
Il faut sauver l’essentiel
Et cette mise en garde est tout à fait compréhensible car le pays d’Assimi Goïta pense que l’organisation sous-régionale a un parti pris, après avoir subi le dur embargo économique qu’elle lui a imposé. Ensuite, il faut craindre que le coup de projecteur qu’apportera ce sommet sur ce dossier n’implique de nouveaux acteurs internationaux dans un contexte de nouvelle Guerre froide où la Côte d’Ivoire et le Mali représentent les deux blocs qui s’affrontent aujourd’hui dans la guerre en Ukraine. Les clivages idéologiques qui se dessinent très clairement sur fond d’intérêts économiques et géostratégiques, risquent d’éloigner les deux parties d’un accord négocié. Enfin, il faut craindre que l’ONU dont la position dans ce dossier ivoiro-malien manque de constance et qui vit surtout des crises comme un saprophyte, ne vienne renforcer les antagonismes pour aboutir aux enlisements dont elle seule connaît les secrets. Cela dit, Alassane Dramane Ouattara ne perd rien à essayer le coup de la médiation internationale dans cette guerre des tranchées qu’elle mène avec son voisin malien. En cas d’échec, il réussira sans doute à s’attirer la sympathie de ses amis, avec de fortes chances de contribuer davantage à l’isolement international du Mali qui, il faut le dire, exploite aussi cette affaire pour essayer de desserrer l’étreinte mortelle des puissances occidentales et de leurs alliés. Mais ce gain diplomatique vaut-il le risque encouru quand on a la main dans la gueule du serpent ? Il est difficile de trancher le nœud gordien de ce dilemme mais une chose est certaine, la persistance de cette crise n’arrangera, sur le long terme, ni les intérêts des deux parties prenantes, ni ceux de la sous-région déjà en proie à de vives tensions du fait de la crise sécuritaire. Le temps en effet joue contre les deux parties. Les autorités ivoiriennes ne pourront pas continuer éternellement à refreiner les relents belliqueux de bon nombre de leurs concitoyens tout comme la Transition malienne dont la durée de vie est limitée, ne pourra exploiter indéfiniment ce dossier qui n’intéressera sans doute pas le régime qui lui succédera. Et c’est pour cela qu’il faut, au-delà de la surenchère politique et diplomatique, sauver l’essentiel en pensant aux relations de bon voisinage entre les peuples frères et amis de la Côte d’Ivoire et du Mali. Cela passe nécessairement par un dialogue bilatéral franc et direct.
SAHO
Source : Le Pays