
Et il transforma le Centrafrique en Empire du mal,exportateur de déstabilisation (1) Le chef d’orchestre
PAR PR JEAN–FRANÇOIS AKANDJI–KOMBE
Lorsque M. Touadéra prit possession du pouvoir en avril 2016, le pays, pour avancer, était en train péniblement de recoudre ses plaies et d’apprendre à surmonter les souvenirs
d’un très récent passé monstrueux et inhumain : les morts de massacres par dizaine de milliers, les charniers, l’enfer des viols et autres violences inouïes. Bref, la Transition de
Mme Samba–Panza, avec ses défauts qu’il n’est évidemment pas question d’excuser ici,
avait réussi à remettre le pays dans le sens de la marche. Les violences avaient sensiblement diminué, et le nombre de groupes armés aussi.L’avenir institutionnel et démocratique du pays était tracé, avec la Constitution du 30 mars 2016, et ceci au terme d’un processus de consultation populaire jamais connu en RCA depuis les indépendances. Et les relations avec les Etats de la sous–région et avec les institutions africaines et internationales étaient, sinon au meilleur de leur état, du moins en cours d’apaisement et de normalisation.
Voilà le tableau du Centrafrique dans ses grandes lignes quand arriva l’ère Touadéra.
Dans l’euphorie du moment, on avait vite fait d’oublier que les plaies béantes que la
Transition s’était efforcée de refermer étaient aussi le fait d’un gouvernement dirigé par un
certain Premier ministre nommé Touadéra, qui avait régné cinq ans durant, qui avait rendu
la Séléka possible et qui a, à certains égards, favorisé son arrivée au pouvoir.
L’euphorie, et aussi l’envie d’oublier un passé oh combien douloureux a imprimé dans nos esprits le mythe de l’homme nouveau, de l’homme droit et vertueux, Président des pauvres par ailleurs. Mais la réalité est là, la dure réalité : de l’Empire du mal qu’est devenue la RCA, cet homme est le chef d’orchestre. Et de la fabrication ainsi que de l’exportation tous azimuts de la déstabilisation, il est le véritable chef d’entreprise. On aura beau, selon certaines habitudes centrafricaines, chercher ailleurs les responsables du malheur actuel des Centrafricains : les prédécesseurs, les ministres, les conseillers, les Wagner, et que
sais–je encore. La vérité restera celle–là : M. Touadéra est et restera devant l’histoire le chef d’orchestre, l’ordonnateur et l’organisateur de ce Centrafrique de malheur ; celui qui, au lieu de combattre le mal, prend un malin plaisir à l’accentuer et à le généraliser ; et qui, pour ce faire, n’ouvre les bras qu’à des maléfiques.
En le voyant agir, on ne peut s’empêcher de poser ces questions : cet homme aime–t–il
seulement le Centrafrique et les Centrafricains ? Quel mal ce pays lui a–t–il fait pour qu’il
s’acharne avec tant de violence et d’inhumanité sur lui ? Inhumanité. Voilà sans doute la clé qui permet de saisir le rapport de ce personnage à la RCA. Une inhumanité assumée, et incarnée par des politiques dont le commun dénominateur est le mépris du Centrafrique comme terre et des Centrafricains comme titulaires de cette terre. C’est ce qui est à la racine de ce qui sera décrit dans les prochains numéros : « l’Empire du mal » et « la couveuse de déstabilisation ».
Source :Bulletin citoyen d’information, d’éducation et de mobilisation du 13 février 2023 – Numéro 05