
Centrafrique : Quand le pouvoir devient tabouret : appel à un leadership qui sait s’effacer
Publié le 12 juillet 2025
Par Faustin Zaméto, Sociologue
Pour celles et ceux qui croient encore à l’honneur en politique alors que notre démocratie s’essoufle et que certains dirigeants s ‘accrochent au pouvoir malgré l’échec, cette tribune est un appel franc à une culture du retrait, de la transmission et du renouveau. Inspiré du parcours de Michael Dukakis, elle interroge le leadership centrafricain et la place laissée à une jeunesse trop longtemps reléguée. Une voix citoyenne engagée, une parole sans compromis.
A lire, à partager, à débattre.
Le parcours de Michael Dukakis, ancien candidat malheureux à la présidentielle américaine de 1988, incarne une valeur trop rare en politique : la capacité à perdre avec dignité, à transmettre avec intelligence, à s’effacer pour faire place à une génération porteuse de renouveau. En laissant le flambeau après sa défaite, Dukakis permit à des figures comme Bill Clinton d’émerger et de porter une vision nouvelle pour les États-Unis.
En République centrafricaine, ce modèle manque cruellement. Chez nous, ceux qui échouent persistent. Ils refusent de partir, s’agrippent au pouvoir comme à un privilège personnel, et confisquent l’avenir d’un peuple trop souvent dépossédé de sa propre histoire.
Le pouvoir devient un tabouret politique, où l’on s’assoit sans jamais se lever, quitte à écraser ceux qui attendent une respiration démocratique.
Et pendant ce temps, notre jeunesse suffoque. Elle doute d’elle-même, regarde le pays comme un espace verrouillé où tout rêve se heurte au mur de l’inertie. Jeunes diplômés ou non, ils se vivent comme nés trop tard, ayant grandi dans les cendres d’un système autoritaire, désorientés, marginalisés, sans levier pour transformer l’avenir.
Les résultats des dernières élections présidentielles sont parlants : la plupart de ceux qui s’accrochent à leur place aujourd’hui, et qui veulent concourir pour une énième fois, ont obtenu des scores médiocres. Mais plutột que d’en tirer des leçons, ils s’enferment dans le déni.
L’échec, chez nous, n’est jamais reconnu ; il est maquillé, repoussé, contourné. Et pendant ce temps, certains cherchent désespérément à exister dans les médias et sur les réseaux sociaux, à s’inventer une présence, une légitimité virtuelle, parce que sur le terrain, là où le peuple vit et souffre, ils ont été relégués aux oubliettes. IIs brillent dans les hashtags, mais s’éteignent dans les quartiers et les villages.
Michacl Dukakis, lui, malgré sa défaite, continue d’inspirer. Son retrait n’a pas été une fuite, mais une offre. Il n’a pas fait de sa chute une plaie à cacher, mais un passage à honorer. Il a montré que l’humilité peut redonner sens à la politique. Une leçon que nos dirigeants gagneraient à méditer. Ce cas illustre un appel clair : c’est dans le renoncement assumé, le passage de témoin et le respect du jeu démocratique que se forge la refondation politique.
En Centrafrique, il est temps d’adopter cette culture du retrait honorable, où le pouvoir cesse d’être un tabouret et redevient un mandat temporaire au service du peuple. Ce pays ne mourra pas de la médiocrité de ses dirigeants il mourra de leur obstination à rester debout sur un tabouret brisé.
Il est temps de descendre, de transmettre, d’ouvrir. La relève ne demande pas des excuses : elle réclame une porte. Et surtout, le Centrafrique ne se gouverne pas depuis les likes. Il se reconstruit là où la douleur est réelle, où le courage cst vivant, où les mains se
tendent sans filtres ni projecteurs.
Ouvrons cette porte- ensemble.