Centrafrique : Décryptage de destitution de l’honorable Méckassoua : Acte 3 : De l’irrecevabilité de la requête (Suite et Fin)

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DÉCRYPTAGE DE LA PROCÉDURE DE DESTITUTION DE L’HONORABLE MECKASSOUA : ACTE 3. DE L’IRRECEVABILITÉ DE LA REQUÊTE (SUITE ET FIN)
Vendredi 6 Août 2021
1. Quand j’étais en prison à Ngaragba, j’ai connu quelques compagnons d’infortune qui me parlaient de leur souhait de prendre comme avocat Me Anatole Max MAÏTOVO, car d’après eux il serait un très bon conseil. Mais malheureusement pour eux l’état de leurs bourses ne leur permettait pas de s’offrir les services onéreux de cette Ferrari du barreau de Bangui. C’était la première fois que j’entendais parlé de lui. J’avais donc un a priori plutôt positif le concernant, car quand un prisonnier encense un avocat c’est rarement par flatterie ou courtoisie gratuite mais cela traduit très souvent une certaine réalité. D’ailleurs, l’inverse est aussi très vrai.
2. Comprenez donc mon choc quand j’ai pris connaissance de la faiblesse congénitale des arguments soutenant la requête signée de la main de Me Anatole Max MAÏTOVO, avocat du faire-valoir du « Sultan », contre l’Honorable Député Karim MECKASSOUA. Et sans nul doute, l’argument juridique le plus indigne de la stature de notre très cher maître (si celle-ci n’est pas usurpée) est celui que nous allons décortiquer ici : celui de la recevabilité de sa requête au motif de l’inéligibilité.
3. Bien sûr les autres arguments qu’il avait préalablement avancés pour invoquer la compétence de la Cour Constitutionnelle sont tout aussi bidons, mais là on touche le fond , à mon avis. En effet, pour se prévaloir de l’inéligibilité de Karim MECKASSOUA, Me Anatole Max MAÏTOVO, avocat du faire-valoir du « Sultan », se fonde sur l’article 88 de la Loi N°17.004 du 15 février 2017 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle de la République Centrafricaine qui dispose que « la constatation de l’inéligibilité d’un candidat » fait partie des « cause d’annulation des élections ».
4. Sauf que, vous vous en doutiez bien qu’il y a forcément un « sauf que » (on y est habitué maintenant)…Si on se réfère à l’article 93 du Code Electoral, cette dernière disposition exige, À PEINE D’IRRECEVABILITÉ, que les recours en inéligibilité contre un candidat figurant sur la liste provisoire des candidatures soient présentés sous forme de requête écrite, motivé…avec les pièces utiles au soutien des moyens annexées à celle-ci.
5. À titre de rappel, on se souvient que lors dans l’Acte 1 quand il fallait présenter un document pour soutenir la compétence de la Cour Constitutionnelle notre très cher maître nous avait sorti un « rapport ». Dans l’acte 2 quand il s’est agi de supporter la recevabilité de la requête au motif de la question préjudicielle, il avait brandi un « avis » de poursuite judiciaire. Et là pour soutenir la recevabilité de la requête au motif de l’inéligibilité il a choisi de produire…AUCUNE PIÈCE annexée pour motiver sa demande. Faut-il comprendre par-là que Me Anatole Max MAÏTOVO, avocat du faire-valoir du « Sultan », se considère si puissant, si fort, si supralégal qu’il ne juge pas nécessaire d’apporter une quelconque preuve de ce qu’il avance comme l’exige pourtant l’article 93 du Code Electoral ? Question sans réponse.
6. Le non-respect de la fourniture des pièces utiles au soutien des moyens annexées est une raison suffisante pour rendre cette demande IRRECEVABLE. Ce n’est pas MECKASSOUA qui le dit mais l’article 93 du Code Electoral qui le spécifie dans des termes clairs « À PEINE D’IRRECEVABILITÉ » si le recours n’annexe aucune preuve. Ce qui est ici le cas.
7. Mais il y a bien pire encore, je vous assure ! Lisez bien ce qui suit. En effet, l’article 92 du Code Electoral nous dit que quand un candidat ne réunit pas les conditions prévues (moralité, nationalité, âge, etc.) par la loi « tout intéressé, peut, dans les trois (3) jours qui suivent la publication de la liste provisoire des candidats par l’A.N.E., saisir la Cour Constitutionnelle qui statue dans les quinze (15) jours ». Or c’est seulement le 14 juillet 2021 que Me Anatole Max MAÏTOVO, avocat du faire-valoir du « Sultan », s’est enfin décidé à saisir la Cour Constitutionnelle pour soulever la question de l’inéligibilité de MECKASSOUA. Soit DIX MOIS (=300 jours) après la publication de la liste provisoire des candidats par l’A.N.E. ! Je crois que là cela se passe de tout commentaire. Même un très mauvais mathématicien comme Faustin Archange TOUADÉRA sait que 300 est supérieur à 3. En tout cas, c’est la première fois dans l’histoire de l’Humanité qu’un avocat attende 300 jours après la date buttoir d’une procédure avant de réagir quand le Code Electoral n’accorde qu’un délai MAXIMUM de 3 jours ! En termes de forclusion, c’est carrément du jamais vu.
8. Entre temps, par la Décision N°024/CC/20 du 27 novembre 2020, la Cour Constitutionnelle arrêtait la liste définitive des candidats aux élections législatives du 27 décembre 2020, APRÈS AVOIR VIDÉ TOUS LES CONTENTIEUX. Et, par la Décision N°111/CC/21 du 29 juin 2021 la Cour Constitutionnelle proclamait les résultats définitifs du second tour des élections législatives partielles du 23 mai 2021 dans lesquelles MECKASSOUA est définitivement élu Député. De plus, l’article 19 de la Loi N°17.004 du 15 février 2017 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, dispose très clairement que « LES DECISIONS DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE NE SONT SUSCEPTIBLES D’AUCUN RECOURS. ELLES S’IMPOSENT AUX POUVOIRS PUBLICS, A TOUTES LES AUTORITES POLITIQUES, ADMINISTRATIVES ET JURIDICTIONNELLES, ET A TOUTES PERSONNE PHYSIQUE OU MORALE »
9. Alors non seulement notre très cher avocat se réveille seulement 297 jours après la clôture du délai légal pour déposer une requête en inéligibilité contre MECKASSOUA [on est donc en situation de forclusion], mais en plus de cela son recours en inéligibilité n’est accompagnée d’aucune preuve comme l’exige le Code Electoral, sans oublier les deux décisions majeures de la Cour Constitutionnelle du 27 novembre 2020 et du 29 juin 2021 qui respectivement vide tous les contentieux de candidature et proclame définitivement élu Député Abdou Karim MECKASSOUA. Donc pour que la Cour Constitutionnelle juge cette rocambolesque requête recevable au motif de l’inéligibilité, il faudrait :
• Qu’elle ignore le fait que Me Anatole Max MAÏTOVO, avocat du faire-valoir du « Sultan », a déposé sa requête à la Cour Constitutionnelle 300 jours après la proclamation des listes provisoires au lieu des 3 jours légaux [forclusion exponentielle, article 92 du Code Electoral]
• Qu’elle s’essuie les pieds sur le Code Electoral en son article 93 qui exige que tout recours soulevant la question de l’inéligibilité d’un candidat soit motivé et appuyé par des éléments de preuves
• Qu’elle crache sur ses deux décisions propres arrêtant la liste définitive des candidats aux législatives et proclamant les résultats définitifs des législatives partielles du 23 mai 2021
• Qu’elle s’assoit allègrement sur l’article 19 de la loi régissant son fonctionnement et son organisation qui dispose que toutes les décisions de la Cour Constitutionnelles ne sont pas susceptibles d’un quelconque recours et que celles-ci s’imposent à TOUS
10. Vous comprenez bien que même avec la meilleure volonté du monde pour faire plaisir au « Sultan », qui croit pouvoir tout acheter avec l’argent sale du crime organisé, il est TOUT SIMPLEMENT IMPOSSIBLE aux Sages de la Cour Constitutionnelle de proclamer la recevabilité de la requête au motif de l’inéligibilité tant, non pas les couleuvres, mais les dinosaures à avaler seraient énormes.
11. En résumé :
• Comme il n’y a pas de question préjudicielle, la requête est par conséquent irrecevable au motif de la question préjudicielle ;
• Comme il y a forclusion (300 jours au lieu des 3 jours légaux), qu’il y a également absence totale de preuves soutenant l’inéligibilité et que les décisions de la Cour Constitutionnelle ne sont pas susceptibles de recours, il ressort que la requête est irrecevable au motif de l’inéligibilité ;
12. En définitive (Actes 1, 2 et 3), la Cour Constitutionnelle est incompétente pour destituer un député de la Nation et pour juger de la constitutionnalité d’un rapport, de plus la requête est irrecevable au double motif de la question préjudicielle et de l’inéligibilité.
13. Au final, cette tentative malhabile d’instrumentaliser la Cour Constitutionnelle pour éliminer politiquement l’ancien Président de l’Assemblée Nationale, l’Honorable Député Abdou Karim MECKASSOU, se dégonfle comme une baudruche car cette requête vide ne résiste pas à une analyse juridique rigoureuse. Reste plus qu’à analyser dans le prochain acte les conséquences désastreuses, tant au niveau politique, sécuritaire, diplomatique et économique, d’une décision de la Cour Constitutionnelle fondée sur des raisons purement politiques et non sur le droit comme l’exige la Constitution. Et pour terminer le cycle, l’acte 5 de notre étude tentera de démêler le vrai du faux quant aux en-dessous de toute cette affaire (visite tout au moins suspecte du ministre Maxime BALALOU à la Cour Constitutionnelle (coïncidence ?), vices de procédure, mécanismes de corruptions, menaces et chantages, etc.).
14. A SUIVRE…
Fari Tahéruka SHABAZZ

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