Affaire « coup d’état en Guinée – Equatoriale » : Afrique – Education revient sur la responsabilité de Sani Yalo et Autres dans le coup….

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Le président équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, vient de frôler la mort par balles. Un coup d’état, méticuleusement, préparé a failli emporter son régime, avec plusieurs assassinats à la clé dont le sien et, sans doute, celui de la première dame, Constancia Obiang Nguema Mangue. Mais, le destin en a décidé autrement, ce qui a permis de diligenter de minutieuses enquêtes qui permettent de faire d’incroyables découvertes.

En effet, il ressort des premières notes d’interrogatoires que certains natifs de Mongomo, le propre fief du chef de l’Etat, ne sont pas (totalement) étrangers au coup qui allait être fatal à leur président de parent. Il est, aussi, confirmé que la France a servi de base logistique ayant permis la réalisation de ce sordide projet. C’est la raison pour laquelle le doyen des chefs d’Etat du continent africain, du haut de son expérience de 38 ans passés à la tête de l’Etat, a pesé ses mots en accusant la France, une certaine France, même si, très officiellement, on se garde, encore, d’y impliquer, pour le moment, le pouvoir suprême d’Etat. En attendant l’aboutissement des enquêtes, les Africains sont en droit de se poser, au moins, une question : l’appellation de « Petit Satan » donnée à la France par l’imam Khomeini, dans les années 70, n’est-elle pas injustifiée ? Après avoir mis (gratuitement) à plat, l’un des pays les plus prospères d’Afrique, à savoir, la Libye, sous le prétexte que son dirigeant, le guide, Mu’ammar al Kadhafi, était un dictateur qui opprimait son peuple et qu’il fallait se débarrasser de lui, voilà que la même France s’attaque, aujourd’hui, à un autre pays tout aussi prospère, la Guinée équatoriale, sous le même prétexte : Teodoro Obiang Nguema Mbasogo est un dictateur qui maintient son peuple dans une grande pauvreté alors que les revenus du pétrole devraient faire de la Guinée équatoriale un pays très riche. En dehors de toute considération socio-politique ou philosophique, la remarque est facile à faire : derrière la destruction de la Libye, il y a la main de la France et de son président d’alors, Nicolas Sarkozy. Derrière le coup d’état manqué en Guinée équatoriale, le président Obiang accuse, clairement, la France d’en être l’instigatrice. Alors la France, « Petit Satan » ?

« La stratégie (du coup d’état, ndlr) a été organisée sur le territoire français », a dit, tout net, Agapito Mba Mokuy, le chef de la diplomatie équato-guinéenne, devant une soixantaine de journalistes qu’il avait réunis, mercredi, 11 janvier, pour leur révéler quelques dessous de cette ténébreuse affaire.

Si le gouvernement équato-guinéen continue ses investigations qui commencent, d’ailleurs, à porter les fruits puisque celles-ci donnent lieu à des certitudes évidentes, il n’a pas encore, officiellement, saisi le gouvernement français avec qui il a signé des accords de coopération y compris militaires. Ces accords donnent la possibilité à la France de travailler à la recherche de la vérité et de prendre des mesures pour que la Guinée équatoriale reste un pays stable et prospère.

En Guinée équatoriale, la recherche des mercenaires cachés dans la zone frontalière avec le Cameroun, se poursuit, activement.

Le président, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, avait été informé de cette tentative par ses services de renseignement, bien avant qu’elle n’ait eu lieu. La gravité de cette information l’avait même poussé à la partager avec son homologue du Cameroun, Paul Biya. Mis au parfum de ce qui se tramait, ce dernier a, à son tour, prescrit la vigilance de tous les instants à ses services de renseignement, avant de renforcer les mesures de sécurité afin que la déstabilisation de la Guinée équatoriale ne s’opère pas à partir du territoire camerounais. La trentaine, voire, quarantaine (les chiffres divergent) de mercenaires d’origines tchadienne, soudanaise, centrafricaine et même camerounaise, pouvait, difficilement, échapper aux fins limiers du renseignement camerounais, bien que le chef du commando, le général tchadien, Mahamat Kodo Bani, ait été trouvé en possession de 50 millions de F CFA en devises, destinés à corrompre les policiers et gendarmes chargés de les contrôler tout au long de leur parcours. Arrêtés à Kyé Ossie, dernière localité camerounaise avant d’entrer en Guinée équatoriale, les mercenaires conduits par le général tchadien, ont été délestés de tout, avant d’être conduits pour « exploitation » auprès des services plus compétents de la capitale camerounaise.

Selon une source autorisée, c’est, précisément, en décembre que sont nés les soupçons du pouvoir. La Coref qui dit représenter, en Europe,19 partis politiques et associations équato-guinéens, ce que conteste, vigoureusement, Malabo, avait commencé à multiplier les réunions à Paris, juste après le procès, fin octobre, sur les BMA (Biens mal acquis), lequel avait vu la condamnation du vice-président équato-guinéen, Teodorin Obiang Nguema Mangue, à trois ans d’emprisonnement avec sursis. Ce procès terminé, trois de ses éminents membres sont restés en France : Salomon Abesso Ndong, Filiberto Ntutume Mebale qui est un ancien officier de la marine équato-guinéenne et Lucie Akogo. C’est dans ces circonstances que Salomon Abesse Ndong a fait la connaissance, à Paris, d’Issa Yalo. Bombardé colonel après l’arrivée au pouvoir du général, François Bozizé, en 2003, Issa Yalo était un homme à tout faire du tombeur d’Ange Félix Patassé. Pour donner beaucoup plus de chance de succès à l’entreprise de déstabilisation de la Guinée équatoriale, il a eu recours au savoir-faire de son grand-frère, Sani Yalo, aujourd’hui, très proche du président centrafricain, Faustin Archange Touadéra. C’est d’ailleurs cette proximité d’avec le président qui a poussé rapidement le gouvernement de Simplice Mathieu Sarandji à condamner, « fermement » la tentative de putsch de Mongomo, pour qu’il n’y ait pas d’amalgame ni de confusion dans cette action des Yalo. De son côté, le président de la République, lui-même, s’est envolé, en Guinée équatoriale, flanqué de sa ministre de la Défense, Marie-Noëlle Koyara et de son conseiller politique à la présidence, Debet, afin de condamner cette tentative de coup d’état, d’apporter de vive-voix son soutien, et celui du Centrafrique, à la Guinée équatoriale et à son président.

A Malabo, on cite, aussi, le nom de Philippe Breth, un officier des renseignements généraux, sans, préciser son rôle exact. Toujours est-il que les financements seraient venus de l’entourage d’Eli Khalil, de Georges Soros et de certains milieux financiers espagnols et français.

Outre les armes et les déplacements, ces financements auraient permis d’acquérir des véhicules tout terrain à Dubai, qui devaient servir pendant le coup d’état. Ici, à la manœuvre, on cite le Pakistanais, William Aboudi, qui s’y connaît dans les boîtes de nuit (tout comme Sani Yalo à Bangui). Il a permis leur acheminement depuis Douala où il réside.

On se souvient que pour évincer Ange-Félix Patassé, en 2003, François Bozizé qui passait ses journées, à Paris, avec ses frères d’armes dont beaucoup ne portent plus la tenue militaire car retraités, avait utilisé la même stratégie, avant de bénéficier du coup de pouce d’Idriss Déby Itno qui, à l’époque, avec la complicité du président, Jacques Chirac, avait mobilisé 7.000 soldats pour permettre le succès de cette opération. Car, à l’époque, Patassé, outre ses propres soldats, avait fait venir les mercenaires du RDCongolais, Jean-Pierre Bemba, pour assurer la sécurité de Bangui et de ses environs.

Quand Malabo accuse la France, il ne s’agit pas (encore) du gouvernement français, mais des barbouzes français, qui officient au vu et au su des services secrets français. D’où la question qui se pose : la France officielle pouvait-elle ignorer ce qui se tramait contre la Guinée équatoriale alors que tout s’organisait sous ses yeux ? Comment les services français n’ont pas pu détecter ce coup qui se préparait ? Est-ce possible ? Ces questions méritent d’être relevées d’autant plus que le 12 décembre, le président, Teodoro Obiang, n’avait pas été, personnellement, invité au Sommet sur le climat par son homologue, Emmanuel Macron, contrairement, à ses homologues voisins du Cameroun, du Gabon, du Congo-Brazzaville et du Tchad. L’ambassadeur de France à Malabo avait bien remis une invitation au gouvernement pour participer au Sommet mais pas au président de la République. C’est clair : Paris ne voulait pas accueillir le président Obiang. Et pourquoi ?

A Abidjan, en marge du Sommet Europe-Afrique, fin novembre, une autre demande de rencontre de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo avait été ignorée par Emmanuel Macron. La France boycotterait-elle la Guinée équatoriale ? Si oui, est-ce à cause du procès sur les BMA ?

De son côté, le président du Tchad, Idriss Déby Itno, dont plusieurs ressortissants sont impliqués dans ce putsch, dit ne rien savoir à ce sujet. Parole de chef d’Etat ? Au des chefs d’Etat du continent de répondre.

Cela dit, parler de ce coup d’état sans révéler des connexions dont les putschistes bénéficient auprès des parents du chef de l’Etat, à Mongomo, ne permettrait pas de bien comprendre la complexité de ce dossier. Car, dans ce fief du président, tout le monde n’est pas content de l’ascension du fils aîné, Teodorin Obiang Nguema Mangue, qui a, toujours, bénéficié de l’indéfectible soutien de sa mère, Constancia, la première dame. Outre d’autres considérations très africaines, la raison principale de cette animosité est dans l’ouverture d’esprit du vice-président. Certains de ses proches parents, ouvertement, tribalistes n’accepteraient pas qu’ils s’entourent, en priorité, des compétences venues d’autres régions du pays, et ce au détriment des partisans de la théorie du village. Du coup, beaucoup craignent de perdre leurs privilèges du jour au lendemain, si le vice-président accédait au pouvoir.

A ses débuts, le président Obiang avait essayé de desserrer cet étau, mais, a dû reculer après avoir essuyé une tentative de coup d’état qui avait, aussi, valeur d’avertissement.Il ne s’y est plus essayé. Le vice-président aura-t-il plus de chance que lui ?

Les enquêteurs ont trouvé 20 fusils AK47 dans les environs de l’Académie de police, vers Mongomo. Ces fusils attendaient des utilisateurs qui ont dû être interceptés avant de passer à l’action. Le ministre des Affaires étrangères, Agapito Mba Mokuy, a donné le chiffre de près de « 150 mercenaires » qui seraient activement recherchés, à l’intérieur du pays.

Le doyen a, incontestablement, la situation en main. S’il est probable qu’il ne sera pas le prochain sur la liste des dirigeants africains qui perdent leur pouvoir, il doit, par contre, savoir qu’un coup d’état peut en cacher un autre.

Correspondance particulière
depuis Ebebiyin en Guinée équatoriale

N.B. Cet article est à lire dans le numéro 459-460 de décembre 2017-janvier 2018 d’Afrique Education, chez les marchands de journaux dès mardi 23 janvier, pour seulement deux semaines

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