A sa demande, l’ambassadeur de l’Ue Douglas Carpenter près la République centrafricaine a accordé dans son cabinet à Bangui une audience, il y a quelques jours, au coordonnateur national du BRDC Me Crépin Mboli – Goumba, assisté du président du BTK Mahamat Kamoun. Sans fioritures, le représentant des 27 pays membres de l’Ue a demandé aux membres du Bloc Républicain pour la Défense de la Démocratie de prendre part, d’abord, à un dialogue politique avec le pouvoir manifestement illégal et illégitime de l’Imposteur de Bangui et de participer, ensuite, aux prochaines élections locales. Comme il fallait s’y attendre, d’une seule voix, les deux personnalités, à leur tour, ne sont pas allées avec le dos de la cuillère pour exprimer une fin de non – recevoir à cette demande qui a tout l’air d’une véritable convocation, et donc d’une injonction.
En effet, déniant à Touadéra toute légitimité, depuis sa mascarade électorale du 27 décembre 2020, à l’issue de laquelle il a été déclaré élu par l’ANE par seulement 17% du corps électoral et de laquelle plus de 300.000 Centrafricains ont été délibérément exclus, et pour avoir officiellement appelé à un boycott total des consultations référendaires du 30 juillet 2023 dont le processus était singulièrement marqué par des actes de graves irrégularités, le BRDC, fidèle aux dispositions de sa charte, ne pouvait que tout naturellement décliner cette offre. Au – delà de cette posture responsable adoptée par les représentants de cette plate-forme politique qui regroupe l’essentiel des partis politiques de l’opposition démocratique, leur interpellation par le diplomate européen, sonne et résonne comme une insulte de trop à l’endroit du peuple centrafricaine, dans le même temps. Elle est aussi une honte pour tous les démocrates et les combattants de la liberté.
Une insulte de trop ? Parce que l’Ue est essentiellement fondée sur les valeurs de dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’Etat de droit et des droits de l’homme. Par – delà ses frontières, l’Ue a pour objectifs d’affirmer et promouvoir ses valeurs et ses intérêts; de contribuer à la paix et à la sécurité, ainsi qu’au développement durable de la planète; d’œuvrer en faveur de la solidarité et du respect mutuel entre les peuples, du commerce libre et équitable, de l’élimination de la pauvreté et de la protection des droits de l’homme; et de respecter strictement le droit international.
Une insulte de trop ? Parce que « Démocratie et développement » fut le thème central développé par le président Mitterrand au 16ème sommet franco-africain du 19 au 21 juin 1990 à la Baule. Intervenant 30 ans après les indépendances africaines, et à la suite des bouleversements sur la scène internationale entre 1989 et 1990, ce changement du discours français était apparu imprégné de l’idéologie de la démocratie de marché qui s’était elle-même rebellé comme le modèle universel après l’effondrement du bloc communiste et à la fin de la guerre froide. En ressassant qu’il ne saurait y avoir de vrai développement sans démocratie, et en conditionnant l’aide française à la démocratisation, M. Mitterrand avait décidé de remettre en cause certains engagements traditionnels de la politique africaine de la France. En effet, jusqu’à 1990 cette dernière s’est montrée laxiste, voire favorable à l’institutionnalisation du parti unique comme moteur de développement économique et comme facteur d’intégration nationale. Changer de discours seulement en 1990, alors que la situation socio-économique demeurait chaotique, après toute une décennie d’ajustement structurel revenait impérativement à substituer au modèle de parti unique défaillant un modèle purement démocratique.
Une insulte de trop ? Parce que, suite à de très grands sacrifices consentis et des actions pacifiques menées par toutes les forces vives de la nation, caractérisés particulièrement par des grèves mortes déclenchées par les différentes centrales syndicales en 1990 et des années blanches sur toute l’étendue du territoire, durement réprimées par le pouvoir et ayant entraîné des radiations de la fonction publique, des suspensions de fonctions et de solde pour une durée de trois mois avec traduction devant le conseil de discipline, des arrestations injustes et arbitraires, des assassinats et des départs forcés à l’exil, le peuple centrafricain obtiendra en 1992 l’avènement du pluralisme démocratique. Grâce aux soutiens de la communauté internationale dont au premier rang la France et les Etats – Unis, finalement des élections générales auront lieu en 1993 avec la victoire triomphale du président Ange Félix Patassé et la mise en place de nouvelles institutions démocratiques.
Une insulte de trop ? Parce que, au lendemain du coup d’état du général François Bozizé, le 15 mars 2003 et celui de la nébuleuse Séléka, le 23 mars 2013, comme un seul homme, le peuple centrafricain se lèvera pour écrire une nouvelle constitution, conformément aux recommandations du Forum de Bangui. Ecrite sous la présidence de transition de Mme Cathérine Samba – Panza, sa rédaction et son adoption par référendum auront été possibles grâce aux soutiens matériels, logistiques, financiers et humains de la France, des Etats – Unis et surtout de l’Union européenne. Entrée en vigueur le 30 mars 2016, c’est sur cette loi fondamentale qui a jeté les bases de la 7ème République que celui qui s’était passé pour le « Candidat des Pauvres qu’un certain Faustin Archange Touadéra a prêté serment et s’est engagé devant la cour constitutionnelle siégeant en audience solennelle ainsi qu’il suit : « MOI………, JE JURE DEVANT DIEU ET DEVANT LA NATION D’OBSERVER SCRUPULEUSEMENT LA CONSTITUTION, DE GARANTIR L’INDEPENDANCE ET LA PERENNITE DE LA REPUBLIQUE, DE S’AUVEGARDER L’INTEGRITE DU TERRITOIRE, DE PRESERVER LA PAIX, DE CONSOLIDER L’UNITE NATIONALE, D’ASSURER LE BIEN ETRE DU PEUPLE CENTRAFRICAIN, DE REMPLIR CONSCIENCIEUSEMENT LES DEVOIR DE MA CHARGE SANS AUCUNE CONSIDERATION D’ORDRE ETHNIQUE, REGIONAL OU CONFESSIONNEL, DE NE JAMAIS EXERCER LES POUVOIRS QUI ME SONT DEVOLUS PAR LA CONSTITUTION A DES FINS PERSONNELLES NI DE REVISER LE NOMBRE ET LA DUREE DE MON MANDAT ET DE N’ETRE GUIDE EN TOUT QUE PAR L’INTERÊT NATIONAL ET LA DIGNITE DU PEUPLE CENTRAFRICAIN »
Une insulte de trop ? Parce que, en 2020, alors que tous les partis politiques, la société civile, tous les groupes armés, la cour constitutionnelle, la communauté internationale, l’Onu, le G5, l’Ua et la Ceeac ont officiellement appelé à la tenue d’un dialogue politique inclusif avant la tenue des élections du 27 décembre 2020, Touadéra a préféré les tenir selon ses propres règles du jeu, en mettant en place une structure parallèle et manifestement en violation des dispositions du code électoral dénommée « Comité stratégique de suivi du processus électoral », placée sous la responsabilité directe du premier ministre Firmin Ngrébada et en confiant exclusivement la gestion de l’ANE et de la cour constitutionnelle à des hommes acquis à sa cause. Sans surprise, à l’issue de ces scrutins groupés, particulièrement émaillés par des actes de graves atteintes au code de l’intégrité électorale, et desquels plus de 300.000 Centrafricains ont été délibérément exclus, le candidat a été déclaré élu par l’ANE par seulement 17% du corps électoral.
Une insulte de trop ? Parce qu’en dépit des réclamations des différents candidats à la présidentielle et aux législatives, adressées au secrétaire général de l’Onu, ni la France, ni les Etats – Unis, ni l’Ue, ni l’Ua, ni la Ceeac n’ont jamais daigné dénoncer cette mascarade électorale et ce passage en force qui n’est rien d’autre qu’un coup d’état. Alors que l’Ue avait suspendu toute coopération avec le Togo pour « déficit démocratique », suite à l’élection présidentielle du 1er juin 2003 contestée par les partis politiques de l’opposition et avait justifié ses sanctions par le fait que le code électoral ait été modifié par le pouvoir pendant la partie, favorisant ainsi un seul candidat, le général Eyadéma, l’Ue qui avait financé ces élections à hauteur de 15.5 millions d’euros, n’a jamais condamné l’absence de tout critère de crédibilité, d’inclusivité, de transparence, de responsabilité, de liberté, de justice, de régularité ayant caractérisé le processus.
Une insulte de trop ? Parce que, malgré l’institutionnalisation du règne de la terreur, l’instauration de l’état d’urgence après l’attaque de la ville de Bangui, le 13 janvier 2021, par les combattants de la CPC, le rétrécissement de l’espace politique, civique et médiatique avec l’interdiction de l’accès au site des journaux en ligne CNC et Letsunami.net par un arrêté du ministre Gourna – Zacko, les filatures des opposants, la suppression des libertés de réunions et de manifestations, des arrestations arbitraires des supposés rebelles de la CPC, des tueries de masse, des actes de tortures suivies de disparitions forcées, l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques, l’utilisation des milices privées, des attaques contre des ambassades de France, des USA et de l’Ue, des agressions physiques des ressortissants occidentaux, l’incendie des locaux de l’ambassade de l’Ue et de l’entreprise Castel, Mme Samuela Isopi s’est fort étonnement gardée de rappeler à l’Imposteur de Bangui le respect des valeurs de dignité humaine, de liberté, de démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit qui fondent l’existence des 28 pays composant l’Union européenne.
Une insulte de trop ? Parce que le refus de la communauté internationale, en général, et celui de l’Ue, en particulier, de condamner très fermement les actes de graves entorses aux valeurs de la démocratie, des droits de l’homme, de justice et de l’état de droit ont permis, par conséquent, tout naturellement à Touadéra de dérouler son plan diabolique de liquidation de la démocratie centrafricaine afin de s’éterniser au pouvoir. Pis, même si les Etats – Unis ont invité Mme Danièle Darlan suite à son limogeage pour lui décerner à la Maison Blanche le prix de « Femme Courage », l’Ue est restée silencieuse et a laissé Touadéra écrire une nouvelle constitution, puis convoquer le corps électoral aux consultations référendaires du 30 juillet 2023. Quoique boycottées par plus de 2/3 du corps électoral et caractérisées par des graves irrégularités, sa cour constitutionnelle les a validées et a confirmé les résultats annoncés quelques jours plus tôt par une ANE aux ordres sous la conduite de Me Morouba assisté d’un certain Momokoama.
Une insulte de trop ? Parce que, fort de tout ce qui précède, la convocation de Me Crépin Mboli – Goumba et de Mahamat Kamoun n’est rien d’autre qu’un message venu d’un autre monde. Un monde définitivement résolu. A l’exemple de ces vagues de contestations populaires de la politique de la France dans ses anciennes colonies, elle s’impose comme les signes de la fin d’un temps. Comme l’ont dit le président de la Guinée, le colonel Mamady Doumbouya et le président du Gabon, le général Brice Oligui, « les vrais putschistes, ce sont qui, plus nombreux, ne font l’objet d’aucune condamnation, manipulent, utilisent la fourberie, manigancent et modifient les textes pour rester éternellement au pouvoir. Ce sont de véritables délinquants à col blanc qui changent les règles du jeu pendant la partie ». Depuis le 30 août 2023, Touadéra est un véritable putschiste pour avoir opéré un coup d’état constitutionnel.
Une insulte de trop ? Parce que, au lieu de le traiter comme tel et d’user de tous les instruments juridiques internationaux pour lui infliger des sanctions jusqu’au retour à l’ordre constitutionnel, l’ambassadeur Douglas Carpenter a préféré, au nom de ses intérêts personnels et honteux, demander aux leaders des partis politiques du BRDC de descendre dans la gadoue. Ils ne le feront jamais et nous leur demandons d’exiger son départ de la RCA, car il est un terroriste et non un DEMOCRATE !
La Rédaction