légitimité. Pourtant vous avez juré sur la constitution de préserver l’intégrité du territoire, cela n’est-il pas susceptible d’être considéré comme haute trahison ?
Aux juristes d’en donner la réponse.

2/ Plus de 50% de la population vit de l’aumône (pardon ! aide humanitaire pour ne pas choquer les âmes sensibles). Situation inadmissible au sortir d’une crise où la communauté internationale ne demande qu’à faire décoller économiquement la République Centrafricaine, mais à condition surtout qu’il n’y ait pas confusion de lieu d’atterrissage des fonds. Cela est largement suffisant pour ne pas se perdre en conjecture, en épiloguant encore sur votre profession de foi, que vous avez volontairement trahie, du fait de votre agenda caché, qui n’a rien à voir avec les souffrances du peuple.

Monsieur le Président,
Sachez enfin que la nouvelle tragédie que vous voulez attirer sur le peuple et dont vous serez seul responsable par votre manque de vision, votre inculture de la géopolitique, vos limites en diplomatie et votre amateurisme politique à l’interne, du fait de votre mauvaise gouvernance, risque d’être d’abord la vôtre. À cet égard, permettez-moi de vous conseiller de vous intéresser à l’histoire et surtout de tirer les leçons du passé, même si les mathématiques sont très éloignées de cette discipline, source de culture !!!

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Par Dorothée Aimée MALENZAPA
Femme leader

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